About us / Contact

The Classical Music Network

Lyon

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

Rentrée hivernale

Lyon
Auditorium Maurice Ravel
09/12/2024 -  
Felix Mendelssohn : Ein Sommernachtstraum : Ouverture, opus 21
Jean Sibelius : Concerto pour violon en ré mineur, opus 47
Piotr Ilyitch Tchaïkovski : Symphonie n° 1 en sol mineur « Rêves d’hiver », opus 13

Sergey Khachatryan (violon)
Orchestre national de Lyon, Nikolaj Szeps-Znaider (direction)


N. Szeps-Znaider (© Julien Benhamou)


« Rêveries d’été » : tel est le titre choisi par les responsables de la programmation pour ce concert inaugural de la saison 2024‑2025 de l’Orchestre national de Lyon (ONL), à l’heure d’une rentrée marquée la froidure de ce début septembre lyonnais. Et alors que l’été semble en effet déjà devenu un rêve lointain, on espère se réchauffer à l’Auditorium Maurice Ravel à la flamme d’un programme nordique élaboré selon la traditionnelle formule ouverture/concerto/symphonie.


Si l’on regrette que Mendelssohn se trouve, comme trop souvent, réduit à ses seules ouvertures (pourquoi ne pas donner l’ensemble de la musique de scène du Songe d’une nuit d’été ?), les premières mesures de cette page composée en 1826 ne laissent aucun doute quant à l’état de forme de l’ONL en ce concert de rentrée  : tant du côté de la petite harmonie, d’emblée très bien en place, que de celui des pupitres de cordes, d’une homogénéité soyeuse, la formation rend justice à au talent d’orchestrateur hors pair d’un compositeur alors âgé de dix‑sept ans seulement. Comme à l’accoutumée, la battue énergique de Nikolaj Szeps‑Znaider anime cette ouverture savoureuse, qui, malgré quelques traits académiques, traduit les climats changeants de la pièce de Shakespeare, entre féerie nocturne et scènes burlesques (telle la danse des villageois apprentis comédiens).


Mais c’est surtout après l’entracte que l’ONL donne sa pleine mesure, dans une Première Symphonie de Tchaïkovski enthousiasmante. Depuis son arrivée à Lyon en 2020, Nikolaj Szeps‑Znaider a su transmettre à l’orchestre sa passion pour le répertoire romantique tardif, et en particulier ses affinités avec la musique de Tchaïkovski. Après une très belle Pathétique donnée lors d’un des derniers concerts de la saison dernière, le chef danois reprend donc le cycle des symphonies au début, avec une œuvre déjà habitée par le souffle caractéristique du compositeur, mais plus objective et moins débridée que les trois dernières et plus célèbres symphonies. Sous‑titré « Rêves durant un voyage d’hiver », et bien qu’on y puisse entendre l’évocation d’un voyage en troïka sous la neige, le premier mouvement (Allegro tranquillo) paraît ici plus printanier qu’hivernal, d’un caractère à la fois vif et paisible, avec des cordes une nouvelle fois très homogènes (superbe travail de Jennifer Gilbert au premier violon). De même, l’Adagio cantabile ma non tanto qui suit mérite bien peu son sous‑titre de « Contrée lugubre, contrée brumeuse » : sous la baguette de Nikolaj Szeps‑Znaider, il prend l’allure d’un nocturne très lyrique, dans lequel font merveille les souffleurs lyonnais : la souple mélodie d’abord entonnée par le hautbois solo est soutenue puis reprise par les flûtes, avant de circuler d’un pupitre à l’autre, jusqu’aux cors chaleureux de Gabriel Dambricourt et Guillaume Têtu. Si le mendelssohnien Allegro scherzando semble par contraste un peu en retrait, le Finale est lui aussi une grande réussite, à la fois dans son introduction où se fait entendre une mélodie du folklore russe, que dans son Allegro maestoso conclusif, d’une énergie incandescente que Szeps‑Znaider communique à tout l’orchestre, particulièrement aux cuivres et aux violoncelles, qui parent cette musique de sonorités flamboyantes.


Dans l’intervalle de ces deux belles pages purement orchestrales, le Concerto pour violon de Sibelius met en valeur la virtuosité de Sergey Khachatryan. Le violoniste arménien aborde ce pilier du répertoire concertant pour violon avec une décontraction et une facilité étonnantes, ne faisant qu’une bouchée de ses redoutables difficultés, en particulier dans le premier mouvement et ses longues cadences. S’il s’éponge parfois le front au terme de ses envolées brillantes, il attend ensuite paisiblement, en position de repos et l’air quelque peu ailleurs, que l’orchestre en termine avec ses tutti. Ses qualités instrumentales ne sont à aucun moment prises en défaut – main gauche diaboliquement précise, archet souple et tranchant à la fois, intonation vibrante –, mais Khachatryan donne l’impression de jouer un peu seul, sans se préoccuper vraiment d’un orchestre volontairement en retrait, Szeps‑Znaider ayant compris la nécessité de laisser briller un tel tempérament soliste. Il en va de même dans le célèbre mouvement lent, où la cantilène assurée du violon plane très au‑dessus d’un accompagnement bien conduit et sobre ; néanmoins, les passages dialogués entre soliste et orchestre paraissent expédiés, par exemple avec l’alto solo. Enfin, le final est brillant et trépidant, mais un peu survolé également : en définitive, Khachatryan impressionne plus qu’il ne touche dans ce concerto, plus proche des conceptions d’un Jascha Heifetz que de celles de David Oïstrakh. Pour finir, c’est toujours avec le même calme souverain que le violoniste accueille tant les ovations du public qu’une sonnerie de téléphone persistante, qui retentit alors qu’il s’apprête à donner son bis. Celui‑ci, une chanson du folklore arménien d’une mélodie très simple, dégage enfin une authentique émotion, et permet à Sergey Khachatryan de sortir de sa superbe distance juste avant de quitter la scène.


Le site de Sergey Khachatryan
Le site de l’Orchestre national de Lyon



François Anselmini

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com