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Haut en couleur

Vézelay
Basilique Sainte-Marie-Madeleine
08/22/2024 -  et 27 août 2024 (La Chaise-Dieu)
Claudio Monteverdi : Vespro della beata Vergine
Miriam Allan, Gwendoline Blondeel (sopranos), Leandro Marziotte, Valerio Contaldo, Pierre-Antoine Chaumien (ténors), André Morsch, Salvo Vitale (basses)
Chœur de chambre de Namur, Cappella Mediterranea, Leonardo García Alarcón (direction)




Parmi les chefs‑d’œuvre de Monteverdi, les Vêpres de la Vierge (1610) restent aujourd’hui éclipsées au concert par la place prépondérante des œuvres dramatiques de celui qu’on considère comme l’un des pères fondateurs de l’opéra, d’Orfeo (1609) au Couronnement de Poppée (1643). Pour autant, tout auditeur des Vêpres ne peut qu’être émerveillé par l’ampleur des moyens déployés, entre richesse des coloris (des cornets à bouquins aux sacqueboutes) et entrecroisement stimulant des formes (solo, duo, chœurs, etc). Les sources manquent pour comprendre comment ce corpus volontiers hétéroclite a été formé, en donnant parfois l’impression d’une compilation de pièces plus ou moins anciennes, probablement rassemblées pour démontrer un savoir‑faire accompli, lorgnant en maints endroits vers la pyrotechnie vocale de l’opéra naissant.


On sait pouvoir compter sur un spécialiste aussi reconnu que Leonardo García Alarcón pour explorer les moindres recoins de cette partition, en un mélange de ferveur et de vitalité enthousiasmantes, le tout basé sur une foi chrétienne sincère et sans ostentation : la mise en valeur des moindres inflexions musicales se fait toujours au service du sens, tandis que plusieurs écrans répartis de chaque côté aident le public à suivre le récit sans jamais avoir à déchiffrer la notice dans la pénombre. Le début des Vêpres peut surprendre par ses tempi enlevés, sa rythmique architecturée et sa propension à faire ressortir les basses : le geste tout en contrastes du chef argentin trouve ainsi une énergie aux résonances humaines, loin de toute pesanteur, tout en profitant d’effets de spatialisation bienvenus (notamment la répartition initiale des chœurs dans les travées). Cette idée sera plusieurs fois mise en œuvre tout au long de la soirée, sans jamais paraître excessive : quoi de plus logique que d’illustrer ainsi la joute des deux séraphins ou des chants successifs en écho ?



(© Vincent Arbelet)


Si le Chœur de chambre de Namur se montre une nouvelle fois exemplaire, à l’instar des forces orchestrales de la Cappella Mediterranea, on reste quelque peu sur sa faim au niveau de la prestation des solistes masculins, un peu en retrait. Ainsi de Leandro Marziotte, qui semble forcer sa voix, sans parvenir à masquer des difficultés d’intonation dans les aigus, tandis que Valerio Contaldo semble plus effacé, en un chant solide mais sans prise de risques. On est beaucoup plus convaincu par les solaires Miriam Allan (remplaçant Mariana Flores) et Gwendoline Blondeel, qui se situent à un autre niveau interprétatif, grâce à la vigueur de leur engagement.


Avant de reprendre en bis le mouvement final (« Sicut erat in principio ») du Magnificat, Leonardo García Alarcón s’adresse malicieusement au public pour s’étonner d’avoir attendu vingt‑sept ans, depuis son arrivée en Europe, pour être invité à se produire dans le cadre magnifique de la basilique de Vézelay. On espère qu’il y reviendra très vite, pour continuer à faire vivre les trésors du répertoire baroque de toute son inspiration haute en couleurs.


Le site des Rencontres musicales de Vézelay



Florent Coudeyrat

 

 

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