About us / Contact

The Classical Music Network

Liège

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

Un grand moment de chant

Liège
Opéra royal de Wallonie
05/19/2024 -  et 21, 23, 25, 28 mai 2024
Vincenzo Bellini : I Capuleti e i Montecchi
Rosa Feola (Giulietta), Raffaella Lupinacci (Romeo), Roberto Lorenzi (Capellio), Maxim Mironov (Tebaldo), Adolfo Corrado (Lorenzo)
Chœurs de l’Opéra royal de Wallonie, Denis Segond (chef des chœurs), Orchestre de l’Opéra royal de Wallonie-Liège, Maurizio Benini (direction musicale)
Allex Aguilera (mise en scène, décors), Françoise Raybaud (costumes), Luis Perdiguero (lumières), Arnaud Pottier (vidéo)


(© ORW-Liège/Jonathan Berger)


La saison se poursuit à l’Opéra royal de Wallonie avec Les Capulet et les Montaigu (1830), quatorze ans après les précédentes représentations de l’opéra de Bellini. De cette nouvelle production, nous retiendrons surtout les prestations des chanteurs et, dans une moindre mesure, de l’orchestre, moins la mise en scène, malgré sa cohérence et sa lisibilité.


Pour cet opéra, dont le livret diffère sensiblement de la tragédie de Shakespeare, au contraire de celui de Gounod, l’Opéra royal de Wallonie a réuni une belle et solide distribution. Tous s’investissent formidablement dans leur personnage et à peu près tous chantent excellemment leur partie. Les cinq voix solistes séduisent par leur timbre et impressionnent par leur virtuosité. Rosa Feola et Raffaella Lupinacci se produisent pour la première fois sur cette scène, et il faut espérer qu’elles reviennent en aussi belle forme lors d’une prochaine saison. La soprano délivre une impeccable performance en Juliette, fine et maîtrisée, avec un phrasé élégant, une intonation sûre, une émission claire. Elle possède en outre un timbre riche et des aigus solides. La mezzo‑soprano suscite autant d’enthousiasme, par ses moyens vocaux assez considérables, mais aussi par l’engagement dont elle fait preuve. Son Roméo accuse des traits un peu trop féminins, mais l’interaction entre les amants n’en demeure pas moins forte et crédible. Toutes deux concilient admirablement les exigences vocales et dramatiques de leur rôle.


Fermeté, pureté, intensité, ces qualités s’appliquent aussi à ces messieurs. L’impeccable Maxim Mironov marque les esprits en Tebaldo, du moins au premier acte, par sa voix percutante et son chant enflammé. Le second acte le révèle en revanche un peu plus effacé. Les incarnations réussies de Roberto Lorenzi et d’Adolfo Corrado, respectivement Capellio et Lorenzo, dégagent une impression d’évidence, grâce à leur prestance, leur présence, mais aussi à leur voix et à leur chant qui offrent suffisamment de caractérisation à leur personnage, malgré les limites de la mise en scène.


La représentation profite aussi de la direction du très expérimenté Maurizio Benini. Directe et sans fioriture, elle offre aux chanteurs bien plus qu’un simple accompagnement. Le chef semble toutefois privilégier le drame au raffinement, malgré les compétentes des musiciens, lesquels offrent quelques interventions solistes fort bien tenues, les bois et les cuivres, en particulier. L’orchestre, parfois un peu trop fort, se montre donc à son niveau habituel, dès l’Ouverture, puissante et enlevée, ainsi que les choristes, vocalement du moins.


La mise en scène aux idées pauvres d’Allex Aguilera, sa première à l’Opéra royal de Wallonie, ne se distingue vraiment pas par son originalité, mais elle offre une lecture pertinente de cet ouvrage, pris tel qu’il se présente, sans chercher trop loin. La direction d’acteur se limite ainsi au minimum, surtout pour les choristes, qui paraissent trop figés. Les trois personnages masculins, conventionnels dans leur comportement et leur attitude, manquent de caractérisation, mais le duo, crédible et intense, formé par Roméo et Juliette, fonctionne mieux, probablement en partie grâce au talent des interprètes. Le drame se déroule dans un décor gris et unique dans lequel une structure pivotante offre quelques changements de perspectives. Dans ce dispositif plutôt dépouillé, seuls les jeux de lumière créés notamment par la vidéo suscitent l’intérêt, sans oublier les assez beaux costumes, proches de ceux portés au dix‑neuvième siècle. Nous nous serions donc simplement contentés d’une version de concert, pour ce grand moment de chant, mais ce spectacle, en rien indigne, se laisse regarder.



Sébastien Foucart

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com