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De Broadway à Paris Paris Café de la Danse 09/18/2023 - et 23 octobre, 20*, 27 novembre, 11, 18 décembre 2023 Stephen Trask : Hedwig and the Angry Inch (adaptation Brice Hillairet et Dominique Guillo) Brice Hillairet (Hedwig), Anthéa Chauvière (Yitzhak)
Louis Buisset, Antonin Holub, Lucie Wendremaire (musiciens), Raphaël Sanchez (direction musicale)
Dominique Guillo (mise en scène), Jacques Rouveyrollis (création lumière), Christophe Yvernault (conception sonore)
(© Greg Juppin)
De Broadway à Paris en passant par Avignon, le musical rock culte Hedwig and the Angry Inch poursuit inexorablement sa carrière, adapté pour la première fois en français pour la grande joie d’un public nombreux qui se presse cet automne au Café de la Danse dans le quartier de la Roquette.
Rappel historique : Hedwig and the Angry Inch a été créé Off‑Broadway en 1998 et remporte d’emblée un Obie Award et le Outer Critics Circle de la meilleure comédie musicale Off‑Broadway. En 2001, son auteur, John Cameron Mitchell, l’adapte au cinéma jouant magistralement le rôle‑titre : plus de dix ans après il est entré, restauré, dans la luxueuse collection de film culte « The Criterion Collection » qui l’édite directement sur Blu‑Ray Disc. En 2014, une nouvelle production à Broadway avec Neil Patrick remporte quatre Tony Awards dont celui de meilleure comédie musicale. 2023 voit naître sa première adaptation française signée Brice Hillairet et Dominique Guillo, présentée produite par Oscar Prod et présentée avec succès au Off du Festival d’Avignon avant de rejoindre Paris.
Premier acte théâtral à traiter du gender identity, Hedwig and the Angry Inch raconte la vie tourmentée d’un adolescent berlinois. Vivant avec sa mère du côté est au moment de la partition de la ville, il rencontre un soldat américain qui veut l’épouser et l’emmener en Amérique Pour cela il doit perdre par une chirurgie ratée une partie notable de son anatomie et, ni homme ni femme, de Hansel devient Hedwig, prénom de sa mère. A peine arrivé aux Etats‑Unis, Hedwig est plaqué par son soldat et se lance dans une vie aventureuse qui le mène, au travers de quelques désillusions amoureuses, au rock. La pièce, comme le film, narre cette vie singulière et tragique à l’aide des chansons qu’Hedwig a composées tout au long de sa carrière de rock star.
L’adaptation française favorise grandement la compréhension de ce parcours chaotique car si les chansons sont chantées en anglais (avec un magnifique surtitrage), Hedwig et son orchestre The Angry Inch nous font vivre cette vie exubérante en français. La réalisation est miraculeuse car faite avec très peu de moyens, une petite scène de cabaret peu luxueux, quelques accessoires bien utilisés, des éclairages subtils, un discret bandeau vidéo au‑dessus de la scène qui illustre l’histoire (chute du Mur de Berlin, itinéraire américain d’Hedwig, quelques images extraites du film). Les quatre musiciens participent physiquement et vocalement à l’action et le second personnage, Yitzhak, le boy‑friend d’Hedwig (Anthéa Chauvière), fait avancer l’action avant de terminer par un époustouflant numéro chanté. Brice Hillairet incarne Hedwig, aussi bonne comédienne (avec un accent allemand plus vrai que nature) que chanteuse. Avec ses costumes bigarrés et des perruques extravagantes, elle fait exploser avec glamour tous les tubes du musical, « The Origin of Love », « Lift up your Hands », un rock magnifique, énergique et coloré nourri de celui des crypto‑rockers berlinois, David Bowie, Nico et Lou Reed. Les quatre musiciens font des miracles autant comme choristes qu’avec leurs instruments pour soulever un public conquis d’avance mais fasciné par la réussite de ce magnifique hymne à l’identité traité avec autant de légèreté que de réalisme.
Olivier Brunel
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