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We can make so much happen here together München Herkulessaal 09/21/2023 - et 22 (München), 24 (Ottobeuren) septembre 2023 Joseph Haydn : Die Schöpfung, Hob.XXI:2 Lucy Crowe (soprano), Benjamin Bruns (ténor), Christian Gerhaher (baryton)
Chor des Bayerischen Rundfunks, Peter Dijkstra (chef de chœur), Symphonieorchester des Bayerischen Rundfunks, Sir Simon Rattle (direction) (© Astrid Ackermann)
Enfin ! Voilà trois saisons que l’Orchestre symphonique de la Radio bavaroise attend patiemment que l’ère Rattle commence. Certes, la crème de la crème des chefs sont venus régulièrement les diriger mais ce n’est pas la même chose que d’avoir son directeur musical qui peut établir sa marque et développer une relation sur la durée.
Etait-il possible de trouver une œuvre aussi emblématique pour démarrer que cette Création ? Sir Simon Rattle s’est souvent exprimé sur la relation particulière qu’il entretient avec Haydn. Jouée en effectif de chambre et avec des pratiques baroques, nous sommes bien loin de ce que ces mêmes musiciens ont donné par le passé sous la baguette de Leonard Bernstein, spectaculaire et « strauss‑isant », ou de la lecture un peu austère et sévère de Bernard Haitink dans cette même salle. La conception de Rattle déborde de positivité et de vie.
Lucy Crowe, qui avait été sous la baguette de Gardiner la soliste de la Missa Solemnis avec des couleurs bien sombres, est ici radieuse, ornant avec malice et gourmandise ses airs, en particulier celui de la deuxième partie. Benjamin Bruns nous rappelle que le David n’est pas loin. Christian Gerhaher donne une leçon de chant, caractérisant chaque mot et avec une technique rare.
Même si les musiciens s’inspirent de pratiques baroques, nous sommes bien avec l’Orchestre symphonique de la Radio bavaroise. Les cordes ont peu de vibrato mais elles ont couleur et dynamique. Henrik Wiese a de superbes interventions à la flûte. Le niveau est très élevé. Le Chœur de la Radio bavaroise est vraiment un des meilleurs d’Allemagne. Je vous recommande d’écouter l’extrait de la répétition mis en ligne où Rattle fait travailler le chœur sur le mot « Welt ».
La salle était pleine pour ce premier concert et de nombreux mélomanes étaient à l’extérieur pour chercher une hypothétique place disponible. Les murs de la ville et les affiches dans les transports en commun font fête à « Sir Simon ». Le silence était religieux mais surtout, tous les musiciens avaient sur leur visage une expression de satisfaction qui en dit long.
Cette Création sera donnée à trois reprises, dont un concert en la basilique baroque d’Ottobeuren. Rattle continuera avec trois concerts programmant une création de Betsy Jolas et la Sixième Symphonie de Mahler, suivis d’un déplacement à Paris. Il participera ensuite au festival Musica Viva avec le Coro de Luciano Berio et une création mondiale du compositeur slovène Vito Zuraj, puis donnera le lendemain un concert pour les familles mélangeant des extraits de La Mer de Debussy et du Poème de l’extase de Scriabine.
Consciemment ou inconsciemment, la vie musicale de Munich se recentre sur la venue de Sir Simon Rattle. L’Orchestre philharmonique de Munich attendra celle de son futur directeur musical, Lahav Shani, qui ne prendra ses fonctions qu’en 2026. Et Vladimir Jurowski et l’Orchestre d’Etat de Bavière sont actuellement en train de conclure une tournée européenne. L’Opéra n’affiche que quelques reprises et ne présentera sa première nouvelle production des Noces de Figaro que fin octobre.
A la fin du concert, les spectateurs ont reçu une petite carte signée par Simon Rattle avec, en anglais et en allemand : « We can make so much happen here together », que l’on peut traduire par « Nous pouvons accomplir tant de choses ici ensemble ». Quel démarrage !
Antoine Lévy-Leboyer
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