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La rentrée russe de Klaus Mäkelä Paris Philharmonie 09/06/2023 - et 7* septembre 2023 Igor Stravinsky : Petrouchka
Serge Prokofiev : Concerto pour piano n° 1, opus 10
Serge Rachmaninov : Les Cloches, opus 35 Olga Peretyatko (soprano), Pavel Petrov (ténor), Alexey Markov (baryton), Bertrand Chamayou (piano)
Chœur de l’Orchestre de Paris, Richard Wilberforce (chef de chœur), Musiikkitalon Kuoro, Eleriin Müüripeal (cheffe de chœur), Orchestre de Paris, Klaus Mäkelä (direction)
K. Mäkelä (© Sophie Le Roux)
Programme russe pour la rentrée de l’Orchestre de Paris, inauguré par Petrouchka. A Aix‑en‑Provence, Klaus Mäkelä avait donné les trois grands ballets des années 1910 en une soirée, illustrés par des vidéos. A la Philharmonie, l’histoire du pantin n’est plus accompagnée du support visuel de Bertrand Mandico. De toute façon, le chef finlandais ne la raconte pas, il dirige plutôt un concerto pour orchestre en quatre parties que des « scènes burlesques en quatre tableaux ». Le burlesque, d’ailleurs, a disparu de cette approche rien moins que narrative. Loin de faire sourire, la Valse de la Ballerine et du Maure, chez Petrouchka, lorgne vers Vienne – sa patrie d’origine, puisqu’elle vient de Joseph Lanner. Les danses de la « Fête populaire de la Semaine grasse » ne montrent pas plus d’humour, notamment celle du paysan et de l’ours. Faut‑il reprocher à la direction de s’en tenir à cette flamboyance un rien démonstrative ? Pas vraiment, étant donné la cohérence du propos, dont il faut seulement admettre les prémisses. Elle est d’une impeccable clarté, fluidifie la masse sonore, souligne les contrechants, fait jaillir les couleurs – malheureusement au détriment du rythme. Mais puisque le ballet a disparu... L’orchestre, en tout cas, est formidable dans cette version de 1947.
Parmi les musiciens virtuoses, on repère le pianiste. Evidemment : c’est Bertrand Chamayou, bientôt soliste d’un éblouissant Premier Concerto de Prokofiev où la balance avec l’orchestre ne s’avère pas toujours idéale. Non content d’en avoir les doigts, mis à rude épreuve, le pianiste a le mordant et l’insolence du jeune Prokofiev, notamment dans l’Allegro scherzando final. Mais il sait faire chanter l’Andante assai – et l’orchestre aussi – oasis de poésie au milieu d’une révolution musicale. Il offre ensuite, poétique bis, une Alouette de Glinka transcrite par Balakirev.
On peut trouver des points communs entre le ballet de Stravinsky et le Concerto de Prokofiev. La seconde partie du concert propose un tout autre visage de la Russie, avec Les Cloches de Rachmaninov, un de ses chefs‑d’œuvre, cantate grandiose intitulée « poème », sur des textes de Poe. Si le compositeur s’y remémore des souvenirs d’enfance, il écrit surtout une allégorie des quatre âges de la vie, un « Du berceau à la tombe », en quelque sorte. Chœur ou orchestre, la machine tourne à plein régime, mais un moteur n’est pas une âme, derrière la flamboyance manque l’émotion. La première partie, qui évoque l’enfance, pâtit de surcroît d’une erreur de distribution : trop léger, le ténor Pavel Petrov ne passe pas la rampe. Dans la deuxième, la nuit de noces devrait se nimber d’une sensualité que ne distille pas non plus Olga Peretyatko, impeccable, mais dont la voix, en se corsant, s’est durcie et a perdu de sa stabilité. Les visions furieuses de la troisième impressionnent par le déchaînement des forces, mais sans la noirceur hallucinée de la musique. Le glas de la dernière partie émeut enfin un peu, grâce au somptueux baryton d’Alexey Markov.
Le site de Klaus Mäkelä
Le site d’Olga Peretyatko
Le site de Pavel Petrov
Le site de Bertrand Chamayou
Le site de l’Orchestre de Paris
Didier van Moere
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