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Une journée chez Edmond Rostand Biarritz Cambo-les-Bains (Villa Arnaga) 09/03/2023 -
Depuis un demi‑siècle, l’Académie Ravel, basée à Saint‑Jean‑de‑Luz et Ciboure au Pays basque français, présidée cette année par le compositeur Michael Jarrell et dirigée par le pianiste Bertrand Chamayou, réunit l’été une soixantaine de jeunes musiciens du monde entier. Certains se sont produit en public dans le cadre enchanteur de la Villa Arnaga à Cambo‑les‑Bains, intégrant ainsi la programmation du Festival Ravel.
(© Olivier Brunel)
Cadre enchanteur certes, la villa que s’était fait construire au tournant du XXe siècle le dramaturge Edmond Rostand, fraîchement élu académicien, avec les copieux droits d’auteurs de son Aiglon, dans le style château néo‑basque, avec des jardins magnifiques aux massifs rivalisant de couleurs au fait de leur gloire en cette fin d’été et entouré d’un domaine extravagant ! Mais pour la musique, acoustique déplorable avec un grand salon très théâtral aux fresques romantiques peintes par Gaston La Touche mais, des boiseries du plancher au plafond à caissons jusqu’aux chaises de plastique, tout est fait pour réverbérer les sons au maximum. On se demande si c’est donner une chance à ces jeunes musiciens que de leur offrir de faire leurs preuves, après des classes de maître intensives, dans des conditions acoustiques si déplorables. On devine aisément qu’on ne leur a pas laissé la chance d’y répéter suffisamment pour au moins tenter d’apprivoiser ce phénomène de réverbération car en matière d’acoustique tout est, dans certaines limites, négociable.
Car hormis l’excellent Trio Kyle, constitué par trois artistes sud‑coréens (Junha Song, piano, Jeeyoung Park, violon, et Jaeyol Yun, violoncelle), déjà professionnels dans leur présentation, leur tenue vestimentaire et surtout le sérieux de l’équilibre de leur ensemble (Quarante‑troisième Trio de Haydn), tous les participants ont été pris au même piège, surtout les pianistes qui ne pouvaient se permettre ni un forte ni une succession de notes trop rapides sans déchaîner des foudres sonores bien peu harmoniques...
Si la Japonaise Sari Ishikawa semblait avoir flairé la chose, rendant justice à Echardes de Győrgy Kurtág, une courte pièce de 1978, malgré son caractère percussif, le malheureux Noé Drdak, excellent violoncelliste aux sonorités chaudes, s’est vu recouvert par le massacre imposé par son pianiste Julien Le Pape à la partition de piano des deux premiers mouvements de la Seconde Sonate pour violoncelle et piano de Brahms avec laquelle ils ont ouvert le concert. Le pianiste allemand Erik Breer n’a pas démérité dans la première pièce (« J’entends dans le lointain... ») des Ombres de Schmitt malgré les longs tunnels parsemant cette musique postromantique. Peu de plaisir à écouter l’Allegro con fuoco qui ouvre la merveilleuse Sonate pour violon et piano de Poulenc par une violoniste certes virtuose mais à la sonorité ingrate, elle aussi engloutie dans la partie de piano jouée à plein volume par Thuy‑Anh Vuong. Situation d’autant plus regrettables que ces deux pianistes accompagnateurs sont des professionnels enseignant l’art de l’accompagnement...
Deux autres concerts devaient continuer cette journée chez Edmond Rostand, dont un dans les écuries du domaine, couloir ouvert à ses deux extrémités sur l’extérieur dont on doute a priori des qualités acoustiques, et un plus tardif dans le même grand salon où les participants devaient être rejoints par le pianiste Jean‑François Heisser, président et directeur artistique de l’Académie, pour des improvisations entre Messiaen et Mompou.
Le site du Festival Ravel en Pays basque
Olivier Brunel
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