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Matinales du dimanche Vienna Konzerthaus 04/15/2023 - et 16* avril 2023 Győrgy Ligeti : Lontano
Maurice Ravel : Rapsodie espagnole
Manuel de Falla: Noches en los jardines de Espana
Claude Debussy : La Mer Gabriela Montero (piano)
Wiener Symphoniker, Michel Tabachnik (direction)
M. Tabachnik (© Jean‑Baptiste Millot)
C’est le vétéran Michel Tabachnik qui prend la relève du chef espagnol Pablo Heras‑Casado, déclaré souffrant, et qui s’efforce de maintenir le fort bien conçu programme d’origine. Lontano constitue en effet une excellente introduction, pour des raisons qu’il est plus aisé de ressentir que d’expliquer – peut-être par le recours aux textures nocturnales qui ouvrent chacune des œuvres du concert, ou bien la proximité harmonique des accords tonaux insérés par Ligeti, qui rappellent les signatures de Debussy ou de Ravel. La pulsation du chef est rigoureuse, élicitant des réactions précises et bien proportionnées des pupitres du Symphonique de Vienne dans une lecture en progression constante.
Les mouvements de la Rapsodie espagnole de Ravel prennent quant à eux la forme de vignettes contrastées, nettement énoncées, délicieuses à défaut d’être enchanteresses ; « Feria » est l’épisode le plus abouti, juxtaposant avec bonheur le bouillonnement carnavalesque et la langueur solitaire.
La pièce concertante de Falla n’offre pas les mêmes contentements : les timbres de l’orchestre sont trop dépareillés, parfois brutaux, et la mise en place excessivement tendue pour permettre d’apprécier la richesse de l’œuvre. Gabriela Montero joue certes avec instinct, mais aussi trop de désinvolture et d’éclats métalliques dans les forte pour sauver la mise. Il faut attendre le bis, où le public propose à la volée un thème issu de La Flûte enchantée pour s’émerveiller sur les qualités d’improvisatrice de la pianiste vénézuélienne.
La Mer de Debussy est d’un tout autre calibre : le chef fait emporter son pupitre, dirigeant par cœur, et nous plonge immédiatement dans l’œuvre. Des appuis rythmiques scrupuleux communiquent le balancement des vagues, les tonalités sont pleines, épanouies et viennent remplir jusqu’aux moments d’attente de la partition. Dans le deuxième mouvement, on admire la fluidité de la battue, qui gère avec grâce les enchaînements entre les épisodes. La conclusion est patiemment construite, poussée par une vague rythmique inéluctable, déferlant en une ultime fulgurance.
Dimitri Finker
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