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Retour gagnant des Toulousains

Paris
Philharmonie
03/24/2023 -  
Antonín Dvorák : Concerto pour violoncelle n° 2, opus 104, B. 191
Dimitri Chostakovitch : Symphonie n° 9, opus 70

Edgar Moreau (violoncelle)
Orchestre national du Capitole de Toulouse, Tugan Sokhiev (direction)


T. Sokhiev (© Romain Alcaraz)


L’air de rien, la dernière prestation parisienne de l’Orchestre national du Capitole de Toulouse sous la direction de Tugan Sokhiev remonte à décembre 2021. La seconde partie de la pandémie a d’abord tenu l’orchestre loin de Paris et la démission du chef russe en mars 2022 à la suite de l’invasion de l’Ukraine ont empêché ce dernier de diriger son concert d’adieu en tant que directeur musical prévu en juin dernier. Depuis, les esprits se sont calmés et Tugan Sokhiev a fait un retour triomphal à Toulouse le 17 novembre dernier. Pour le plus grand bonheur du public parisien qui aime cet orchestre et le chef russe, ils étaient donc présents pour des presque retrouvailles saluées d’emblée par de chaleureux applaudissements.


Le programme était différent de celui donné la veille à Toulouse qui incluait la création française du Concerto pour hautbois d’Alexander Raskatov. Dommage pour les mélomanes de la région parisienne, privés d’entendre l’extraordinaire Alexei Ogrintchouk, hautbois solo de l’Orchestre royal du Concertgebouw. A Paris, place au non moins magnifique violoncelliste Edgar Moreau pour le très célèbre Concerto de Dvorák.


Le caractère éminemment slave de cette musique ne résiste naturellement pas à Tugan Sokhiev qui l’empoigne avec son énergie habituelle. L’orchestre répond à merveille à chaque sollicitation et aux quelques demandes d’équilibres du chef, qui n’aime rien de plus que de faire en sorte que les musiciens s’écoutent d’un pupitre à l’autre. Le résultat est spectaculaire : on entend tout, la musique circule et fonctionne sans baisse de tension. Le violoncelle David Tecchler de 1711 que joue Edgar Moreau se fond parfaitement à l’ensemble même si, dans certains tutti, il peine à passer l’orchestre. L’intonation est tout simplement parfaite et la connexion avec Tugan Sokhiev, dont témoignent de nombreux échanges de sourires, fonctionne. Le début du mouvement lent permet surtout d’apprécier la beauté du pupitre des vents de l’orchestre puis ensuite le cantabile du jeune Français, qui dialogue finement avec ces derniers. Le final, dans une veine plus folklorique, est parfaitement réussi et Edgar Moreau y montre d’incontestables qualités techniques. Les incessants changements de climat sont construits avec brio jusqu’à l’apothéose finale menée sans excès.


La Neuvième Symphonie de Chostakovitch est assez atypique. Composée à la fin de la guerre, elle n’est pas, comme l’espéraient pourtant les autorités de l’époque, une ode à la gloire d’un pays qui vient de vaincre le nazisme. Commençant comme du Haydn, elle évoque à d’autres moments le Prokofiev de la Symphonie « Classique ». Composée de cinq mouvements, dont les trois derniers sont enchaînés, elle est d’une incroyable vitalité sous la direction à nouveau à mains nues d’un Sokhiev dans son élément. Faisant une confiance absolue (comme il a raison), il s’efface parfois et à d’autres moments, il distribue les rôles à la façon d’un maître de jeu Le premier mouvement permet d’apprécier la pureté de son de la nouvelle violon solo, Kim Jaewan, arrivée en décembre dernier. Le deuxième mouvement, plus mélancolique, donne la place belle aux bois, la magnifique clarinette solo Floriane Tardy, le hautbois précis de Chi Yuen Cheng et la flûte poétique de Sandrine Tilly. Leurs échanges et dialogues sont délicatement sollicités par Tugan Sokhiev. Place ensuite à un Chostakovitch plus attendu avec fanfares, rythmes endiablés, contrastes, ruptures rythmiques, percussions à la fête et même un choral de trombones alternant avec un solo de basson joué avec talent par Guillaume Brun. La mise en place est parfaite, les nuances précises et les couleurs sont ici bien noires. Changement rapide de climat avec la toute fin de l’œuvre comme récapitulatif des ambiances précédentes. Du très grand art, réalisé avec une précision d’orfèvre par un orchestre en pleine forme artistique et jouant collectif.


Le directeur musical désigné, le jeune Finlandais Tarmo Peltokoski, qui arrivera à Toulouse en septembre 2024, trouvera un orchestre en pleine santé. Et ce qui frappe toujours, c’est la belle complicité qui lie ces musiciens et leur désormais ancien directeur musical. Nul doute que cette collaboration au plus haut niveau avec cet orchestre hors du commun qu’il a façonné avec le succès que l’on sait va se poursuivre. On se réjouit d’avance de pouvoir entendre le 13 mars 2024 ces mêmes interprètes dans la Symphonie « Leningrad » du même Chostakovitch. Ce sera sans doute aussi un autre grand moment de musique.



Gilles Lesur

 

 

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