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Un humour bon enfant

Paris
Opéra Comique
03/16/2023 -  et 17, 18, 19, 21, 22, 23, 24, 25, 26 mars 2023
Jean-Baptiste Lully : Le Bourgeois gentilhomme, LWV 43
Jérôme Deschamps (M. Jourdain), Josiane Stoléru (Mme Jourdain), Jean‑Claude Bolle‑Reddat (Le maître de philosophie), Sébastien Boudrot (Le maître de musique, Tailleur), Lucrèce Carmignac/Pauline Tricot* (Nicole), Vincent Debost (Covielle, Le maître d’armes), Pauline Deshons*/Bénédicte Choisnet (Dorimène), Flore Babled/Pauline Gardel* (Lucile), Aurélien Gabrielli (Cléonte), Guillaume Laloux (Dorante, Le maître de danse)
L’Académie des Musiciens du Louvre, Les Musiciens du Louvre, Théotime Langlois de Swarte (direction)
Jérôme Deschamps (mise en scène), Natalie Van Parys (chorégraphie), Félix Deschamps (scénographie), Vanessa Sannino (costumes), François Menou (lumières)


(© Stefan Brion)


Créée le 7 juin 2019 au Printemps des comédiens à Montpellier, avant une vaste tournée à travers toute la France, la production du Bourgeois gentilhomme (1670) imaginée par Jérôme Deschamps revient à l’Opéra Comique, trois ans après avoir fait les frais d’une interruption inopinée, due à la pandémie. A 75 ans, l’ancien directeur du Comique (entre 2007 et 2015) n’a rien perdu du mélange d’énergie bouffonne et bon enfant qui caractérise son jeu expressif, entre grimaces et mimiques farfelues : de quoi rappeler, par l’apport des artifices du pantomime, toute une génération d’acteurs populaires (de Paul Préboist à Coluche) ou, plus proche de nous, celle de la compagnie Les Deschiens, notamment Macha Makeïeff, François Morel ou Yolande Moreau, pour ne citer que les plus connus.


Omniprésent pendant les trois heures du spectacle, Deschamps campe d’emblée un M. Jourdain peu sympathique, plus autoritaire que maladroit, qui manque de cette tendresse naïve souvent prêtée à son personnage. On peine ainsi à s’attacher à ce mégalomane délirant, qui sait provoquer le rire par son élocution chuintante mais laisse de côté les fragilités de son personnage, possiblement touchant jusque dans ses contradictions. Si la première partie du spectacle pâtit quelque peu de ce manque d’empathie pour le rôle principal, on gagne ensuite en intensité avec la scène très réussie du banquet, où le gag du cochon fait mouche (prouvant ainsi, avec force détails volontairement anachroniques, l’adage « tout est bon, dans le cochon !  »). On aime aussi l’ivresse rythmique du ballet des turqueries, où les délirantes capes des costumes imaginés par Vanessa Sannino virevoltent en une évocation sensuelle et exotique, digne des derviches tourneurs.


La distribution, un rien inégale dans les seconds rôles, pèche par excès de cabotinage en première partie, notamment le duo caricatural entre le Maître de musique et le Maître de ballet – ce dernier interprété par un Guillaume Laloux, nettement plus convaincant dans l’éloquente arrogance prêtée à Dorante. Josiane Stoléru incarne quant à elle une émouvante Mme Jourdain, malgré une voix qui manque parfois de projection. Bien incorporée à l’action, la musique de Lully reste accessoire par rapport à la partie théâtrale, qui emporte plus des trois quarts de l’ouvrage. Avec cette dernière comédie‑ballet, composée avant toutes ses tragédies lyriques, Lully ravit par ses courtes vignettes colorées, interprétés par un quatuor vocal d’une belle homogénéité. On aime aussi l’énergie insufflée par le chef Théotime Langlois de Swarte (28 ans), qui sait empoigner son violon pour entraîner Les Musiciens du Louvre dans l’exacerbation démonstrative des contrastes. C’est là sans doute une forme d’hommage à Marc Minkowski, qui devait diriger en alternance avec son jeune cadet, avant de se blesser tout récemment au bras. De quoi rappeler son amour pour ce répertoire, lui qui enregistra son tout premier disque pour Erato, en 1987, précisément consacré à Molière et Lully, tout en restant attaché à son rôle de bassoniste dans l’orchestre de William Christie, occupé à rendre sa gloire au chef‑d’œuvre de Lully, Atys, déjà à l’Opéra Comique.



Florent Coudeyrat

 

 

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