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Cool München IsarPhilharmonie 02/16/2023 - et 17* février 2023 Markus Lehmann‑Horn : Empörung (création)
Maurice Ravel : Concerto pour la main gauche
Igor Stravinsky : Le Sacre du printemps Alice Sara Ott (piano)
Münchner Philharmoniker, Santtu‑Matias Rouvali (direction) S.‑M. Rouvali (© Tobias Hase)
Commande de l’Orchestre philharmonique de Munich à Markus Lehmann‑Horn, Empörung (indignation) est une œuvre qui n’est pas sans rappeler certains choix esthétiques d’Apollon et Dionysos, autre création munichoise récente de Minas Borboudakis : orchestre à l’effectif impressionnant, pupitre de percussions très fourni et recherche de sonorités orchestrales très variées.
Le propos de cette indignation musicale est d’évoquer les périodes d’inactivité musicale forcée dues à la pandémie, les quatre percussionnistes soufflant régulièrement dans des porte‑voix. Une fois ces éléments articulés, le fracas des percussions n’est pas sans quelques bonnes surprises mais cette création, comme celle du compositeur grec, souffre d’un certaine manque de structure et de ligne et aurait peut‑être gagné à être plus concise. Elle offre cependant aux musiciens et à Santtu‑Matias Rouvali une occasion de montrer leur niveau technique et la grande dynamique dont ils sont capables. Comme le c’était le cas pour Zubin Mehta il y a quelques semaines, le chef fait preuve d’une très grande maîtrise technique et sa battue d’une précision impressionnante est ici très de circonstance.
La jeune pianiste Alice Sara Ott fait son entrée avec grand style : pieds nus, robe longue noire et un long gant noir à la main droite. Elle a surtout des moyens instrumentaux à la mesure de la difficulté de ce concerto. La mise en place de l’orchestre est également de très haut niveau. Mais malgré ces qualités, cette lecture manque d’une certaine continuité et pourrait gagner à être plus nuancée, l’écriture de Ravel étant très précise et plus variée. Mais la pianiste trouve la dimension de la cadence finale qui a une réelle grandeur. Très applaudie, elle donne en bis Für Alina d’Arvo Pärt, cette fois‑ci avec ses deux mains et sans gant.
Les musiciens sont à leur meilleur en seconde partie de ce concert dans un Sacre du printemps plein de sève et d’énergie. Santtu‑Matias Rouvali lance le solo de basson alors même que les applaudissements ne sont pas finis. La précision et l’autorité dont fait preuve le chef finlandais sont impressionnantes. Que de contrôle dans les indications de la main droite, dont on a l’impression que seul le poignet est mobile, donnant entrées et pulsations, tandis que la gauche sculpte la musique. Et comment ne pas être frappé par le calme dont il fait preuve à plusieurs reprises pour prendre le temps de tourner la page de sa partition avant de déchaîner ses forces orchestrales ? L’« Adoration de la Terre » est pleine de force. L’animation du tempo qu’il donne dans la « Danse sacrale » est enivrante. Voici un chef fondamentalement très cool.
Les autorités de la ville de Munich ont annoncé que ce sera finalement Lahav Shani qui prendra la direction musicale de cet orchestre à partir de la saison 2026‑2027. Le chef israélien prendra la relève de Valéry Gergiev dont le mandat avait été rompu suite à l’invasion de l’Ukraine. En l’attendant, l’orchestre poursuit sa saison avec un programme riche. Les Parisiens auront l’occasion d’entendre ces musiciens dans la Sixième Symphonie de Mahler sous la direction de Lorenzo Viotti à la Philharmonie de Paris le 27 février.
Antoine Lévy-Leboyer
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