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4 stars pour Aïda

Vienna
Staatsoper
01/14/2023 -  et 18, 21*, 24 janvier 2023
Giuseppe Verdi : Aida
Ilja Kazakov (Il Re), Elīna Garanca (Amneris), Anna Netrebko (Aida), Jonas Kaufmann (Radamès), Alexander Vinogradov (Ramphis), Luca Salsi (Amonasro), Hiroshi Amako (Messaggero), Anna Bondarenko (Sacerdotessa)
Chor der Wiener Staatsoper, Thomas Lang (préparation), Orchester der Wiener Staatsoper, Nicola Luisotti (direction musicale)
Nicolas Joel (mise en scène), Carlo Tommasi (décors, costumes), Jan Stripling (chorégraphie)


(© Wiener Staatsoper/Michael Pöhn)


L’Opéra de Vienne a mis les petits plats dans les grands pour une reprise d’Aïda qui restera dans les annales. Quatre des chanteurs les plus en vue actuellement ont été invités, pour l’immense bonheur des mélomanes, dont certains sont venus de loin pour assister à l’événement. Fort heureusement, la représentation ne s’est pas limitée à un alignement de gosiers célèbres : les voix se sont extrêmement bien mariées entre elles dans un souci constant d’harmonie et d’équilibre, et les interprètes étaient aussi impliqués dans leur rôle. Le spectacle a été parsemé de moments d’intense émotion et de passage dramatiquement très forts. La prestation la plus convaincante de cette soirée d’exception a été celle de Luca Salsi, Amonasro particulièrement mordant et engagé, ciselant avec précision et véhémence chaque accent et chaque mot, avec un superbe legato. Elīna Garanca a fait pour l’occasion des débuts très remarqués en Amneris : comme toujours, la mezzo lettone a séduit par sa voix ample et généreuse, homogène sur toute la tessiture, ainsi que par ses graves puissants et voluptueux. Mais comme toujours, la chanteuse a donné l’impression de vouloir tout contrôler, alors qu’on aurait souhaité une princesse un peu moins placide et plus passionnée. L’Aïda d’Anna Netrebko a péché par une diction approximative et un engagement scénique un peu limité. Mais si l’on fait abstraction de ces réserves, on ne peut qu’être subjugué par cette voix capiteuse et veloutée qui ne connaît apparemment aucune limite. Les couleurs sont infinies, les nuances variées, l’aigu étincelant, le grave sonore, et surtout les pianissimi longuement tenus sont une pure merveille, au point de faire chavirer toute la salle. Le Radamès de Jonas Kaufmann s’est, lui, révélé problématique à plus d’un titre. Certes, le ténor allemand impressionne toujours par ses subtiles mezza voce, son sens des nuances et du raffinement ainsi que par son émission sombre et moelleuse. Le « Celeste Aida » initial a été abordé avec douceur, pour ne pas dire avec une certaine prudence, et s’est certes terminé sur un splendide crescendo-decrescendo, mais à aucun moment il n’a traduit la vaillance et l’héroïsme du guerrier. En plein milieu de l’air, un spectateur a même demandé au ténor de chanter plus fort. Si l’on ne peut que condamner ce genre de pratique, force est néanmoins de reconnaître que la voix avait de la peine à remplir la salle. Sans parler des aigus qui coûtent désormais au chanteur des efforts visibles. Au rideau final, les interprètes ont été ovationnés pendant une bonne vingtaine de minutes par un public reconnaissant d’avoir assisté à l’événement lyrique de ce début d’année 2023.


En chef expérimenté qu’il est, Nicola Luisotti a réussi à donner cohérence et dynamisme à la soirée. Toutes les interventions des solistes de l’orchestre se sont révélées absolument remarquables, alors que les passages d’ensemble ont paru plus routiniers et sonores, sans beaucoup de nuances. Le maestro a néanmoins proposé une exécution claire et transparente, laissant entendre de nombreux détails insoupçonnés. La production de Nicolas Joel date de 1984 : elle a été étrennée par Lorin Maazel – à l’époque directeur musical de l’Opéra de Vienne – et marquait le retour dans la capitale autrichienne de Luciano Pavarotti après plusieurs années d’absence. Le faste du spectacle n’a rien à envier à celui des productions de Franco Zeffirelli et ne déparerait certainement pas aux Arènes de Vérone, avec une foison de temples, de statues et de colonnes et des costumes d’époque les uns plus bariolés que les autres. Ce lourd dispositif scénique nécessite plusieurs minutes de pause entre chaque scène, ce qui entrave la fluidité de la soirée. Il n’empêche, c’était aujourd'hui la cent vingt‑septième représentation de cette mise en scène, qui a encore de beaux soirs devant elle à Vienne.



Claudio Poloni

 

 

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