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Un cinquième de centenaire

Paris
Théâtre des Champs-Elysées
01/10/2023 -  et 5 (Tourcoing), 6 (Beauvais), 8 (Aix‑en‑Provence) janvier, 12 février (Lieusaint) 2023
Claude Debussy : Prélude à l’après‑midi d’un faune
Edouard Lalo : Namouna (Suite n° 1)
Albert Roussel : Bacchus et Ariane (Suite n° 2)
Jules Massenet : Scènes alsaciennes, suite d’orchestre n° 7
Paul Dukas : L’Apprenti sorcier
Maurice Ravel : La Valse

Les Siècles, François‑Xavier Roth (direction)


(© Sébastien Gauthier)


Les Siècles ont vingt ans... Orchestre créé en 2003 donc par François‑Xavier Roth « sur un projet de répertoire », pour reprendre l’expression qu’il a utilisée lors d’un entretien avec Stéphane Grant sur France Musique, cet ensemble est, à n’en pas douter, iconoclaste. Il s’agissait en effet d’avoir un orchestre capable d’aborder un éventail d’œuvres très large (en gros de Lully à la création contemporaine) pour lequel ses membres auraient recours aux instruments appropriés pour chaque répertoire ; un musicien doit donc savoir jouer de telle sorte de hautbois pour Rameau en première partie de concert avant d’en changer pour aborder, dans la seconde partie, une pièce de Poulenc avec un instrument d’une autre facture ! Si le tout premier concert de l’ensemble fut consacré à Haydn et Mozart, Les Siècles affirmèrent très rapidement leurs affinités avec la musique française puis étendirent leur répertoire à des compositeurs aussi divers que Liszt, Beethoven ou Mahler, l’orchestre étant aujourd’hui lancé dans une série des symphonies de ce dernier (voir ici).


Pour ce concert anniversaire, Les Siècles et son directeur musical sont revenus à leurs premières amours avec un florilège de musique française au tournant des XIXe et XXe siècles.


Pièce quasi iconique de la musique orchestrale française, le Prélude à l’après‑midi d’un faune (1894) déçoit d’emblée. Si elle ne connaît aucune défaillance technique, la flûte solo de Marion Ralincourt ne se révèle pas aussi sensuelle que souhaité, le relais de la harpe et du cor n’adoucissant pas davantage un climat qu’on aurait souhaité beaucoup plus extatique. Si François‑Xavier Roth s’avère très bon dans les passages animés, cette introduction musicale nous laisse sur notre faim.


La deuxième œuvre nous aura beaucoup plus convaincu : il faut dire que voir programmée la Première Suite (tirée du ballet intégral) de Namouna (1881‑1882) de Lalo est une occasion qui ne se présente pas tous les jours ! Avec un « Prélude » aux sonorités quasi wagnériennes (on pense presqu’au Prélude de L’Or du Rhin !), conduit par un pupitre de violoncelles conquérant épaulé par des cuivres rutilants (quatre cors, quatre trompettes, trois trombones et un ophicléide), on est immédiatement plongé dans des sonorités généreuses où l’orchestre s’épanouit pleinement. Après une « Sérénade » enlevée aux pizzicati quasi sardoniques, Les Siècles donnèrent un « Thème varié » d’une grande intensité, morceau où les accents du « grand romantisme » (ces élans de cordes...) côtoient des passages presque burlesques, précédant une « Parade de foire » haletante où les bois lancent l’orchestre avec fougue ; dommage que le hautbois solo d’Hélène Mourot soit si pincé et distille ainsi un son très fermé (ce sera le cas malheureusement une bonne partie du concert) ou que la trompette de Fabien Norbert ne ressemble parfois davantage à un bugle de fanfare de province : mais peut‑être était‑ce l’effet recherché ? Là pour le coup, en revanche, Marion Ralincourt fut parfaite : flûte sensuelle, presque dégingandée, à la limite du vénéneux... On en redemande avant cette « Fête foraine » tourbillonnante qui conclut l’œuvre sous la direction précise de François‑Xavier Roth : voilà sans doute une belle idée de disque à venir !


Beaucoup plus connue évidemment, la Seconde Suite tirée du ballet Bacchus et Ariane (1930) de Roussel, cheval de bataille des orchestres souhaitant briller dans la musique française : après l’entrée tout en finesse des divers solistes (basson, hautbois, alto, violon entre autres) dans l’Andante introductif, François‑Xavier Roth déroula une fresque haute en couleurs qui culmina dans le Moderato pesante, où le martellement des percussions fut enivrant, jusqu’à l’explosion finale de l’Allegro brillante.


La seconde partie du concert débutait par une nouvelle rareté, les Scènes alsaciennes de Massenet, suite orchestrale en quatre mouvements. La clarinette solo de Christian Laborie brille dans le premier mouvement aux sonorités provençales avant que le passage « Au cabaret », franchement festif et dansant, ne mette en valeur un pupitre de cors digne du Konzertstück de Schumann. Mais c’est sans aucun doute le mouvement lent, « Sous les tilleuls », qui fut le plus beau, offrant aux spectateurs un dialogue magnifique entre le violoncelle solo (tenu par Robin Michael, que l’on connaît bien pour être le violoncelle solo de l’Orchestre révolutionnaire et romantique de John Eliot Gardiner) et la clarinette solo.


Deux pièces célèbres pour conclure : L’Apprenti sorcier de Dukas et La Valse de Ravel. Si la première fut bien conduite en dépit de quelques effets peut‑être un rien excessifs, la seconde a singulièrement manqué de souplesse et de folie dans la dernière partie, Roth ayant semble‑t‑il préféré une certaine sagesse sur les emportements de l’œuvre, n’hésitant pas à un peu trop décortiquer la partition (les interventions des contrebasses, alignées « à la viennoise » en fond de scène) au détriment du climat général.


Après un bref discours de leur chef emblématique, Les Siècles offrirent en bis l’Adagietto tiré de L’Arlésienne de Bizet, beau pied de nez à qui attendait une pièce brillante et célèbre, François‑Xavier Roth ayant donc préféré une page plus douce, presqu’intime. Le dernier salut fut accompagné d’un « Joyeux anniversaire » de l’orchestre, accueillant également le gros gâteau (factice) placé devant l’estrade du chef d’orchestre avant que les musiciens ne s’embrassent les uns les autres avec ferveur au milieu des applaudissements du public : un bel anniversaire somme toute, en attendant les suivants !


Signalons enfin que le Théâtre des Champs‑Elysées accueillera de nouveau Les Siècles du 10 au 19 mars pour un programme alliant Le Rossignol de Stravinski et Les Mamelles de Tirésias de Poulenc, puis le 15 mai pour une prometteuse version du Vaisseau fantôme de Wagner.


Le site de l’orchestre Les Siècles



Sébastien Gauthier

 

 

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