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Passage de relais Normandie Deauville (Salle Elie de Brignac-Arqana) 08/02/2022 - Robert Schumann : Trois Romances pour piano et violon, opus 94 (*) – Sonate pour piano et violon n° 2, opus 121 (*)
Nikolaï Rimski‑Korsakov : Sextuor à cordes en la majeur Pierre Fouchenneret (*), Shuichi Okada, David Moreau (violon), Manuel Vioque‑Judde, Anna Sypniewski (alto), Bumjun Kim, Maxime Quennesson (violoncelle), Théo Fouchenneret (piano)
S. Okada, D. Moreau, M. Vioque‑Judde, A. Sypniewski, B. Kim, M. Quennesson (© Stéphane Guy)
En première partie de ce concert, étaient proposées par les « anciens » du festival que sont les frères Fouchenneret, Pierre au piano (né en 1994) et Théo au violon (né en 1985), des œuvres de Robert Schumann (1810‑1856), la prestation devant être éditée ultérieurement par B.Records comme l’avait été l’exécution publique des sonates de Johannes Brahms antérieurement dans le cadre d’une intégrale de sa musique de chambre.
Les frères Fouchenneret avaient donné un avant‑goût de la soirée en participant à une table ronde sur le thème Musique & Sport dans le cloître des Franciscaines le 30 juillet, lieu pourtant totalement inapproprié à la moindre prestation musicale, les morceaux interprétés au milieu des allées et venues et des cris d’enfants par eux comme par le Trio Arnold à la suite n’ayant rien eu à voir par ailleurs avec le sport, les échanges ayant tourné de leur côté autour une nouvelle fois sur l’origine du festival et des banalités sur l’entraînement physique impliqué par la pratique musicale et la préparation aux concours, et personne n’ayant jugé bon d’évoquer les partitions inspirées par le sport (Sports et divertissements de Satie, Jeux de Debussy, Rugby d’Honegger, Half‑Time de Martinů, Pour un entraînement de boxe de Tchérepnine, Match de Kagel...) ou accompagnant les Jeux olympiques par exemple (patinage artistique, gymnastique...), ce qui eût été tout de même plus intéressant ou plus amusant.
Au début des Trois Romances (1849) adaptées par leur auteur à partir d’une version pour hautbois, le violon n’ose guère s’affirmer mais déploie un jeu délicat avant que la passion n’effleure dans la Deuxième, la Troisième, presque dansante, n’étant qu’élégance. La Deuxième Sonate (1851) est encore plus réussie. Les interprètes en ont une vision assez unitaire, les mouvements n’étant pas trop marqués, les foucades schumaniennes étant quelque peu lissées. Ils abordent cependant les deux premiers avec une autorité presque brahmsienne. On admire le legato du violon et ça chante continûment. Dans le troisième mouvement, les deux frères, à l’entente parfaite, déploient un jeu tout de délicatesse révélant un Schumann plus intime, véritablement touchant. Et si le dernier mouvement est passionné voire bondissant, tout est réalisé sans lourdeur. C’est tout simplement magnifique.
La seconde partie du concert est uniquement consacrée à l’immense et méconnu Sextuor (1876) de Rimski‑Korsakov (1844‑1908). Le Trio Arnold est alors accompagné par de nouveaux venus au festival, David Moreau au violon, Anna Sypniewski à l’alto et Maxime Quennesson au violoncelle. L’œuvre, à l’écriture assez complexe, s’inspire autant de l’esthétique de Tchaïkovski, un brin sirupeuse, que du contrepoint de Bach. Ca gratte un peu, la coordination a quelques faiblesses, notamment au début, et les aigus du premier violon sont parfois bien stridents mais le passage de relais entre la génération constituée par le Trio Arnold – « ancienne » aux yeux du festival alors qu’il a été créé en 2018 – et la nouvelle, évident dans le rondo fugué du deuxième mouvement, fonctionne et est des plus sympathiques, à l’image du festival. Le troisième mouvement ne manque pas de nervosité et on ne peut que repérer la distinction et la beauté du violoncelle de Maxime Quennesson dans le quatrième, teinté de nostalgie, le final aux multiples relances emportant le public assez aisément.
Stéphane Guy
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