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Amelia ne va pas au bal

Verbier
Salle des Combins
07/25/2022 -  
Giuseppe Verdi : Un ballo in maschera
Freddie De Tommaso (Riccardo), Angela Meade (Amelia), Ludovic Tézier (Renato), Daniela Barcellona (Ulrica), Ying Fang (Oscar), Milan Siljanov (Silvano), Dennis Chmelensky (Tom), Daniel Barrett (Sam), Michal Prószynski (Un serviteur d’Amelia, Un juge)
Oberwalliser Vokalensemble, Verbier Festival Orchestra, Gianandrea Noseda (direction)
David Sakvarelidze (mise en espace), Aline Foriel‑Destezet (conception vidéo)


(© Evgeny Evtyukhov)


Certains soirs, il peut arriver que le spectacle ne se déroule pas exactement comme prévu. La preuve avec la représentation concertante du Bal masqué de Verdi au Festival de Verbier. Juste avant le début du concert, la soprano Angela Meade, interprète d’Amelia, est annoncée souffrante, victime d’une pharyngite. Sa brève intervention au deuxième tableau du premier acte, aux côtés de la voyante Ulrica, le laisse clairement entrevoir, la chanteuse doit déployer de gros efforts pour décrocher les notes les plus aiguës de sa partition. A la fin de l’acte, on annonce une interruption inopinée de la représentation, en raison d’une évacuation sanitaire ; quelques instants plus tard, un hélicoptère atterrit bruyamment juste à côté de la tente sous laquelle a lieu l’opéra. Le public se perd en conjectures : l’état de la soprano aurait‑il empiré au point de nécessiter une hospitalisation ? Un spectateur aurait‑il fait un malaise ? Rien de tout cela, l’intervention de l’hélicoptère n’est pas liée au concert. L’engin repart dans un bruit tout aussi assourdissant qu’à son arrivée et la représentation peut reprendre. Mais avec une mauvaise nouvelle : Angela Meade ne chantera pas ses deux grands airs respectivement du deuxième acte (« Ecco l’orrido campo ») et du troisième acte (« Morrò, ma prima in grazia »). Après la déception et la frustration initiales, on en vient finalement à remercier la soprano d’être arrivée au bout de la soirée et d’avoir ainsi sauvé la représentation, tant sa souffrance se lisait sur son visage.


Pour cette version concertante du Bal masqué, le cadre est vite planté : David Sakvarelidze se borne à coordonner les entrées et les sorties des chanteurs, dont certains ont leur partition sous le bras. Sur plusieurs écrans disposés tout autour du plateau, les vidéos suggestives choisies par Aline Foriel‑Destezet font apparaître de grandes pièces d’une demeure patricienne prise dans la morsure du froid et du brouillard. La soirée offre dans tous les cas le plaisir de découvrir le Renato royal de Ludovic Tézier : legato splendide, phrasé impeccable, projection insolente, le chanteur s’inscrit désormais dans la tradition des plus grands barytons verdiens. Son air « Eri tu che macchiavi quell’anima » lui vaut des applaudissements particulièrement nourris. L’Oscar de Ying Fang atteint presque les mêmes sommets : la tranquille assurance, les vocalises précises et crânement réalisées ainsi que les aigus stratosphériques éclatants de la jeune chanteuse chinoise laissent présager une belle carrière. Remplaçant au pied levé Ekaterina Semenchuk, Daniela Barcellona campe une Ulrica stylée et de belle tenue, malgré un vibrato gênant. Pour ses débuts en Riccardo, Freddie De Tommaso obtient un joli succès, avec son chant solaire et généreux, ses aigus percutants et ses rires sonores dans le tableau avec Ulrica ; gageons que pour ses prochaines apparitions dans le rôle du Comte, il aura affiné les nuances et les demi‑teintes. Galvanisant les jeunes musiciens du monde entier composant l’Orchestre du Festival de Verbier, le chef Gianandrea Noseda se dépense sans compter pour insuffler énergie et théâtralité à la représentation, au point de finir la soirée transpirant à grosses gouttes. Indubitablement, c’est lui qui porte le spectacle au plus haut niveau, avec Ludovic Tézier et Ying Fang.



Claudio Poloni

 

 

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