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Mécontentement et satisfaction

Bruxelles
Bozar, Salle Henry Le Bœuf
06/11/2022 -  
Thomas Adès : Polaris, opus 29
Wolfgang Amadeus Mozart : Concerto pour piano n° 23, K. 488
Béla Bartók : Concerto pour orchestre, Sz. 116

Víkingur Olafsson (piano)
Belgian National Orchestra, Hugh Wolff (direction)


V. H. Olafsson (© Ari Magg)


Le Belgian National Orchestra exprime son mécontentement. Avant que les musiciens n’entrent en scène, des représentants syndicaux s’adressent au public, à qui des tracts ont été distribués, pour dénoncer, sur un ton posé, et dans les deux principales langues nationales, les mauvaises conditions de travail, devenues intenables. La liste des griefs est longue, allant de manquements administratifs aux licenciements abusifs en passant par le harcèlement. Agacés par l’absence de réaction du ministre de tutelle, les syndicats appellent ni plus ni moins à la démission du président du conseil d’administration et de l’intendant, tout en rassurant les spectateurs sur la volonté de l’orchestre de continuer à donner le meilleur de lui‑même.


Le public, ce samedi, aura donc droit à son concert, comme prévu. Le programme débute par Polaris (2010) de Thomas Adès. Pour cette composition d’un peu moins d’un quart d’heure, le compositeur s’inspire d’objets célestes, comme Holst avec ses Planètes, en l’occurrence l’étoile Polaire, la plus brillante de la constellation de la Petite Ourse. Le programme de salle fournit quelques explications sur la construction particulière de cette pièce conçue pour donner l’impression de progresser autour de trois pôles. Sous la direction de Hugh Wolff, l’orchestre développe dans cette œuvre au langage accessible de belles sonorités scintillantes. L’exécution traduit avec clarté l’impression de légèreté aérienne de cette composition aux intéressants effets de spatialisation.


Le reste du programme évolue en terrain connu. Nouvelle star de l’écurie Deutsche Grammophon, Víkingur Olafsson se présente tel un pianiste enthousiaste, voire guilleret, certainement soucieux de son image. Son interprétation du Vingt‑troisième Concerto (1786) de Mozart évite heureusement la faute de goût. Elle paraît même assez convenue et sans grande audace, convaincante, toutefois, et particulièrement lumineuse et soignée, avec un mouvement lent à la profondeur schubertienne. Le pianiste islandais se montre généreux en bis – Trois Chants populaires du comitat de Csík de Bartók, « Le Rappel des oiseaux » de Rameau et Prélude en si mineur de Bach/Siloti – car, pour reprendre ses termes, il aime jouer dans cette salle. Le public lui accorde une ovation debout, une marque de reconnaissance qui nous semble tout de même un peu exagérée. Le chef, en tout cas, assure un accompagnement satisfaisant, mais il aurait fallu sans doute plus de répétitions pour améliorer la mise en place et le dialogue avec le soliste.


Si la pièce de Thomas Adès évolue autour de pôles, le Concerto pour orchestre (1943) de Bartók se présente sous la forme d’une arche. La seconde partie de ce concert permet de prendre toute la mesure du travail approfondi de Hugh Wolff, qui cèdera sa place de directeur musical à Antony Hermus à compter de la saison prochaine. Les concerts avec ce chef américain d’une grande droiture et à la gestuelle académique, mais ferme et précise, offrent quasiment à chaque fois un haut niveau de qualité. Les cinq mouvements se déploient avec cohérence et de clarté, mais dans des tempi plutôt mesurés : les passages rapides auraient pu afficher encore plus de tranchant et de vitalité. Mais cette conception claire et détaillée permet d’admirer la beauté de cette composition, même si elle ne compte pas parmi les plus novatrices et originales de cet immense compositeur. Cette musique met admirablement en valeur les différents pupitres, en particulier les bois et les cuivres qui se montrent impressionnants, tous les musiciens parvenant à en restituer la grandeur et la puissance.


Espérons vivement que l’orchestre retrouve rapidement des conditions de travail sereines afin de favoriser son rayonnement, au sein, mais aussi en dehors, des frontières du royaume, à l’instar de l’Orchestre philharmonique royal de Liège.



Sébastien Foucart

 

 

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