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Un Prologue de très bon augure

Zurich
Opernhaus
04/30/2022 -  et 3, 7, 10, 14, 18, 22*, 25, 28 mai 2022
Richard Wagner : Das Rheingold
Tomasz Konieczny (Wotan), Matthias Klink (Loge), Christopher Purves (Alberich), Wolfgang Ablinger-Sperrhacke (Mime), Patricia Bardon (Fricka), Anna Danik (Erda), David Soar (Fasolt), Oleg Davydov (Fafner), Jordan Shanahan (Donner), Omer Kobiljak (Froh), Kiandra Howarth (Freia), Uliana Alexyuk (Woglinde), Niamh O’Sullivan (Wellgunde), Siena Licht Miller (Flosshilde)
Philharmonia Zürich, Gianandrea Noseda (direction musicale)
Andreas Homoki (mise en scène), Christian Schmidt (décors, costumes), Florian Schaaf (collaboration artistique aux décors), Franck Evin (lumières), Beate Breidenbach, Werner Hintze (dramaturgie)


(© Monika Rittershaus)


Après avoir quitté précipitamment le Teatro Regio de Turin en 2018, en raison de désaccords budgétaires, Gianandrea Noseda aurait accepté le poste de directeur musical de l’Opernhaus de Zurich essentiellement parce qu’on lui offrait la possibilité de diriger la Tétralogie wagnérienne. On appréciait jusqu’ici le chef italien pour ses affinités avec les répertoires transalpin et russe ; il faudra désormais ajouter la musique allemande car son coup d’essai avec L’Or du Rhin à Zurich, Prologue du Ring, est un coup de maître. Chef de théâtre par excellence, Gianandrea Noseda attaque la partition de Wagner dans un grand souffle, sans jamais relâcher la tension dramatique. Dans un auditorium intimiste comme celui de l’Opernhaus, où tant de chefs font se déchaîner l’orchestre au point d’atteindre les limites acoustiques de la salle, le maestro italien sait parfaitement canaliser les musiciens, même dans les passages fortissimo. Il offre une lecture raffinée mais aussi claire et transparente, permettant d’entendre chaque détail de l’orchestration, avec de subtils équilibres entre les pupitres. Aussi paradoxal que cela puisse paraître pour Wagner, son Or du Rhin se veut presque un opéra de chambre, une conversation en musique.


La conception du chef épouse en tout cas parfaitement les intentions de la mise en scène. Andreas Homoki précise dans le programme de salle qu’il entend « revenir aux origines » et présenter L’Or du Rhin de manière simple et illustrative, sans a priori, sans chercher midi à quatorze heures, afin de permettre aux spectateurs de se faire leur propre idée de l’œuvre et de ses enjeux. L’intendant de l’Opernhaus en profite aussi pour rappeler les liens de Wagner avec la Suisse, précisant qu’une bonne partie du Ring a été composée durant l’exil du compositeur à Zurich et dans la région. L’action se déroule sur un plateau tournant durant toute la représentation et constitué de pièces aux hautes parois blanches et sobrement meublées d’un grand appartement. Les Filles du Rhin sont sur les lits d’une chambre à coucher, alors que l’armée du Nibelung entasse ses barres d’or devant la fenêtre d’une autre pièce. Les chanteurs, d’un très bon niveau au demeurant, se caractérisent par des voix relativement petites en termes de puissance, ce qui renforce l’idée de la conversation en musique. Et le fait de faire de Loge une sorte de M. Loyal donne à la production des airs de comédie.


Dès les premières interventions des trois Filles du Rhin (Uliana Alexyuk en Woglinde, Niamh O’Sullivan en Wellgunde et Siena Licht Miller en Flosshilde), précises et homogènes, on se dit qu’on ne sera pas déçu par la distribution vocale. Le Wotan de Tomasz Konieczny, sombre et obsédé par l’anneau qu’il a passé à son doigt, se veut davantage humain que dieu, et d’ailleurs sa voix éblouit plus par la qualité de son phrasé que par sa puissance. Matthias Klink incarne un Loge à la forte présence scénique, bondissant et désinvolte, sarcastique et facétieux, avec sa redingote orange et son haut de forme noir. Christopher Purves est un Alberich particulièrement expressif, donnant du relief à chacune de ses interventions. Le Mime de Wolfgang Ablinger-Sperrhacke est lui aussi très investi dans son personnage. On admire également la Fricka énergique de Patricia Bardon et la Freia aux accents désespérés de Kiandra Howarth. Les deux Géants (David Soar en Fasolt et Oleg Davydov en Fafner) ainsi que les divinités secondaires (Jordan Shanahan en Donner et Omer Kobiljak en Froh) complètent idéalement une distribution d’une rare cohésion. En fin de représentation, l’apparition d’Anna Danik en Erda est un enchantement, avec sa voix ample et veloutée et ses accents poignants. Ce Prologue est de très bon augure pour la suite du nouveau Ring zurichois.



Claudio Poloni

 

 

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