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Deux orchestres pour un concert Evian Grange au Lac 05/13/2022 - Hector Berlioz : Ouverture « Le Corsaire », opus 21
Franz Liszt : Concerto pour piano n° 2 en la majeur (*)
Claude Debussy : Printemps (*)
Igor Stravinsky : L’Oiseau de feu (Suite n° 2) Alexandre Kantorow (piano)
Orchestre de chambre de Genève, Orchestre des Pays de Savoie, Arie Van Beek, Pieter‑Jelle de Boer (*) (direction)
(© Matthieu Joffres)
Mi‑mai, le piano prend traditionnellement ses quartiers à Evian, à l’enseigne du « Printemps de la Grange ». Ce mini‑festival se déroule dans le cadre enchanteur de la Grange au Lac, la splendide salle de concert de la cité thermale, toute en bois et située dans un parc aux arbres centenaires. Cette année, la manifestation a débuté par un concert insolite et mémorable. Insolite parce qu’il a réuni deux orchestres sur la même scène, et mémorable parce qu’il restera longtemps gravé dans les mémoires des spectateurs présents. L’Orchestre de chambre de Genève et l’Orchestre des Pays de Savoie ont donc uni leurs pupitres pour cette soirée d’ouverture. Ce qui a frappé dès les premiers accords, c’était la cohésion et la précision de l’ensemble, comme si les deux formations avaient l’habitude d'unir leurs forces. Elles le faisaient régulièrement il y a encore quelques années, avant que cette tradition ne se perde. Puis, à la faveur d’un renouvellement artistique et administratif à la tête de chacun des orchestres respectifs, la volonté de collaborer s’est manifestée à nouveau. Le fait que les chefs et par ailleurs directeurs musicaux, tous deux Hollandais, se connaissent et s’apprécient, n’est sûrement pas étranger à cette décision. A tour de rôle, ils ont dirigé chacun deux pièces du programme.
Le concert a débuté par le rare Corsaire de Berlioz, sous la direction d’Arie Van Beek. Après quelques réglages initiaux, les tutti de l’Allegro assai, soutenus par des cuivres vigoureux, ont ébloui par leur homogénéité. Pieter‑Jelle de Boer a ensuite attaqué le Second Concerto de Liszt, avec Alexandre Kantorow au piano. On ne présente plus le musicien français de 25 ans, Premier prix et Médaille d’or du Concours Tchaïkovski de Moscou en 2019. Surdoué du clavier, on ne sait qu’admirer le plus dans son interprétation : la fougue et la virtuosité époustouflantes de l’Allegro animato bien sûr et ses incroyables glissandi ou le lyrisme et la profondeur de l’Adagio sostenuto assai ? Quoi qu’il en soit, des applaudissements frénétiques ont accueilli la splendide prestation du soliste, qui, visiblement marqué par l’effort consenti, a préféré ne pas accorder de bis, malgré l’insistance du public.
Pieter‑Jelle de Boer a entamé la seconde partie du programme avec la Suite symphonique Printemps, une page de jeunesse de Debussy composée à Rome en 1887. Si le chef a coloré la première partie d’une belle palette de nuances et de demi‑teintes, il s’est révélé un peu trop martial et carré pour la seconde, au point aussi d’atteindre les limites acoustiques de la salle. Arie Van Beek a terminé le programme avec la Seconde Suite de L’Oiseau de feu de Stravinski, où la virtuosité et la rutilance l’ont disputé aux subtilités des couleurs et aux frémissements des cordes. Un magnifique concert comme en a l’habitude de réserver Evian. Et on ose espérer que l’Orchestre de chambre de Genève et l’Orchestre des Pays de Savoie poursuivront la tradition de programmes en commun.
Claudio Poloni
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