About us / Contact

The Classical Music Network

Paris

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

Hommage à Liebermann

Paris
Opéra Bastille
02/12/2002 -  et 15, 18, 21, 26 février, 1er mars 2002
Rolf Liebermann : Medea
Jeanne-Michèle Charbonnet (Medea), Petri Lindroos (Jason), Lawrence Zazzo (Kreon), Marisol Montalvo (Aiglaia), Michèle Cannoccioni (Silene), Valérie Condoluci (Kore), Elizabeth Laurence (Oinone), Louise Callinan (Chalkiope), Blaise Argelier (Apsyrtos)
Orchestre de l'Opéra de Paris, Daniel Klajner (direction)
Jorge Lavelli (mise en scène)


Rolf Liebermann (1910-1999) est bien connu des français pour avoir brillamment dirigé l’Opéra de Paris entre 1973 et 1980 et avoir relancé l’intérêt pour l’art lyrique, sans lequel Bastille n’aurait certainement pas été construit. On sait moins qu’en dehors des périodes où il dirigeait des opéras (Hambourg et Paris), il en écrivait : Leonore 40/45 (1952), Pénélope (1954), L’Ecole des femmes (1955), La Forêt (1987) et Medea (1995 et 1998 pour la version définitive en trois actes). La création française de son dernier opéra vient à point nommé pour découvrir une autre facette de ce personnage fascinant.


Tiré de d'un roman de la Tchèque Ursula Haas (Non lieu pour Médée, 1987), le mythe de Médée subit de notables modifications puisque la reine de Colchide n'a pas d'enfant mais, enceinte, refuse d'enfanter, et que Jason la quitte non pour une femme plus jeune mais pour un homme. Avortement et homosexualité cherchent ici à donner une résonance contemporaine au mythe, mais le texte reste, sur le fond, conforme aux origines de la légende en ce qu'il oppose la société matriarcale de Médée à celle, patriarcale, de Jason. Ce serait plutôt les dérèglements résultant de cette confrontation qui sont actualisés, comme pour rappeler que les dangers du féminisme borné ne sont pas moins graves que ceux du machisme primaire et que ces deux égarements ne peuvent qu'éloigner l'homme et la femme.


Dans le programme, Dominique Fernandez annonce comme une victoire «le premier opéra explicitement homosexuel» (on est content d'apprendre que les autres sont «hétérosexuels»), croyant ainsi marquer un point pour sa chapelle en se limitant à un seul aspect de l’œuvre. Il n’hésite pas à user du révisionnisme le plus grossier en ne trouvant «rien de plus vrai» que les âneries d’un Michel Tournier qui juge que dans l’opéra «les hommes sont d’une virilité qui avoisine la bestialité, les femmes d’une féminité exacerbée dont l’hystérie paraît être le climat habituel». On attend avec impatience le premier opéra incluant un PACS pour que M. Fernandez crie de nouveau victoire.


On reste un peu sur sa faim concernant la musique de Liebermann qui suit un procédé trahissant une difficulté à penser le phénomène musical dans sa globalité et sa continuité : la voix adopte un ton déclamatoire et l'orchestre s'exprime par éruptions. Conséquences : une faible cohérence entre ces deux lignes et une suite d'à-coups puisque le chanteur déclame un thème, le reprend un demi ton au dessus (la tension monte...), le reprend éventuellement encore une fois, et s'arrête puisque la résolution (ô combien simple) est intervenue ; un silence suit, et c'est reparti. Philippe Fénelon avait usé jusqu'à l'écœurement de ce procédé dans son Salammbô. Infiniment plus subtil et musicalement cultivé, Liebermann évite cette systématisation, ménage des pages orchestrales oscillant entre Berg et Debussy (transition entre les actes I et II), esquisse des passages dans lesquels la voix et l'orchestre sont pris dans un même mouvement de conception (duo d'amour entre Jason et Kreon), mais on n'échappe pas à cette pesante impression au long de l'heure et quart que dure l'opéra.


La réalisation de cette nouvelle production n’appelle que des éloges avec une mise en scène sobre et efficace de Jorge Lavelli, un orchestre en grande forme (Daniel Klajner remplace James Conlon souffrant) et de nouveaux noms sur scène comme la basse finlandaise Petri Lindroos (Jason) et, surtout, la soprano Jeanne-Michèle Charbonnet, native de La Nouvelle-Orleans, au beau timbre et aux moyens impressionnants (elle chantera prochainement Elektra et Lady Macbeth à Florence et Isolde à Genève). Ils concourent tous à faire passer le drame de Médée.



Présentation à l'amphithéâtre avant chaque représentation à 19h de Laetitia Le Guay

Retransmission sur France Musiques le 9 mars à 19h30





Philippe Herlin

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com