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Janácek ou la vie

München
Nationaltheater
01/30/2022 -  et 2, 6, 15 février, 11, 16 juillet 2022
Leos Janácek : Príhody lisky Bystrousky
Elena Tsallagova (La renarde), Wolfgang Koch (Le garde-chasse), Angela Brower (Le renard), Lindsay Hamman (L’épouse du garde-chasse, Le hibou), Jonas Hacker (Le maître d’école, Le moustique), Martin Snell (Le pasteur, Le blaireau), Milan Sijanov (Harashta), Caspar Singh (Pasek), Mirjam Messak (Mme Pasek, Le geai), Yajie Zhang (Le chien, Le pivert), Andres Agudelo (Le coq), Eilza Boom (La poule), Solistes du chœur d’enfants (La jeune renarde, Frantík, Pepík, Le grillon, Le criquet, La grenouille)
Chor der Bayerischen Staatsoper, Stellario Fagone (chef de chœur), Bayerisches Staatsorchester, Mirga Grazinytė-Tyla (direction musicale)
Barrie Kosky (mise en scène), Michael Levine (décors), Victoria Behr (costumes), Frank Evin (lumières)


E. Tsallagova, A. Brower (© Wilfried Hösl)


Depuis combien de temps le Bayerische Staatsoper n’a pas connu de première où le public applaudit à l’unisson sans huée discordante ? C’est ce à quoi l’équipe qui nous a donné la première de cette nouvelle production de la Petite Renarde rusée a eu droit hier soir.


Les premières images de cette production sont d’un enterrement. Décor noir, silhouettes obscures, lourdeur des mouvements, puis lentement, les personnages se retirent un par un, le rideau argenté qui représente le décor de la forêt s’installe, le garde-chasse se retourne et cette musique d’une rare force démarre. De cette tombe où l’on a versé de la terre sortent les animaux. Comment ne pas repenser à ce phrase de la Genèse : « L’Eternel-Dieu façonna l’homme - poussière détachée du sol -, fit pénétrer dans ses narines un souffle de vie, et l’homme devint un être vivant » ?


Il n’y a pas dans cette mise en scène de conception panthéiste, pas de nature verdoyante. Les chanteurs qui jouent les différents animaux ne sont pas déguisés mais sont en costumes de couleurs, contrastant avec les tenues noires des humains. Seul le passage de la basse-cour donne lieu à une certaine fantaisie un peu ludique (voire un peu grand-guignolesque) qui donne suite à un passage hilarant d’un figurant déguisé en œuf un peu perdu, cousin déjanté des danseurs déguisés en Nez faisant un numéro de claquettes dans l’opéra de Chostakovitch.


Certains passages souffrent un peu de cette conception. Les personnages animaliers, comme le blaireau que chasse la Renarde, manquent un peu de caractérisation tandis que le trio entre le garde-chasse, le maître d’école et le pasteur manque de projection, les personnages émergeant à moitié de la scène et étant un peu écrasés par le décor. Mais ce sont des petits détails, la scène d’amour entre Renard et Renarde est touchante, la mort de la Renarde est avec une grande justesse à l’unisson de la musique sans sentimentalité et l’apothéose de la scène finale pleine de grandeur. Janácek écrit ici des pages d’une rare beauté.


Le niveau musical est particulièrement élevé. Comme souvent à Munich, les petits rôles sont merveilleusement distribués. Elena Tsallagova, familière du rôle, est particulièrement éloquente et trouve dramatisme et force. Comme à Paris, son duo avec le Renard d’Angela Brower est un sommet. En grande forme, Wolfgang Koch trouve ici un rôle très à sa mesure, sachant alterner autorité, douceur et poésie. Voici un garde-chasse qui a probablement dans son passé confectionné quelques paires de chaussures et sait distiller une certaine sagesse.


Tout opéra de Janácek passe par la richesse de l’orchestration. Dès les premières notes, l’orchestre du Bayerische Staatsoper impressionne par la richesse de sa sonorité et de ses couleurs. Mirga Grazinytė-Tyla donne ici une lecture magistrale avec beaucoup d’autorité. On devine la qualité du travail qui a dû être forgé durant les répétition. L’accord entre la fosse et la scène est remarquable. Il y a une petite nervosité bien compréhensible au début, le cheffe lituanienne faisant ses débuts munichois mais à partir du duo Renard-Renarde, il y a à la fois qualité instrumentale, concentration et expression.


Il sera possible de voir cet opéra jusqu’à mi-février puis à nouveau en juillet lors du festival. Les frontières se rouvrent et on entendait hier ici et là des accents divers. Munich nous a donné hier une superbe soirée qui nous confirme à nouveau à quel point le niveau de cette maison d’opéra est élevé.



Antoine Lévy-Leboyer

 

 

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