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Grincements rédhibitoires Paris Salle Cortot 11/24/2021 - Claude Debussy : Images (Première et Seconde Séries)
Gabriel Fauré : Nocturne n° 6, opus 63
Maurice Ravel : Gaspard de la nuit
Emmanuel Chabrier : Cinq Morceaux posthumes : « Ronde champêtre »
Gustave Samazeuilh : Le Chant de la mer Severin von Eckardstein (piano)
S. von Eckardstein (© Yoshie Kuwayama)
A peine avions nous loué les mérites du pianiste allemand Severin von Eckardstein à l’occasion de la parution de son enregistrement des Danses des compagnons de David de Schumann que nous avons pu l’entendre dans un impressionnant un récital de musique française Salle Cortot.
Un public nombreux s’était rassemblé, remplissant quasiment la salle pour entendre Severin von Eckardstein, encore rare à Paris, invité par Les Nuits du Piano pour un récital entièrement consacré à la musique française et qui devrait être, comme cela semble être devenu courant dans sa déjà importante discographie, l’objet d’un enregistrement live. Cette série de récitals de piano, créée en 2021 et produite par Patrice Moracchini en collaboration avec l’Ecole normale de musique de Paris Alfred Cortot, présente au public parisien principalement des artistes étrangers peu présents dans les circuits habituels. Cette saison permettra d’entendre également Viktoria Postnikova (2 février) et Anna Tsybuleva (13 avril), certains concerts faisant l’objet d’enregistrements publiés au disque.
Bijou de l’architecte Auguste Perret, construite en 1928-1929, la Salle Cortot, attenante à l’Ecole normale de musique avec son esthétique Art déco, ses 400 places et sa scène généreuse, est réputée pour son acoustique. Hélas ! les structures ont bien vieilli et ce soir-là, la nuisance habituelle qui gêne le plus la concentration des auditeurs et des interprètes, à savoir les toux incontrôlées qui semblent actuellement étouffées par les masques, était remplacée par les grincements de fauteuils au moindre mouvement des spectateurs. On ne peut juger si le pianiste en était lui-même gêné, peut-être l’était-il plus par la sonorité très métallique du piano, mais dans la salle, cela nous a semblé rédhibitoire au bon déroulement du concert.
Severin von Eckardstein avait composé un magnifique programme avec les deux séries d’Images de Debussy auxquelles il a donné une élégance et une sonorité par instant magique (particulièrement dans « Mouvement » et « Reflet dans l’eau »), ainsi qu’un Sixième Nocturne de Fauré sombre et dramatique. Le meilleur du concert a été Gaspard de la nuit de Ravel, d’une grande intensité dramatique avec des prises de risque ahurissantes dans les tempi de « Scarbo ».
La fin du récital était moins exaltante. Si ce pianiste allemand semble très à l’aise dans la musique française, on peut déplorer une certaine uniformité dans le style. Mais pour interpréter la « Ronde champêtre » d’Emmanuel Chabrier, la finesse et l’humour n’étaient pas au rendez-vous. Il a terminé son programme avec la longue et profuse suite Le Chant de la mer de Gustave Samazeuilh (1877-1967), ode à la côte basque composée juste après la Première Guerre mondiale. Même si cette musique est très construite avec des thèmes d’inspiration marine développés avec science, elle donne souvent l’impression d’une longue improvisation dont on peine un peu à saisir la forme.
Pour conclure, Severin von Eckardstein a tempéré cette impression avec un des mouvements de la très romantique suite La Maison dans les dunes de Gabriel Dupont, dont il s’est fait une spécialité et qu’il a enregistrée pour Artalinna.
Le site de Severin von Eckardstein
Le site des Nuits du Piano
Olivier Brunel
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