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Qu’allait faire Luc Bondy dans cette galère ?

München
Nationaltheater
10/29/2021 -  et 1er novembre 2021, 20, 24, 27 février, 4 mars 2022
Giacomo Puccini: Tosca
Anja Harteros (Floria Tosca), Najmiddin Mavlyanov*/Piotr Beczala (Mario Cavaradossi), Luca Salsi*/Ambrogrio Maestri (Scarpia), Milan Siljanov*/Bálint Szabó (Cesare Angelotti), Martin Snell (Le Sacristain), Kevin Conners (Spoletta), Christian Rieger (Sciarrone), Andrew Gilstrap (Un geôlier), Soliste du chœur d’enfants de Tölz (Voix d’un berger)
Chor der Bayerischen Staatsoper, Kinderchor der Bayerischen Staatsoper, Stellario Fagone (chef de chœur), Bayerisches Staatsorchester, Daniel Oren*/Carlo Rizzi (direction musicale)
Luc Bondy (mise en scène), Richard Peduzzi (décors), Milena Canonero (costumes), Michael Bauer (lumières)


A. Harteros, N. Mavlyanov (© Wilfried Hösl)


En 2009, Peter Gelb avait demandé à Luc Bondy de réaliser une nouvelle mise en scène de Tosca au Metropolitan Opera de New York pour remplacer celle de Franco Zeffirelli, tant appréciée d’une bonne partie du public du Metropolitan Opera de New York. Le tollé qu’elle a suscité (voir ici) a contraint Peter Gelb à appeler David McVicar pour la remplacer au plus vite (voir ici). Il s’agit d’une coproduction entre New York, Milan et Munich, où elle fait partie du répertoire, et cette soirée permet de se faire soi-même son avis.


Il est difficile de voir ce qui a justifié un nombre important de critiques américains de l'avoir trouvé vulgaire. Est-ce parce qu’il y a quelques prostituées dans le bureau de Scarpia au deuxième acte, que Tosca ne dépose pas de crucifix sur le cadavre de Scarpia, qu’il n’y a pas ce «réalisme» très outrancier qui a toujours caractérisé les productions exagérées de Zeffirelli? La raison est probablement plutôt plus prosaïque: Luc Bondy était un fabuleux metteur en scène, qui a magnifié des œuvres complexes, portant à leurs meilleurs des remarquables acteurs comme Dussollier ou Piccoli dans des pièces exigeantes de Schnitzler, Ibsen, etc., tandis que la pièce de Sardou dont est tiré l’opéra de Puccini est un gros mélo magnifié bien évidemment par une musique géniale, merveilleusement écrite pour les chanteurs, terriblement efficace et plus audacieuse qu’une écoute rapide pourrait laisser l’entendre.


L’histoire et le texte offrent finalement peu de prises à un Bondy (ou à la personne qui a dû assurer la reprise) pour qu’il puisse éclairer les personnages comme il savait le faire. Le seul moment où l’on retrouve un peu l’art de Bondy est la fin du deuxième acte, où Tosca découvre un couteau et, après une certaine hésitation, prend un verre de vin pour se donner le courage de poignarder Scarpia. Mais cela ne dure que moins d’une minute pour un opéra de deux heures. L’œuvre de Puccini offre peu de prises de cette nature. C’est simplement une œuvre que Luc Bondy n’aurait pas dû monter.


Comme c’est souvent le cas pour une reprise, il se dégage une impression que tous les passages de l’œuvre n’ont pas été l’objet des mêmes répétitions. Les deux premiers actes, à l’exception du Te Deum et de «Vissi d’arte» sont un peu imprécis. Le chef ne suit pas très bien les phrasés des chanteurs et ceux-ci ne sont pas bien équilibrés. Les petits rôles du premier acte, Angelotti et le Sacristain, sont ainsi couverts par l’orchestre. Mais le niveau au troisième acte change du tout au tout. Le ténor trouve plus de couleur et d’expression. Les duos soprano-ténor sont bien plus harmonieux et expressifs et on regrette un peu de ne pas avoir eu ce même niveau d’un bout à l’autre.


La distribution réunie n’est pas sans qualités. Luca Salsi a la prestance du rôle, même si on peut se permettre de le trouver plus menaçant que vraiment méchant. Le jeune Najmiddin Mavlyanov peut être fier de sa première prestation munichoise. Il a une tessiture assez homogène avec des aigus solides. Lorsqu’il est bien supporté par l’orchestre, il sait trouver de beaux phrasés. Il faut qu’il préserve ses moyens et continue à bien choisir les rôles qu’il assumera. Anja Harteros est bien évidemment la grande artiste que l’on connait. Le deuxième acte a beaucoup de tension et culmine avec un superbe «Vissi d’arte». Mais on peut se demander si la diva jalouse que demande la rôle au premier acte correspond à sa personnalité.


Toute maison d’opéra qui fonctionne selon le principe de répertoire et non de stagione doit avoir des productions qu’elle peut rapidement monter comme celle-ci. Il ne faut pas les rejeter. C’est aussi l’occasion de permettre à de jeunes artistes de se produire et de satisfaire les amateurs de beau chant. Mais que ceux qui se déplaçaient pour la première fois à l’opéra et qui ont pu apprécier une distribution de qualité reviennent également pour des nouvelles productions plus exigeantes et plus complètes.



Antoine Lévy-Leboyer

 

 

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