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Pourquoi ne joue-t-on pas plus Martinů ? München Herkulessaal 10/07/2021 - et 8 octobre (München), 7 novembre (Weiden) 2021 Béla Bartók : Rhapsodie pour violon et orchestre n° 2, Sz. 90
Bohuslav Martinů : Suite concertante pour violon et orchestre, H. 276
Gustav Mahler : Symphonie n° 4 Anna Lucia Richter (soprano), Frank Peter Zimmermann (violon)
Symphonieorchester des Bayerischen Rundfunks, Klaus Mäkelä (direction) F. P. Zimmermann, K. Mäkelä (© Astrid Ackermann)
Les musiciens de l’Orchestre symphonique de la Radio bavaroise ont déjà eu l’occasion de jouer sous la baguette du jeune Klaus Mäkelä la saison passée pour une de ces nombreuses soirées où les ensembles se sont produits en effectif réduit pour un public d’internautes. Pour nombreux mélomanes, cette soirée est donc l’occasion de découvrir de visu ce jeune talent de 25 ans qui prend la succession de Paavo Järvi à la tête de l’Oorchestre de Paris et qui est également directeur musical de l’Orchestre philharmonique d’Oslo dont un de ses prédécesseurs était Mariss Jansons.
Silhouette mince, débordant d’énergie, la présence physique de ce jeune chef est fascinante et rappelle ce que faisait un Leonard Bernstein. Il sait communiquer avec les musiciens et a cette capacité des grands chefs d’avoir une indépendance des mains, distribuant à droite et gauche battues, entrées et arrêts.
Ce programme d’œuvres d’Europe centrale commençait par deux raretés pour violon et orchestre. La Seconde Rhapsodie de Bartók est très directement inspirée des mélodies populaires que le compositeur hongrois a tant célébrées. C’est cependant une œuvre dont l’orchestration est un peu lourde. Frank Peter Zimmermann est un peu trop couvert par l’orchestre tandis que les bois semblent être un peu trop en retrait. Ces petits défauts ne sont cependant pas présents dans la Suite concertante de Martinů, qui est une découverte. Cette suite est plutôt un «troisième» concerto pour violon en quatre mouvements. La Toccata initiale est ébouriffante. Le cantabile de l’Aria qui suit a beaucoup de charme et on se surprend à apprécier la subtilité de l’orchestration qui fait la part belle aux bois et aux cordes médianes. Le Rondo est plein de lyrisme et de poésie. Frank Peter Zimmermann, qui a souvent défendu le Second Concerto de ce même compositeur, a un vibrato généreux et donne beaucoup de relief et de profondeur à cette œuvre. Très applaudi, le violoniste donne en bis l’Adagio de la Première Sonate de Bach.
En seconde partie, le premier mouvement de la Quatrième Symphonie de Mahler surprend par les options du chef, qui cherche à donner des coups d’accélération çà et là. Ce mouvement, qui est somme toute de forme assez classique, est trop flamboyant, trop «straussien», et manque de continuité et d’architecture. Le deuxième mouvement est plus stable et permet d’apprécier le premier violon Radoslaw Szulc, tandis que le pupitre des violoncelles impressionne par la qualité de la mise en place des délicats glissandos des dernières mesures. La régularité du tempo qui s’établit dans le mouvement lent permet de trouver le cantabile que demande l’œuvre. Stefan Schilli fait chanter son hautbois en trouvant des superbes phrasés. Dans le dernier mouvement, Anna Lucia Richter est très convaincante, chantant tout autant que jouant le texte dont chaque mot est parfaitement compréhensible.
La saison de l’orchestre est très alléchante, mélangeant œuvres du répertoire et celles à découvrir. Citons entre autres Isabelle Faust et Jakub Hrůsa, qui joueront Britten et Chostakovitch, Herbert Blomstedt, qui mélangera Stenhammar et Beethoven, Robin Ticciati, pour une création de Julian Anderson et du Rachmaninov, Daniel Harding dans Adès et R. Strauss, et Michael Tilson Thomas dans Beethoven et Copland. La musique de notre temps sera célébrée pour les spectacles du cycle de musica viva, dont plusieurs soirées consacrées à Wolfgang Rihm. Plusieurs chefs issus du style baroque seront invités pour explorer leur répertoire. Iván Fischer viendra pour plusieurs soirées diriger Wolf, Mahler et Beethoven mais surtout donnera le Concerto pour orchestre de Bartók dans une formation où les musiciens de l’orchestre seront rejoints par ceux, plus jeunes, du Bayerisches Landesjugendorchester. Enfin, Sir Simon Rattle, futur directeur musical de l’orchestre, sera présent pour la Neuvième Symphonie de Mahler et la Passion selon saint Matthieu de Bach.
Antoine Lévy-Leboyer
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