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Deux Français ouvrent le cycle d’abonnement du Philharmonique Vienna Musikverein 09/24/2021 - et 25, 26*, 28 (Wien), 30 septembre (Bratislava), 2 octobre (Hamburg) 2021 Antonín Dvorák: Concerto pour violoncelle n° 2, opus 104, B. 191
César Franck: Symphonie en ré mineur Gautier Capuçon (violoncelle)
Wiener Philharmoniker, Alain Altinoglu (direction)
A. Altinoglu (© Marco Borggreve)
Quelques détails trahissent, pour le public qui se rend au Musikverein, les longs mois marqués par la pandémie: des files d’attente qui s’allongent à l’extérieur du bâtiment, provoquées autant par les contrôles attentifs des pass sanitaires (instaurés voilà fort longtemps en Autriche) que par la présentation de tickets désormais électroniques; l’absence de public à l’arrière de la salle (les fameuses Stehplätze) ainsi que sur la scène, derrière l’orchestre; enfin, un ruban symbolique matérialisant dans les couloirs la démarcation entre musiciens et spectateurs, obligeant les abonnés de longue date à sortir sur le parvis pour socialiser avec les instrumentistes durant la pause. Mais ce n’est pas une pandémie mondiale qui bouleversera le Musikverein.
Premier pilier programmatique de la matinée: le Concerto pour violoncelle de Dvorák, dont Gautier Capuçon connaît bien entendu les moindres recoins. Il s’y promène en maître des lieux, une projection sans faille, assurant face à l’effectif de l’orchestre une balance digne d’un bon enregistrement de studio. Le vibrato large et majestueux donne d’emblée le ton à l’interprétation qui se veut flamboyante, grandiose, rapsodique. Le meilleur se trouve cependant dans les passages chambristes de l’œuvre: un dialogue en osmose avec la flûte dans le premier mouvement, un mouvement lent de particulièrement grande classe qui unit les pupitres de cordes et le soliste, et une merveilleuse entente avec le violon solo Rainer Honeck dans le final. En dehors de ces moments idylliques, des flottements de tempo (souvent provoqués par les envolées du solistes) nuisent au confort de l’écoute; de plus, les dynamiques de l’orchestre donnent l’impression de ne pas être poussées à fond, et il faut attendre les dernières mesures de l’Adagio pour réellement passer sous la barre du pianissimo.
Derrière un concerto un peu trop photogénique, qui repose plus sur le talent que sur un travail de détail, la Symphonie de Franck brille d’un éclat tout autre. La battue d’Alain Altinoglu privilégie souvent la vivacité, la transparence, imprimant aux développements frénétiques des couleurs solaires quasi mendelssohniennes et une dimension plus humaine, moins rigide que d’ordinaire à l’œuvre. Les juxtapositions de timbres voulues par le compositeur, les contrastes de tempo trouvent ici une parfaite cohérence. Une fort belle leçon offerte par le chef français, en charge de la classe de direction d’orchestre du Conservatoire national supérieur de musique de Paris.
Les applaudissements se prolongent, célébrant à la fois la prestation des interprètes ainsi que le plaisir d’être de retour dans les salles. Il faudra en revanche s’armer de patience pour la suite de la saison du Philharmonique, le deuxième concert n’ayant lieu qu’au mois de décembre.
Dimitri Finker
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