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Une création remarquée pour piano et électronique signée de Sasha Blondeau

Paris
Maison de la radio
02/08/2020 -  
Harrison Birtwistle: The Moth Requiem
Sasha J. Blondeau: Urphänomen II.B (création)
György Ligeti: Lux Aeterna
Unsuk Chin: Fanfare chimérique

Philippe Hattat (piano), Sasha J. Blondeau, Serge Lemouton et Benoît Meudic (réalisation informatique musicale Ircam)
Chœur de Radio France, Elèves du département des disciplines instrumentales du CNSM de Paris, Orchestre du Conservatoire de Paris, Martina Batic (direction)


M. Batic (© Janez Kotar)



Ce troisième concert du festival Présence au Studio 104 donne la mesure du travail accompli par Martina Batic à la tête du Chœur de Radio France. Le célèbre Lux Aeterna (1966) de Ligeti (1923-2006) s’en ressent, qui déploie la micropolyphonie sur l’ensemble du spectre sonore avec une belle cohésion d’ensemble. Tout juste regrettera-t-on quelques achoppements du côté des voix féminines (malgré le secours du diapason, régulièrement sollicité). La cheffe slovène suit scrupuleusement la partition, laquelle prescrit de longues plages de silence au début et à la fin.


L’effectif insolite de The Moth Requiem (2012) d’Harrison Birtwistle (né en 1934) comprend une flûte alto, deux harpes et chœur mixte. Le titre s’inspire d’un texte de Robert Blaser, Le Poème du papillon de nuit, relatant les efforts d’un papillon de nuit pour s’échapper du piano qui le retenait prisonnier. «Le texte principal, chanté par les deux chœurs composés chacun de six femmes, reprend les divers noms latins des papillons de nuit.» Les arabesques de la flûte alto qu’encadrent les harpes (dont certains modes de jeu étouffent les résonances) matérialisent les tentatives d’évasion de la créature prise au piège. La forme alterne plages statiques et irruptions en blocs bruts avec des rythmes déséquilibrés. De brefs intermèdes, durant lesquels il arrive aux membres du chœur de changer de place, cadencent l’écoulement erratique du temps (ostinatos ritualisants). Fin très poétique: la flûtiste joue jusqu’à extinction du souffle, baignée dans les poussières de résonances des harpes.


Au programme figurait une création de Sasha J. Blondeau (né en 1986) jouée par Philippe Hattat, pianiste suprêmement doué et très impliqué dans la création (il fut l’élève de Jean-François Heisser et Jean-Frédéric Neuburger au CNSM de Paris), aussi à l’aise pour défendre une sonate de Michel Merlet à la Schola Cantorum, des mélodies d’Olivier Greif au cycle de concerts Cantus Formus qu’une œuvre pour piano et électronique à Présences. Blondeau définit la forme comme «va-et-vient, qui impliquent un entrelacement de chemins». Une conception qu’on rapprochera de celle du compositeur Frédéric Durieux: «L’œuvre est le résultat d’allers-retours entre ce qui est hors-temps et la figuration qui s’inscrit obligatoirement dans une organisation de tempos.» (Frédéric Durieux: L’Espace des possibles - Ecrits et entretiens réunis, introduits et annotés par Laurent Feneyrou, Editions AedamMusicae)


Le titre allemand d’Urphänomen II.B, emprunté à Goethe, «désigne justement des "phénomènes originaires"». De là l’aspect velléitaire que revêt un certain nombre de gestes alternés (martellements frénétiques, arpèges interrogatifs, toccata dans le registre grave de l’instrument) décuplés par une partie électronique mobile et très bien intégrée à la trame générale. Le sentiment final, une fois les derniers sons évanouis, est d’avoir assisté à une œuvre qui répond à l’attente qu’elle propose d’elle-même.


On n’en dira pas autant de Fanfare chimérique (2019) d’Unsuk Chin (née en 1961), dont la partie électronique, peu convaincante, nous a semblé court-circuiter plutôt qu’enrichir le discours instrumental. Dispensé par un ensemble de vents tenu par les jeunes musiciens du CNSM de Paris, celui-ci consiste en de brusques et violentes interjections (on songe à Berio) en faisant un usage très individualisé de chaque instrument (glissandos de trombones, appels de cor, soufflerie des flûtes traversières...). Est-ce dû au fait que Martina Batic soit avant tout chef de chœur? Toujours est-il qu’on n’a pu s’empêcher de percevoir une certaine oralité dans la manière de jouer de tous ces instrumentistes à vent – sans doute les «créatures fantastiques tout droit sorties de la mythologie grecque» évoquées par la compositrice coréenne dans ses notes de présentation.


Le site de Sasha J. Blondeau



Jérémie Bigorie

 

 

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