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A savourer en famille Bordeaux Opéra 12/10/2019 - et 11, 12, 13, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 22, 23, 26, 27*, 28, 30, 31 décembre 2019 Cendrillon David Bintley (mise en scène, chorégraphie), Serge Prokofiev (musique)
Sara Renda/Marini da Silva Vianna/Oksana Kucheruk/Vanessa Feuillatte/Mélissa Patriarche* (Cendrillon), Riku Ota/Joseph Caley/Oleg Rogachev/Neven Ritmanic/Diego Lima* (Le Prince), Anna Guého/Alice Leloup* (Skinny), Diane Le Floc’h/Marina Guizien* (Dumpy), Marina Kudryashova/Cécile Grenier* (La Belle-Mère de Cendrillon), Nicole Muratov/Emilie Cerruti* (La Fée Marraine), Marini Da Silva Vianna*/Marina Guizien/Mélissa Patriarche (La Fée Printemps, Fiancée), Alice Leloup/Natalia Butragueno*/Hélène Bernadou (La Fée Eté, Fiancée), Vanessa Feuillatte/Marina Kudryashova*/Clara Spitz (La Fée Automne, Fiancée), Ahyun Shin/Anna Guého*/Anaëlle Mariat (La Fée Hiver, Fiancée), Ashley Whittle/Guillaume Debut*/Alexandre Gontcharouk (Le Maître à danser), Marc-Emmanuel Zanoli (Le Costumier), Pierre Devaux (Le Coiffeur), Kylian Tilagone (Le Perruquier), Kase Craig/Alvaro Rodriguez Pinera* (Père, Majordome), Charlie Pacaud/Mathilde Gimeno* (Cendrillon, Petite), Valentine Sordel/Lou Dumerval/Valentine Arvy*/Iris Bonnemazou* (Sœurs Cendrillon, Petite), Ballet de l’Opéra National de Bordeaux
Orchestre National Bordeaux Aquitaine, Marc Leroy-Calatayud (direction musicale)
John MacFarlane (décors, costumes), David A. Finn (lumières)
(© Yohan Terraza)
Donnée pour la première fois à Bordeaux, la Cendrillon (1944) de Prokofiev a reçu un accueil public enthousiaste et amplement mérité, tant la production imaginée par David Bintley parvient à réunir petits et grands par sa féerie et ses traits d’humour distillés tout du long. La grande force de ce spectacle, créé en 2010 à Birmingham, est de conjuguer une scénographie splendide qui convoque tous les attendus de la version la plus connue du conte (également choisie par Walt Disney), de l’âtre sordide au carrosse de Cendrillon, sans jamais sacrifier la danse, très présente. On se réjouit ainsi pendant toute la scène du bal des nombreux pas à l’ancienne revisités avec autant de précision que de facétie – les deux sœurs jouant les vraies-fausses maladroites, moquées et ridiculisées par les courtisans et valets, et ce sans jamais céder à la facilité de la bouffonnerie. Pour autant, David Bintley n’en oublie pas d’apporter quelques infimes ajouts qui offrent un intérêt constant: on pense ainsi au début très sombre qui montre l’enterrement, ou encore à l’idée de donner à la mère les atours de la fée, comme pour mieux l’excuser de son décès prématuré – sans parler de la présence inattendue des souris, crapauds et grenouilles, en lieu et place des cochers et chevaux, qui ravissent par leurs costumes aussi extravagants que réussis. On pourra juste regretter un rôle plus réduit pour la belle-mère dans cette proposition, ou quelques longueurs en toute fin de soirée, lorsque l’action se fait moins présente. Des détails qui n’enlèvent rien à la maestria visuelle constamment à l’œuvre, et plus encore au raffinement orchestral de Prokofiev, d’une élégance tour à tour diaphane et piquante – dans la lignée du ballet précédent Roméo et Juliette (1936), avec toutefois une inspiration mélodique moindre.
Il faut dire que l’autre grande satisfaction de la soirée vient de la fosse, avec un Marc Leroy-Calatayud (né en 1991) qui surprend par sa capacité à faire chanter l’Orchestre National Bordeaux Aquitaine avec force couleurs et détails révélés, au service d’une lecture très vivante. Si le jeune chef séduit dans les passages rythmiques, il doit toutefois encore gagner en naturel et en fluidité dans les parties apaisées, aux tempi trop étirés. Des ajustements qui devraient lui permettre de gagner très vite la cour des plus grands chefs, tant son talent est manifeste. Le Ballet de l’Opéra de Bordeaux démontre quant à lui, une fois encore, qu’il fait parti des meilleurs de l’Hexagone – mené il est vrai par un couple des plus flatteurs, entre l’athlétique Prince de Diego Lima et la délicate Cendrillon de Mélissa Patriarche. De quoi inciter à applaudir ce très beau spectacle qui invite à revisiter le conte avec notre regard d’enfant émerveillé.
Florent Coudeyrat
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