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Une soirée incandescente

Toulouse
Halle aux grains
12/07/2019 -  et 9 décembre 2019 (Paris)
Franz Liszt: Concerto pour piano et orchestre n° 1 en mi bémol majeur, S. 124
Dimitri Chostakovitch: Symphonie n° 8 en ut mineur, opus 65

Lucas Debargue (piano)
Orchestre national du Capitole de Toulouse, Tugan Sokhiev (direction)


L. Debargue (© Xiomara Bender)


Le Premier Concerto pour piano de Liszt a le vent en poupe en ce moment auprès des pianistes se produisant dans les grandes salles de concert européennes, et après Denis Kozhukhin et Robert Trevino il y a quinze jours au Konzerthaus de Vienne, c’est maintenant au tour de Lucas Debargue – accompagné de Tugan Sokhiev et de son Orchestre nationale du Capitole (ONCT) – de s’attaquer, à la Halle aux grains de Toulouse, à ce chef-d’œuvre du romantisme. D’emblée, les premiers accords résonnent avec grandeur, laissant présager une direction flamboyante et passionnée de la part du chef ossète. Quelques mesures suffisent pour que le jeune pianiste français, qui s’est tant fait remarquer au XVe Concours international Tchaïkovski de Moscou, arrive à la densité de jeu souhaitée. Son piano nous émeut là où d’autres virtuoses en font souvent des tonnes, et peinent ainsi à atteindre la même profondeur. C’est un authentique dialogue qui s’instaure avec un orchestre qui brille par la qualité de ses solos, à commencer par les bois et les vents (et plus particulièrement la clarinette alerte de Floriane Tardy). Très à l’écoute du pianiste, Tugan Sokhiev crée une architecture homogène, aux dynamiques fermes, sans jamais chercher à prendre le dessus, si ce n’est dans un climax final... superbement maîtrisé! En bis, Lucas Debargue offre d’abord la Sonate en mi bémol majeur K. 253 de Domenico Scarlatti, avant sa propre Toccata d’après un prélude de Bach en do mineur, qui lui valent un franc succès auprès du public occitan.


En seconde partie de soirée, place à la monumentale Huitième Symphonie de Chostakovitch, et c’est un choc émotionnel, dès le surgissement des contrebasses du premier mouvement et jusqu’au murmure final. Pendant plus d’une heure, l’audience est contrainte à une réflexion quasi insupportable sur l’horreur de la Bataille de Stalingrad, ici peinte en musique. Avec un ONCT des grands soirs, se pliant magnifiquement aux désirs de Tugan Sokhiev, peut-on encore parler de plaisir musical? La puissance des sons, le grincement des violons, la profondeur des violoncelles, les rythmes douloureux de tout l’orchestre sont moins d’admirables réalisations techniques qu’un investissement artistique de musiciens (trans)portés par l’incandescente baguette de leur chef. Sokhiev exacerbe cette œuvre avec une telle charge émotionnelle qu’on aimerait parfois pouvoir le stopper pour reprendre son souffle et pour respirer un peu d’air... mais comme une navigation ballottée par les flots, les images continuent inexorablement d’assaillir nos sens, jusqu’à un final qui offre enfin la détente attendue: la direction se fait alors poignante de retenue, suspendant le temps dans un bouleversant pianissimo...



Emmanuel Andrieu

 

 

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