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Genevois plutôt qu’autrichien

Geneva
Victoria Hall
11/27/2019 -  et 28 novembre 2019 (Lausanne)
Wolfgang Amadeus Mozart: Concerto pour piano n° 27, K. 595
Anton Bruckner: Symphonie n° 6

Paul Lewis (piano)
Orchestre de la Suisse Romande, Andris Poga (direction)


A. Poga (© Jean Philippe Raibaud)


L’ultime Concerto pour piano de Mozart fait partie de cette salve de chefs-d’œuvre absolus de la dernière année du compositeur. Mozart nous donne ici un concerto qui, tout en étant dans la lignée de ce genre brillant dans lequel il excelle, apporte une dimension supplémentaire, une intériorité et une profondeur que l’on pourrait caractériser de «schubertienne».


Ceci en fait une œuvre sur mesure pour les débuts genevois de Paul Lewis, élève d’Alfred Brendel. S’il semble qu’il ait été un peu neutre à Berlin dans cette même œuvre en septembre, ce n’est pas le cas ici. Les tempi sont avant tout très justes, ni trop rapides, ni trop lents. Le discours est animé et les différents passages, changements de tonalité servent à caractériser la musique. De son côté, le jeu de Lewis est plein de distinction : une sonorité claire et lumineuse, une pulsation régulière et beaucoup de sensibilité. L’Orchestre de la Suisse Romande en formation allégée est attentif au soliste. Les contrebasses dialoguent avec la main gauche du pianiste dans le sublime Larghetto et les interventions de Nora Cismondi au hautbois nous montrent à quel point ce pupitre est devenu à la hauteur des autres bois de l’orchestre. Ce Mozart plus retenu et moins théâtral que par habitude est précurseur de Schubert, et c’est logiquement que Paul Lewis, très applaudi, donne en bis son Allegretto D. 915.


C’est un orchestre plus fourni que nous retrouvons en seconde partie pour la Sixième Symphonie de Bruckner. Andris Poga, ancien assistant de Paavo Järvi à Paris ainsi que d’Andris Nelsons à Boston, apporte beaucoup de soin pour faire sonner l’orchestre. Le geste est ample. Les équilibres instrumentaux, et en particulier les dialogues bois et cuivres, sont très travaillés. Le chef letton sait que la musique de Bruckner doit se développer sur de longues lignes. Mais ce travail de phrasé et d’architecture, tout réel qu’il soit, est un peu réalisé au détriment de l’émotion que recèlent certains passages. Il y a quelques années dans cette même salle en 2018, Riccardo Chailly nous avait montré que cette «petite» symphonie pouvait trouver des accents mahlériens sans que la ligne soit perdue. L’expression est ce soir à plusieurs moments un peu gommée, comme pour ne pas s’appesantir et perturber les longueurs brucknériennes. Il ne s’agit pas d’une lecture où l’apollinien serait privilégié par rapport au dionysiaque, il s’agit plutôt un Bruckner un peu sévère qui nous est proposé, protestant plus que catholique, genevois plutôt qu’autrichien. Il faut souligner le niveau instrumental, la qualité de la mise en place et la volonté d’architecture de cette lecture, mais l’expression est un peu encore trop en retrait, même si cette première rencontre entre ce jeune chef et l’OSR est prometteuse.


Les lecteurs de ConcertoNet me permettront de conclure par une requête importante. Nous avons souvent expliqué le besoin que l’OSR puisse impérativement avoir une nouvelle salle de concert moderne pour atteindre un nouveau public, bénéficier d’une meilleure acoustique que celle de Victoria Hall, condition indispensable pour améliorer le niveau musical et consolider le travail démarré depuis quelques années. Même s’il est engagé, ce projet doit être soutenu et je vous encourage à apporter votre soutien ici et espère vous voir tous nombreux en 2024 pour l’ouverture de cette nouvelle salle.



Antoine Lévy-Leboyer

 

 

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