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Une Somnambule belcantiste qui réveille Compiegne Théâtre impérial 12/09/2001 - Vincenzo Bellini : Sonnambula, version de concert Annick Massis (Amina), Marie Devellereau (Lisa), Emilienne Coquaz (Teresa), Mario Zeffiri (Elvino), Leonard Graus (Il Conte Rodolfo), Patrick Delcour (Alessio), Lillo Farrauto (Un notario) Orchestre et Choeurs de l’Opéra de Wallonie Alberto Zedda (direction)
L’orchestre et les Choeurs de l’Opéra de Wallonie ont été transcendés par la direction d’Alberto Zedda qui a ébloui le public par son approche personnelle de la partition. Selon le moment il a donné des couleurs, des pianissimi, des forte que seul un chef rompu à cette musique peut offrir. Jamais les chanteurs n’ont été obligés de forcer la voix, l’orchestre les accompagnant, les soutenant, les enveloppant dans une osmose complète.
La triomphatrice de cette soirée fut incontestablement la soprano lyrique colorature Annick Massis. Cette soirée à Compiègne était pour elle un retour sentimental car elle triompha en 1992 puis en 1996 sur cette scène dans Philine de Mignon, vrai début de sa carrière qu’elle qualifie elle-même d’un peu tardive, mais qui après la première Sonnambula au Teatro Real de Madrid, Lucia di Lammermoor au Liceu de Barcelone , va la conduire dans ce rôle-titre vers une des consécrations suprêmes : le Met en 2002. Avec ce personnage d’Amina aux multiples facettes, elle a su chercher et dégager le côté humain de cette pauvre jeune fille flottant entre la réalité et un état second. Sa palette vocale est très étendue : un grave sonore, un médium riche en couleurs et un aigu étincelant jamais forcé. Les contre-ré, contre-mi bémol sont venus naturellement. Son dernier air «Ah non credea mirarti» fut sans emphase, musical et mélodieux, évitant de tomber dans le travers de certaines de ses consoeurs qui veulent à tout prix briller au détriment de l’expressivité. L’émotion, la tristesse, son amour pour Elvino transparaissent dans son chant. Marie Devellereau, soprano de choix fut tour à tour «chipie» au 1er acte et résignée à son infortune au 2ème. Parfois certaines notes quelque peu criées ternissent son matériau indéniable, mais son air du 2ème acte fut bien placé avec une sûreté digne des Grandes. Il est difficile de se prononcer sur la prestation d’Elviro, Mario Zeffiri né à Athènes, qui fut annoncé souffrant au début du spectacle. Son timbre de ténor lyrique léger, sa bonne projection, sa justesse de sons qu’il a sans doute perfectionnés à l’académie Rossinienne de Pesaro, lui ont permis d’arriver au terme de ce concert sans encombre. La prestance physique et l’aisance vocale du baryton- basse Leonard Graus ont apporté la sécurité et le calme à l’ensemble des protagonistes comme le veut la partition, malgré une attitude trop figée et désolidarisée des autres chanteurs qui, eux, ont cherché par quelques gestuelles significatives à animer l’intrigue. Les rôles secondaires bien distribués Emilienne Coquaz (Teresa), Patrick Delcour (Alessio), et Lillo Farrauto (le notaire) ont honorablement accompagnés cette distribution. Seul regret : la version de concert, car un tel plateau mérite largement une version scénique. Il est vrai que s’il s’agit de subir la suprématie de mise en scène outrancière, vulgaire, décalée dans le temps en enlevant toute signification de l’œuvre sous le prétexte de modernité ?… La version de concert est préférable.
Elie-Gérard Souquet
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