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Le soleil dans la voix Evian Grange au Lac 10/18/2019 - Christophe Willibald Gluck : Orphée et Eurydice: Ouverture
Hector Berlioz : Les Nuits d’été, opus 7 – La Damnation de Faust, opus 24: Ballet des Sylphes et « Nature immense »
Piotr Ilitch Tchaïkovski : Eugène Onéguine, opus 24: « Kuda, kuda » et Polonaise
Jules Massenet : Manon: « En fermant les yeux »
Charles Gounod : Faust: Entrée des jeunes Troyennes et Variations d’Hélène – Roméo et Juliette: « L’amour, oui son ardeur » Benjamin Bernheim (ténor)
Orchestre des Pays de Savoie, Nicolas Chalvin (direction)
(© Aline Paley)
« Lève-toi soleil... » C’est par le célèbre air tiré de Roméo et Juliette de Gounod que Benjamin Bernheim a conclu la partie officielle du concert qu’il a donné en ouverture du deuxième festival « Voix d’automne » à Evian. Le soleil, Benjamin Bernheim en regorge dans la voix. Et il en a usé avec générosité, comme pour illuminer un week-end maussade et pluvieux. Le timbre lumineux du jeune ténor a fait merveille aussi bien dans Tchaïkovski que dans les grands airs du répertoire français, de Massenet à Gounod en passant par Berlioz. Benjamin Bernheim a tout pour lui : une diction irréprochable, un phrasé délicat, des aigus percutants, une intonation jamais prise en défaut, la maîtrise de chaque accent, de chaque inflexion, l’art des nuances, qui lui permet de passer de pianissimi à peine audibles à des accents brillants, sans parler de l’élégance naturelle de son chant. Difficile d’imaginer aujourd’hui Roméo plus ardent et éblouissant ou Des Grieux plus doux et rêveur.
L’éclat du soleil conviendrait-il mieux à la voix de Benjamin Bernheim que la pénombre ? En première partie de son concert, le ténor s’est lancé pour la toute première fois dans Les Nuits d’été de Berlioz, avec la complicité d’un Nicolas Chalvin particulièrement attentif et nuancé à la tête de l’Orchestre des Pays de Savoie. On a senti le chanteur précautionneux, sur la réserve, l’œil rivé sur la partition. Et puis Les Nuits d’été sont-elles un cycle idéal pour la voix de ténor ? Le chanteur aurait-il abordé l’ouvrage un peu trop tôt dans sa carrière ? Quoi qu’il en soit, Benjamin Bernheim a largement le temps de mûrir son interprétation. Courtisé aujourd’hui par les plus grandes scènes, il a tous les atouts dans la voix pour réussir une magnifique carrière. Son récital à Evian en a été la preuve magistrale.
Le lendemain, la Grange au Lac a vibré aux accords des Indes galantes venues tout droit de Paris, mais sans mise en scène ni parties dansées. Quel bonheur de réentendre cette œuvre dans une salle intimiste et à l’acoustique lumineuse, parfaitement adaptée au répertoire baroque. Chef, musiciens, choristes et chanteurs ont été ovationnés par un public sous le charme de la musique de Rameau. Cette deuxième édition des « Voix d’automne » a prouvé, par la qualité de sa programmation, que le festival d’Evian est désormais un incontournable des manifestations lyriques d’octobre.
Claudio Poloni
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