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Huis clos étouffant

Helsinki
Opéra
10/05/2019 -  et 9, 11*, 16, 18 octobre 2019
Erich Wolfgang Korngold : Die tote Stadt, opus 12
Mika Pohjonen (Paul), Nadja Stefanoff (Marietta, Voix de Marie), Michael Kraus (Frank, Fritz), Katariina Havukainen (Marie), Ivonne Fuchs (Brigitta), Anna-Kristiina Kaappola (Juliette), Ann-Marie Heino (Lucienne), Markus Nykänen (Victorin), Antti Nieminen (Gaston), Roland Liiv (Le comte Albert)
Suomen kansallisoopperan kuoro ja lapsikuoro, Suomen kansallisooperan orkesteri, Jukka-Pekka Saraste (direction musicale)
Kasper Holten (mise en scène), Es Devlin (scénographie), Katrina Lindsay (costumes), Wolfgang Goebbel (lumières)


(© Stefan Bremer)


Monté pour la première fois en Finlande en 2010, La Ville morte fait son retour à Helsinki cet automne dans la production de Kasper Holten (parue en DVD en 2013), avec des interprètes différents. Camilla Nylund et Klaus Florian Vogt laissent ainsi la place à une chanteuse d’exception en la personne de Nadja Stefanoff (Marietta), qui met un peu de temps à se chauffer dans la première partie qui sollicite la souplesse vocale, avant de l’emporter ensuite par son chant ample et ses graves gorgées de couleur. A ses côtés, Mika Pohjonen compose un Paul embarrassé par son physique imposant, malheureusement trop piètre acteur pour un rôle aussi déchirant, tandis que sa voix blanche et sa projection uniforme ne permettent pas de donner davantage de relief. Autour de seconds rôles de bonne qualité, Michael Kraus se distingue dans sa double incarnation par ses phrasés nobles et bien posés, même si, là aussi, le jeu d’acteur ne semble pas être son point fort.


Ces faiblesses dramatiques sont d’autant plus regrettables que la production imaginée par Kasper Holten nous plonge dans un décor unique pendant toute la représentation, certes superbe avec les nombreux détails du mausolée où Paul a élu domicile, mais trop statique pour convaincre sur la durée. A l’instar de la production londonienne du Roi Roger en 2015, Holten enferme les interprètes dans un huis clos étouffant afin de sonder les errements psychologiques: placé au centre de la scène, le lit conjugal symbolise l’impuissance du héros face à ses hésitations puritaines, tandis qu’une maquette de Bruges apparaît au II en arrière-scène, évoquant le souvenir imprécis de la vie sociale de Paul. De même, l’idée d’ouvrir le lit pour en faire sortir la troupe de théâtre, comme autant de fantasmes inassouvis, est assez bien vue, même si la direction d’acteur reste encore une fois trop convenue – et ce malgré l’interprétation par une actrice muette du rôle de la défunte.


A cette mise en scène trop intellectuelle répond une direction du même calibre: à la tête d’un superlatif Orchestre de l’Opéra national finlandais, Jukka-Pekka Saraste exalte les modernités de l’ouvrage à coup de déflagrations cinglantes et hautes en couleur, sans aucun temps mort. On reste toutefois sur sa faim, tant cette lecture oublie par trop la nécessaire conduite de l’action dramatique et l’articulation avec le plateau, en une sécheresse émotionnelle rarement atteinte. Dommage.



Florent Coudeyrat

 

 

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