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Et vive la trompette!

Oviedo
Teatro Campoamor
08/14/2019 -  
Guillermo Martínez: Aires de la Pomarada (création)
Johann Baptist Georg Neruda: Concerto pour cor de chasse en mi bémol
Wolfgang Amadeus Mozart: Symphonie n° 39 en mi bémol majeur, K. 543
Arturo Márquez: Concierto de Otono

Pacho Flores (trompette)
Oviedo Filarmonía, Lucas Macías (direction)




Le programme de la saison musicale d’Oviedo pour 2019-2020 vient d’être diffusé. Il est impressionnant: Carolin Widmann, Martha Argerich (deux fois), la Kremerata Baltica, András Schiff, Nelson Freire, Michael Barenboim, James Conlon, Isabelle Faust (deux fois), François-Xavier Roth et son orchestre Les Siècles, Simon Rattle avec son London Symphony Orchestra, Jean-Guihen Queyras, Jörg Widmann et Pierre-Laurent Aimard seront notamment à l’affiche de l’Auditorium Principe Felipe. Du côté de l’opéra, la programmation est on ne peut plus classique, malheureusement comme sur beaucoup de scènes car il faut bien remplir les salles, mais elle est indéniablement ambitieuse (Le Crépuscule des dieux, Lucia di Lammermoor...) et on repère Une tragédie florentine de Zemlinsky sortant un peu des sentiers battus.


Pour se préparer à une telle saison, qui n’a guère d’équivalent en France, Oviedo ayant à peu près la taille de l’agglomération caennaise, sont proposés au cours de l’été, entre le 14 juillet et le 5 septembre, pas moins de vingt concerts en divers lieux de la ville (pas forcément idéals comme on l’a maintes fois regretté dans ces colonnes). Le treizième de la série était ainsi consacré à un beau programme au théâtre Campoamor, cette fois parfaitement adapté. L’affiche était bâtie autour de la trompette de Pacho Flores, artiste vénézuélien né en 1981, issu du Sistema rendu célèbre par Gustavo Dudamel, premier prix du concours Maurice André et installé à Valence (en Espagne) – on peut le comprendre – depuis six ans.



P. Flores, A. Márquez


Sans pause aucune, le concert, d’une heure trente-cinq, débute par une création de Guillermo Martínez, compositeur né au Venezuela en 1983 mais formé et installé à Oviedo, Airs de la pommeraie. La partition est totalement dénuée d’originalité. Parfaitement tonale, plutôt bien orchestrée, elle paraît pouvoir être recyclée dans n’importe quelle zarzuela. Elle tire franchement par moments du côté d’Hollywood, façon Esther Williams. On hésite alors entre le sirupeux et le champêtre et l’interprétation n’améliore pas les choses: les cordes jouent en ordre dispersé, les cuivres laissent à désirer et le timbalier, dès le début, tient absolument à se faire remarquer. Le public réserve néanmoins, à l’invitation du chef d’orchestre Lucas Macías, un accueil chaleureux au jeune compositeur.


Les percussions et les vents ayant quitté la scène, on entend ensuite du compositeur tchèque Johann Baptist Georg Neruda (1708-1780), un Concerto pour cor de chasse. Le soliste présente avec humour son instrument en indiquant que son cor initialement prévu avait été malencontreusement réduit au lavage. Effectivement, le cor utilisé est fort petit et l’interprète le manipule un peu dans tous les sens lorsqu’il ne souffle pas dedans. L’œuvre, d’un classicisme de bon aloi, a surtout le mérite de nous changer du Concerto pour trompette de Haydn. Les cordes ne sont cependant pas au meilleur de leur forme, les graves (altos, violoncelles et contrebasses) s’en sortant peut-être un peu mieux. Pacho Flores écrase de toute façon l’orchestre par sa virtuosité, sa clarté et sa souplesse et c’est malgré tout un moment ravissant. Point de canard, le son de la trompette Stomvi, fabriquant de Valence pour lequel travaille Pacho Flores, est sans cesse éclatant, en rien nasal.


La Trente-neuvième Symphonie de Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791) laisse ensuite une impression mitigée. Les violons continuent de flotter, notamment dans les aigus, parfois pénibles, mais l’interprétation reste néanmoins honorable, sous la direction d’un Lucas Macías, ancien hautboïste nommé en 2018 à la tête de l’orchestre, qui dirige sans partition et cherche à produire un son constamment généreux sans tomber dans les excès de Marzio Conti, son prédécesseur à la tête du Filarmonía. Les troisième et quatrième mouvements sont bien enlevés, les flûte et hautbois parvenant à s’y distinguer par leur tenue exemplaire.


Le programme s’achève par la création européenne du Concerto d’automne d’Arturo Marquez, compositeur mexicain né en 1950. Lors d’une courte présentation, Pacho Flores regrette que la trompette n’ait pas suscité plus de créations contemporaines et se félicite de l’existence de ce concerto, lequel fait partie de diverses partitions créées récemment à son initiative. On relèvera que les titres des mouvements du concerto de ce soir constituent d’ailleurs sans doute un hommage en retour sous forme de clins d’œil au nom de son principal interprète, qui évoque les fleurs. L’œuvre n’a une nouvelle fois rien de révolutionnaire. Elle est indéniablement virtuose mais ses thèmes populaires semblent avoir été écrits avant l’ère de Silvestre Revueltas, sans parler de la Sequenza X pour trompette de Luciano Berio. L’interprète utilise pas moins de quatre instruments de la même famille et toujours avec une facilité confondante. On assiste alors à de folles chevauchées qu’on imagine entre cactus et églises mexicaines remplis de simples peones, les crescendos rythmés de l’orchestre ne parvenant pas à faire taire le chant de ces trompettes et leurs effets plus ou moins jazzy ou leurs glissandos impressionnants dans le dernier mouvement, le plus proche peut-être de l’esprit de Revueltas. Le public apprécie et applaudit entre chaque mouvement.


Avec toujours autant de générosité et même, disons-le, de cœur, Pacho Flores propose donc ensuite deux bis: le premier, une page populaire vénézuélienne, El diablo suelto (Le Diable en cavale), accompagné par un jeune garçon venant des coulisses pour jouer, ou plutôt gratter, une curieuse petite guitare à quatre cordes, passablement inaudible, et le second, A mis hermanos, page colorée d’Aquiles Báez, concluant avec autant de saveur que d’humour et naturellement de brio un concert somme toute des plus plaisants.


Le site de Pacho Flores
Le site de la Philharmonie d’Oviedo



Stéphane Guy

 

 

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