Back
Le grand Rigoletto Circus Bregenz Seebühne 07/18/2019 - et 19, 20*, 21, 23, 24, 25, 26, 27, 28, 30, 31 juillet, 1er, 2, 3, 4, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 13, 14, 16, 17, 18 août 2019 Giuseppe Verdi : Rigoletto Vladimir Stoyanov/Scott Hendricks/Jordan Shanahan/Yngve Søberg* (Rigoletto), Mélissa Petit/Stacey Alleaume/Ekaterina Sadovnikova* (Gilda), Stephen Costello/Sergey Romanovsky*/ Pavel Valuzhin (Il Duca di Mantova), Goderdzi Janelidze*/Miklós Sebestyén (Sparafucile), Katrin Wundsam/Rinat Shaham* (Maddalena, Giovanna), Kostas Smoriginas/Jordan Shanahan* (Il Conte di Monterone), Wolfgang Stefan Schwaiger/Liviu Holender* (Marullo), Paul Schweinester/Taylan Reinhard* (Matteo Borsa), Jorge Eleazar/David Ostrek* (Il Conte di Ceprano), Léonie Renaud/Gloria Giurgola* (La Contessa), Hyunduk Kim/David Kerber* (Un paggio)
Prager Philharmonischer Chor, Bregenzer Festspielchor, Lukas Vasilek, Benjamin Lack (préparation), Wiener Symphoniker, Enrique Mazzola*/Daniele Squeo (direction musicale)
Philipp Stölzl (mise en scène, décors, lumières), Heike Vollmer (décors), Kathi Maurer (costumes), Georg Veit (lumières), Olaf A. Schmitt (dramaturgie)
Le Festival de Bregenz est connu loin à la ronde pour ses productions spectaculaires sur le lac de Constance. Rigoletto, qui vient d’ouvrir l’édition 2019, ne fait pas exception à la règle. Le décor est grandiose et impressionnant, avec trois scènes, une principale et deux plus petites, reliées les unes aux autres. Une énorme tête de clown qui roule des yeux et ouvre la bouche est posée sur la première scène, alors que les deux autres sont occupées respectivement par une main articulée et par une autre main qui tient un ballon géant. La tête représente le palais du Duc, lequel se prélasse au sommet du crâne, enlève Gilda dans la bouche et contemple l'action dans les yeux vidés de leur globe. La main articulée, elle, est la demeure de Rigoletto, l’endroit où il retrouve sa fille Gilda. Le metteur en scène Philipp Stölzl a transposé l’action dans un cirque, faisant de Rigoletto un clown, de Gilda une trapéziste et du Duc de Mantoue le directeur de l’établissement. La tête de clown peut donc aussi symboliser Rigoletto. Au fur et à mesure de la déchéance du bouffon, elle perd plusieurs de ses attributs, d’abord des dents, puis les globes oculaires et enfin le nez. Avant même que retentissent les premières notes de la partition de Giuseppe Verdi, une fanfare suivie de clowns bruyants et d’acrobates plonge le public dans une ambiance circassienne. Tout au long des deux heures de spectacle, ces figurants aux costumes grotesques et bariolés animent la représentation avec des acrobaties, des voltiges aériennes et un nombre impressionnant de plongeons dans le lac.
(© Bregenzer Festspiele / Anja Köhler)
Comme les chanteurs sont placés loin du public, ils sont sonorisés, de même que l’orchestre, qui joue, lui, à l’abri, dans un studio situé derrière les spectateurs. Les représentations sont données chaque soir devant 7000 personnes jusqu’au 18 août, même en cas de pluie. Le public est averti que les imperméables sont de rigueur en cas de menace de mauvais temps ; et les chanteurs savent qu’à Bregenz ils doivent souvent affronter des éléments contraires, notamment le froid et les gouttes. La sonorisation a été renouvelée cette année et, effectivement, le son n’atteint pas (encore) la qualité des éditions précédentes. C’est notamment le cas pour les chanteurs, qui sonnent sourd et métallique, alors que l’orchestre passe bien la rampe. Des couacs se font aussi entendre, à l’instar d’un effet Larsen qui a perturbé le spectacle pendant quelques secondes. Un micro malencontreusement coupé l’espace d’un instant a aussi permis de constater combien les voix, sans support, peinent à arriver jusqu’au public.
Compte tenu du nombre de représentations programmées, les distributions sont triplées, voire quadruplées. Le public n’en a cure, car il vient à Bregenz pour le spectacle et non pour les voix. Et d’ailleurs, ce soir le plateau vocal ne brille pas particulièrement, à l’instar du Duc de Sergey Romanovsky, qui ne s’embarrasse pas de nuances et qui s’égosille dans les aigus. Yngve Søberg incarne, pour sa part, un Rigoletto un peu terne vocalement et avare en émotion. Mais la soirée révèle néanmoins une pépite : la Gilda d’Ekaterina Sadovnikova, à la voix cristalline et lumineuse. Son « Caro nome » restera comme le point d’orgue de la soirée. A la tête de l’Orchestre symphonique de Vienne, Enrique Mazzola offre une lecture alerte et transparente, sans aucune pesanteur, à l’image du ballon lâché par Rigoletto dans le ciel de Bregenz. Traditionnellement, le spectacle sur la scène lacustre est repris l’année suivante. 2020 sera donc encore placé sous le signe de Rigoletto à Bregenz.
Le site du Festival de Bregenz
Claudio Poloni
|