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Fin de festival brouillonne

Paris
Saint-Denis (Basilique)
07/03/2019 -  
Giuseppe Verdi : Messa da Requiem
Lennecke Ruiten (soprano), Christine Rice (mezzo-soprano), Charles Castronovo (ténor), Ashley Riches (basse)
Monteverdi Choir, Orchestre Révolutionnaire et Romantique, Sir John Eliot Gardiner (direction)




Cet ultime concert marquait la fin du Festival de Saint-Denis «édition 2019», qui, comme chaque année, a vu se succéder aussi bien de grandes œuvres symphoniques et chorales (de la Résurrection de Gustav Mahler au rare oratorio de Michael Tippett A Child of Our Time) que de la musique de chambre et des musiques du monde. Le Requiem de Verdi a été plusieurs fois représenté ici, dans le cadre toujours aussi somptueux de la Basilique de Saint-Denis, que ce soit sous la direction de Myung-Whun Chung en 2005 ou, en 2011, sous celle de Riccardo Muti, concert fabuleux. Quant à John Eliot Gardiner, il est également un habitué de ces grandes messes, au sens propre du terme d’ailleurs: souvenons-nous de cet hallucinant Requiem de Berlioz lors de l’édition 2012, Bach ayant été au menu de l’année dernière. Autant dire que les attentes d’un grand concert étaient fortes: autant dire que la déception n’en aura été que plus importante.


Car voilà bien un Requiem qui ne restera guère dans les mémoires. Tressons immédiatement de nouveaux lauriers au Chœur Monteverdi, qui aura une nouvelle fois été irréprochable. Son entrée (de même que celle de l’orchestre) dans le «Requiem aeternam» introductif s’effectua avec une intensité et une présence incroyables, ses rugissements faisant quelques minutes plus tard trembler les murs épais de la Basilique dans le «Dies irae». Idem dans le «Rex tremendae», puissant sans jamais être criard. Mais ce sera bien le seul atout de cette soirée car l’Orchestre Révolutionnaire et Romantique ne se montre pas là sous son meilleur jour. Les timbres sont intéressants en plus d’une occasion (instruments d’époque obligent) mais John Eliot Gardiner bouscule tout cela sans son sens habituel de la nuance et de la subtilité. Après l’intervention de la mezzo-soprano dans le «Tuba mirum», la reprise du thème par les violoncelles se trouve ainsi totalement bousculée, les cordes sonnant globalement «petit», loin de toute la force requise par l’œuvre. Certes, la grosse caisse manque d’exploser à chaque coup dans le «Dies irae» (certainement l’un des passages les plus réussis de ce Requiem) et les bois sont agréables à entendre mais encore eût-il fallu que nous les entendions, justement! Car les traits de la clarinette ou de la flûte sont bien souvent noyés, le déséquilibre étant patent et jouant au contraire à rebours dans le «Quid sum miser» où les traits des bassons s’avèrent presque grossiers. Quant aux trompettes, qu’elles furent bien timides dans le «Tuba mirum» alors qu’elles auraient dû au contraire exploser!



C. Rice (© Patricia Taylor)


Côté solistes, nous ne sommes guère gâtés, Lennecke Ruiten et Christine Rice remplaçant à cette occasion Rebecca Evans et Marianna Pizzolato initialement prévues. La soprano hollandaise affiche une voix bien souvent étriquée (plus adaptée sans doute à une messe de Mozart édulcorée qu’aux frissons du Requiem verdien) d’où ne sort aucune émotion, l’attention semblant surtout portée aux obstacles techniques de la partition: de fait, son «Libera me» ne distille aucune tristesse et conclut le Requiem de façon extrêmement banale, voire terne. Si Charles Castronovo chante un honnête «Ingemisco» (malheureusement précipité là encore par la battue de Gardiner), sa prestation ne sera pas à marquer d’une pierre blanche; au contraire, son intervention initiale dans le «Requiem aeternam» a été plus rapide que l’orchestre au point de créer un léger décalage qui a vite contaminé ses partenaires, la crainte de la véritable catastrophe ne disparaissant vraiment qu’avec l’arrivée du «Dies irae». Grosse déception également à l’écoute de la basse Ashley Riches: là encore, voix sans projection ni caractère, diction souvent engorgée, chantant un «Confutatis» insipide. On se presse de l’oublier. Finalement, c’est Christine Rice qui s’en sort le mieux non seulement parce qu’il est facile de triompher de partenaires sous-dimensionnés mais, admettons-le, parce que sa prestation fut plutôt bonne en elle-même. Son «Liber scriptus» fut intense et son «Lux aeterna» particulièrement lumineux, servis au surplus par une diction parfaitement intelligible.


En fin de compte, c’est surtout John Eliot Gardiner qui nous aura dérouté: quelle conception a-t-il du Requiem de Verdi? Qu’a-t-il voulu dire? On n’en saura rien tant l’œuvre semble être une juxtaposition d’épisodes indépendants les uns des autres, les éclairages étant apportés tantôt sur l’orchestre, tantôt sur les solistes sans que les options prises se défendent véritablement. En vérité, dire que Gardiner nous aura dérouté est faux: il nous aura surtout déçu. C’est bien la première fois...


Le site de John Eliot Gardiner, du Monteverdi Choir et de l’Orchestre Révolutionnaire et Romantique
Le site de Lennecke Ruiten
Le site de Charles Castronovo
Le site d’Ashley Riches



Sébastien Gauthier

 

 

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