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Elégante sobriété à l’épreuve du temps Toulon
Opéra
05/24/2019 - et 26, 28 mai 2019
Piotr Ilyitch Tchaïkovski: Eugène Onéguine, opus 24
Simon Mechlinski (Eugène Onéguine), Natalya Pavlova (Tatiana), Pavel Valuzhin (Lenski), Fleur Barron (Olga), Nona Javakhidze (Madame Larina), Sophie Pondjiclis (Filipievna), Andrey Valentiy (Prince Grémine), Eric Vignau (Monsieur Triquet), Mikhael Piccone (Un capitaine, Zaretski)
Chœur de l’Opéra de Toulon, Christophe Bernollin (chef de chœur), Orchestre de l’Opéra de Toulon, Dalia Stasevska (direction musicale)
Alain Garichot (mise en scène), Elsa Pavanel (décors), Claude Masson (costumes), Cooky Chiapalone (chorégraphie)
N. Pavlova, A. Valentiy, S. Mechlinski (© Frédéric Stéphan)
Peu de mises en scène peuvent se targuer d’un tel succès et de tant de reprises. Depuis sa création il y a vingt-deux ans à l’Opéra de Lorraine, cette proposition scénique d’Alain Garichot a reçu les faveurs de nombreux publics: Nice en 2017, Saint-Etienne, Tours, Rennes, Nantes, Genève. C’est au tour de l’Opéra de Toulon de l’accueillir avec une ardente ferveur.
Mise en scène et décors épurés sont en parfaite adéquation avec l’œuvre. Ici, aucun clinquant ni effet tapageur; c’est de sentiments, d’intimité, dont il est question et les portraits sont brossés avec une délicate subtilité. Certains tableaux retiennent véritablement l’attention, et le souffle, par leur justesse et leur élégance: la scène de la lettre, le duel, ou les deux scènes du troisième acte. Le bal chez le Prince Grémine, superbement chorégraphié par Cooky Chiapalone avec ses figurants masqués, et le duo final qui montre un espace scénique quasiment dénudé à l’exception d’une chaise et de la froide brillance d’une immense lune projetée dans le fond.
Mais surtout, cette production est portée par une distribution homogène dans l’excellence. Du Monsieur Triquet d’Eric Vignau en muscadin de service qui se garde intelligemment de la caricature outrancière, en passant par la tendre et autoritaire Filipievna de Sophie Pondjiclis, ou la Madame Larina de Nona Javakhidze en noble terrienne, et jusqu’aux protagonistes, on est au meilleur niveau. Toutes les voix, sans exception, servent admirablement les personnages. Fleur Baron est une Olga de choix, tandis que la basse russe Andrey Valentiy en Prince Grémine, dont l'habit, pour une fois, ne ruisselle pas de chamarrures, est impérial dans son grand air de l’Acte III. Le Lenski de Pavel Valuzhin est un peu falot au premier acte mais le ténor gagne en épaisseur en fiancé jaloux qui demande réparation. Il signe un «Où donc avez-vous fui...» de très bonne tenue avant le duel. La soprano Natalya Pavlova a tous les attributs du rôle de Tatiana et son incarnation est tout à fait convaincante, passant de la jeune sotte énamourée à l’exaltation de la scène de la lettre, pour finir en bouleversante femme mûre dans le duo final. Le baryton polonais Simon Mechlinski est doté d’une voix immense, très musicale, au timbre rayonnant. Il incarne un Onéguine vibrant de justesse.
Dans ce concert de louanges on ne manquera pas de citer le Chœur de l’Opéra de Toulon, toujours aussi bien préparé par Christophe Bernollin, et l’orchestre maison dirigé par la jeune cheffe finlando-ukrainienne Dalia Stasevska qui reçoit une ovation marquée du public toulonnais. Sa direction est enthousiaste autant qu’appliquée et elle tire de cette somptueuse partition un son de grande qualité, particulièrement raffiné chez les cordes et le premier corniste.
Le public a bien évidemment reçu cette dernière production de la saison triomphalement avec d’interminables rappels.
L’Opéra de Toulon vient d’annoncer sa prochaine saison lyrique, mélange de genres musicaux variés qui permettra d’entendre et de voir Andrea Chénier, Into the Woods de Stephen Sondheim, Le Singe d’une nuit d’été de Gaston Serpette couplé avec Pomme d’Api d’Offenbach, Les Pêcheurs de perles, Le Comte Ory, la création française de South Pacific de Rodgers et Hammerstein et la saison 2019-2020 se terminera avec La Dame de Pique. Voilà qui promet.
Le site de l’Opéra de Toulon
Christian Dalzon
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