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Presque sans anicroche Paris Théâtre des Champs-Elysées 05/13/2019 - Ludwig van Beethoven : Egmont, opus 84: Ouverture
Jean Sibelius : Concerto pour violon en ré mineur, opus 47
Piotr Ilyitch Tchaïkovski : Symphonie n° 6 en si mineur, «Pathétique», opus 74 Vadim Repin (violon)
Philharmonia Orchestra, Paavo Järvi (direction)
P. Järvi (© Kaupo Kikkas)
Le Philharmonia fait partie des orchestres en résidence au Théâtre des Champs-Elysées où il vient au moins une fois par an pour un concert qui, ces dernières années, était toujours placé sous la direction de son directeur musical Esa-Pekka Salonen. L’année dernière, il était même venu au Festival de Saint-Denis pour jouer les Gurrelieder de Schoenberg. Cette année, c’est sous la baguette de Paavo Järvi qu’il investit un théâtre bien rempli, le public étant venu écouter un programme rassurant, des plus classiques tant sur le fond que sur la forme.
En ouverture, celle d’Egmont, l’une des plus connues de Beethoven avec celles de Coriolan et de Léonore III. Si l’on peut regretter ce léger manque d’audace (à quand, par exemple, l’ouverture Pour une fête ou La consécration de la maison), on aura tout de même pris un véritable plaisir à écouter une interprétation bouillonnante, pleine d’une énergie conquérante où l’orchestre s’illustra en tous points. Doté d’effectifs renforcés, le Philharmonia fut dirigé plus par un fouet que par une baguette, Paavo Järvi conduisant cette ouverture avec un vrai panache.
Après que Viktoria Mullova l’a donné au Royal Albert Hall de Londres deux jours plus tôt, c’est ce soir au tour de Vadim Repin de jouer le Concerto pour violon de Sibelius. D’emblée, l’orchestre s’affirme dans une forme excellente: l’entrée des cordes puis des vents obéit à une douceur incroyable dans laquelle s’insère le violon tout en réserve de Repin. Adoptant un jeu sans aucune effusion, parfois même trop sur la défensive, on remarque surtout une justesse vacillante dans laquelle on craint à quelques reprises de voir également apparaître une légère faiblesse technique: il n’y en eut point! Le violoniste russe est solide et déroule ce premier mouvement avec application, l’oreille étant néanmoins bien davantage attirée par certains passages orchestraux (la succession de l’alto solo, des violoncelles et des trois trombones) même si l’on regrettera une fin de mouvement sans la violence rageuse requise. L’Adagio di molto témoigne toujours de la parfaite entente entre le soliste et l’orchestre, Repin animant son jeu avec le troisième mouvement. L’attaque tellurique de l’orchestre et l’archet conquérant du soliste s’avèrent étrangement retenus, le soliste ne semblant pas toujours à son aise, la justesse se mettant de nouveau à faire des siennes. Le résultat, salué avec chaleur par le public, convainquit Repin de donner deux bis: Bach, encore et toujours (la Sarabande de la célèbre Deuxième Partita et l’Adagio de la Première Soante).
Autre monument du répertoire, symphonique cette fois-ci, la Symphonie «Pathétique» de Tchaïkovski aura bénéficié ce soir d’une magnifique interprétation. Paavo Järvi ne laisse rien au hasard, sa baguette imposant aux différents pupitres une vision des plus acérées où les couleurs et le drame de la partition sont véritablement transfigurés. Le premier mouvement bénéficie de cordes frénétiques (lors du tutti central) dont l’élan fut formidable, après une superbe introduction du basson, les bois étant globalement du plus haut niveau. Changement d’ambiance avec l’Allegro con grazia: langoureux au possible, les violoncelles nous emmènent sur un chemin haut en couleur, Järvi ayant tendance à privilégier les bois sur les cordes en plus d’une occasion, donnant ainsi quelques accents inattendus à une partition ô combien connue. Et pourtant, c’est une bonne partie de la salle qui applaudit après, il est vrai, un troisième mouvement enthousiasmant, plein d’une folle énergie, même si la fin s’est peut-être avérée plus martiale que véritablement fougueuse. Le temps de reprendre ses esprits et l’orchestre entama rapidement le Finale. Adagio lamentoso avec des cordes aux sonorités profondes qui ne nous lâchèrent qu’aux toutes dernières notes: une interprétation parfois originale mais, à coup sûr, des plus convaincantes.
Le site de Paavo Järvi
Le site de Vadim Repin
Le site de l’Orchestre Philharmonia
Sébastien Gauthier
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