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Le genre de la maison Liège Opéra royal de Wallonie 02/26/2019 - et 28 février, 1er, 3*, 5, 7, 9, 10, 12, 14 mars 2019 Giuseppe Verdi: Aida Elaine Alvarez*/Donata D’Annunzio Lombardi (Aida), Marcello Giordani*/Gianluca Terranova (Radamès), Nino Surguladze*/Marianne Cornetti (Amneris), Lionel Lhote (Amonasro), Luca Dall’Amico (Ramfis), Luciano Montanaro (Il Re), Tineke Van Ingelgem (La sacerdotessa), Maxime Melnik (Un messaggero)
Chœurs de l’Opéra royal de Wallonie, Pierre Iodice (chef des chœurs), Orchestre de l’Opéra royal de Wallonie, Speranza Scappucci (direction musicale)
Stefano Mazzonis di Pralafera (mise en scène), Jean-Guy Lecat (décors), Fernand Ruiz (costumes), Franco Marri (lumières), Michèle Anne De Mey (chorégraphie)
(© Opéra royal de Wallonie-Liège)
Encore une Aïda (1871) ? Eh oui. Cinq ans après la précédente série de représentations, l’Opéra royal de Wallonie en monte une nouvelle production, alors que d’autres opéras de Verdi n’ont plus été programmés depuis longtemps, comme Falstaff ou Un bal masqué, sans citer des titres plus rares comme I Masnadieri ou Les Vêpres siciliennes. Voilà un bel exemple de titre capable à lui tout seul d’attirer un très large public, avec pas moins de dix représentations, le double du nombre habituel – de quoi remplir abondamment le tiroir-caisse.
Que vaut la mise en scène de Stefano Mazzonis di Pralafera ? Le directeur général et artistique reste fidèle à sa conception traditionnelle, voire passéiste, de l’opéra. Très respectueux du texte et de la musique, il développe une approche scénique littérale, pour ne pas dire naïve, pour conter le destin tragique d’Aïda et de Radamès. Le positionnement géographique et historique de la scénographie ne laisse absolument aucune place au doute, avec des décors et des costumes qu’Auguste Mariette n’aurait pas reniés. La direction d’acteur, quand elle existe, se réduit au strict minimum, ce qui rend cette Aïda à la longue monotone, mais cette mise en scène conjugue efficacement les dimensions intimiste et monumentale de l’œuvre, tandis que la chorégraphie de Michèle Anne De Mey, qui collabore pour la première fois avec l’institution liégeoise, anime de stimulante manière les pages de ballet. Et pour une fois, à défaut de contenir des idées fortes ou originales, ce spectacle imaginé par le maître des lieux ne souffre pas d’élément incongru de mauvais goût, à l’exception, par moments, du bruit de la machinerie lors des changements de décor, à peine couvert par l’orchestre. Cette mise en scène, qui met en valeur le travail considérable des ateliers, possède de quoi devenir un classique de la maison, destiné à être repris.
La distribution, double pour les trois rôles principaux, laisse une impression mitigée. En dépit d’une tessiture adéquate, Elaine Alvarez délivre dans le rôle-titre une prestation instable et peu raffinée, avec une émission déplaisante et une ligne de chant décousue. La soprano, qui semble parfois à la limite de ses moyens, possède assurément une voix puissante, mais elle ne la canalise pas toujours bien. Le Radamès fatigué et terne de Marcello Giordani peine à exister. La sincérité de l’engagement de l’artiste ne compense pas les lacunes de la prestation vocale, malgré une certaine vaillance, un constat qui s’applique également à sa partenaire. Le spectacle se conclut ainsi sur un piteux duo, ce qui pose question sur la capacité de l’Opéra royal de Wallonie d’engager pour toute une saison – et celle en cours est particulièrement ambitieuse – des chanteurs suffisamment armés pour affronter avec pertinence et éclat les opéras qu’il a la prétention de monter. A quoi devons-nous nous attendre pour Les Puritains en juin ?
En l’absence d’une Aïda et d’un Radamès mémorables, il faut saluer l’incarnation convaincante et le chant de qualité de Nino Surguladze, distribuée en Amneris, dont la mezzo-soprano possède assurément la carrure et la voix. L’apparition de Lionel Lhote en Amonasro constitue un véritable soulagement : enfin un chant soigné et de grande école, auquel s’ajoute une composition juste et subtile du personnage. Les autres chanteurs ne parviennent pas à équilibrer le plateau : Luca Dall’Amico manque quelque peu de prestance et de mordant en Ramfis, Luciano Montanaro campe un Roi vocalement sommaire, l’intervention de Tineke Van Ingelgem et de Maxime Melnik se remarque à peine.
Dans la fosse, Speranza Scappucci confirme la solidité de son métier. Sous sa direction compétente et inspirée, l’orchestre sonne, le plus souvent, avec plénitude et se montre vif et intense, avec ce qu’il faut de nuances et de raffinement. Le chef veille à la cohérence des tempi et à la netteté des contrastes, en dépit d’une balance pas toujours optimale avec le plateau où les chanteurs tendent souvent à forcer leur voix. Enfin, le spectacle tire bénéfice des choristes, rigoureusement préparés par Pierre Iodice.
Le spectacle en intégralité sur le site Culturebox:
Sébastien Foucart
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