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Sauvé par le pianiste Vienna Konzerthaus 01/11/2019 - Antonín Dvorák: Concerto pour piano, opus 33 – Zlatý kolovrat, opus 109 Stephen Hough (piano)
Wiener Symphoniker, Alan Gilbert (direction)
S. Hough (© Christian Steiner)
Inspiré par une initiative de Cleveland, ainsi que nous l’avait confié Matthias Naske, «Fridays@7» propose une formule de concert fondée sur un programme plus court (format CD pourrait-on dire), sans pause, et se concluant en bœuf musical, le verre à la main, autour des musiciens rassemblés dans le hall d’entrée du Konzerthaus.
Alan Gilbert entame avec ce concert un mini-cycle de musique tchèque à la tête des Wiener Symphoniker: Dvorák, avant tout, mais aussi Martinů et Janácek. La fibre dvorákienne du chef n’est malheureusement pas apparente ce soir: le premier mouvement du Concerto pour piano peine à trouver son tempo, Gilbert semblant en permanence pousser l’orchestre à avancer; les phrasés sont souvent brisés par des dynamiques trop fabriquées ou monosémiques, responsables d’un second thème évoquant une chasse aux papillons plutôt qu’une danse slave: les entrées sont parfois insuffisamment assurées, ou bien manquent de finition. Stephen Hough en revanche imprime une intensité compacte à sa partie; en contraste avec la précipitation de l’orchestre, il cherche à élargir le propos, et derrière un semblant d’introversion exprime en fait une fantaisie à fleur de peau, mettant en valeur les petites étrangetés, rythmes ou couleurs inattendus, qui parsèment la musique. Changement radical avec le deuxième mouvement, qui parvient à créer une atmosphère convaincante, le caractère méditatif se maintenant durant la montée dramatique; le soliste trouve lui le juste équilibre poétique, évitant tout sentimentalisme et continuant à minutieusement irriguer la partition de détails surprenants. L’Allegro con fuoco retombe à nouveau dans les travers du premier mouvement.
Pas de miracle dans l’interprétation du poème symphonique Le Rouet d’or: si la mise en place est bonne, la motorique imposée par Alan Gilbert tend une fois de plus à raboter le lyrisme de la partition, et échoue à créer la variété d’ambiances qui transformerait les répétitions de l’œuvre en progression dramatique. Prenons la première phrase des violons, qui pourrait sonner comme une grande ligne vibrante et passionnée, contrastant avec l’inflexibilité rythmique de l’accompagnement spiccato: elle est ici rendue avec dureté et sécheresse. Les chorals de la section centrale sont lourds, avec un tuba qui prend le dessus, et le final s’achève avec le raffinement d’une fanfare militaire.
La seconde mi-temps permettait de retrouver, sur une scène convivialement érigée au pied de la statue de Beethoven du hall d’entrée, Stephen Hough, dans deux courtes pièces – dont une de ses compositions, démontrant une fois encore la discrète fantaisie de l’interprète. Le Geremus Jazz Trio, composé en partie de musiciens de l’orchestre, mettait fin à la soirée, rejoint par la jeune Allegra Tinnefeld (13 ans!), aussi capable au violon que de la voix.
Dimitri Finker
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