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Le Barbier de Fleet Street Zurich
Opernhaus
12/09/2018 - et 13, 16, 21, 23*, 28, 30 décembre 2018, 2, 5, 11 janvier 2019
Stephen Sondheim : Sweeney Todd
Bryn Terfel (Sweeney Todd), Angelika Kirchschlager (Mrs. Lovett), Elliot Madore (Anthony Hope), Liliana Nikiteanu (Beggar Woman), Brindley Sherratt (Judge Turpin), Iain Milne (The Beadle), Mélissa Petit (Johanna), Spencer Lang (Tobias Ragg), Barry Banks (Pirelli), Cheyne Davidson (Jonas Fogg), Justyna Bluj, Asahi Wada (Ladies), Richard Walshe, Dean Murphy, Jamez McCorkle, Thobela Ntshanyana, Leonardo Sanchez (Men)
Chor der Oper Zürich, Janko Kastelic (préparation), Philharmonia Zürich, David Charles Abell (direction musicale)
Andreas Homoki (mise en scène), Michael Levine (décors), Annemarie Woods (costumes), Franck Evin (lumières), Arturo Gama (chorégraphie), Beate Breidenbach (dramaturgie)
(© Monika Rittershaus)
Sweeney Todd de Stephen Sondheim a été créé à Broadway en 1979 et représenté à Londres une année plus tard. La comédie musicale a aussi raflé huit Tony Awards et a été immortalisée à l’écran par Tim Burton en 2007, avec Johnny Depp dans le rôle du barbier démoniaque de Fleet Street et Helena Bonham Carter dans celui de sa complice Mrs. Lovett. Si l’ouvrage n’a jamais connu la renommée de Cats ou du Fantôme de l’Opéra par exemple, c’est sûrement en raison de l’absence dans la partition d’airs que le public peut fredonner facilement. Le livret raconte l’histoire d’un barbier qui revient à Londres après avoir été exilé pendant quinze ans parce qu’un juge a voulu l’éloigner pour mieux séduire sa ravissante épouse. Le barbier n’a qu’une idée en tête : se venger. Pour se faire, il assassine ses clients avec son rasoir tandis que sa complice, Mrs. Lovett, se débarrasse des corps en les utilisant pour garnir ses tourtes à la viande.
Le metteur en scène, et par ailleurs directeur de l’Opernhaus de Zurich, Andreas Homoki a conçu un spectacle sombre, macabre et sanglant, à des années lumières des paillettes et des clichés de la comédie musicale. Une production sobre aussi, réalisée avec peu de moyens, reposant pour l’essentiel sur les épaules et le talent des chanteurs. L’action se déroule à l’intérieur d’un grand cadre noir bordé d’ampoules électriques, dans un fonds gris. Impassible, le barbier tranche la gorge de ses victimes avec calme, le sang gicle puis coule à flots, les malheureux clients basculant ensuite en arrière pour atterrir la tête la première au sous-sol, où les attend Mrs. Lovett. Glaçant.
Bryn Terfel trouve en Sweeney Todd un de ses plus grands rôles. Il incarne avec brio un barbier déterminé à se venger du juge qui lui a volé sa jeunesse et sa femme. S’il sait se faire tendre et passionné dans les passages où il chante son amour perdu, il devient un psychopathe enragé et violent, hurlant sa douleur et sa fureur lorsqu’il élabore son plan sanglant. Un portrait saisissant. En Mrs. Lovett, Angelika Kirchschlager ne lui cède en rien, incarnant avec beaucoup d’humour et d’intensité une femme sans aucun scrupule mais ingénue et touchante, qui finit par tomber amoureuse de Sweeney Todd. L’entente et la complicité entre les deux interprètes principaux font plaisir à voir et à entendre. On retiendra aussi Elliott Madore dans le rôle du jeune marin qui tombe amoureux de la fille du barbier et Brindley Sherratt en juge Turpin austère et sans aucune émotion. Dans la fosse, David Charles Abell offre une lecture vive et alerte, mais pas aussi tranchante que la lame de Sweeney Todd. A coup sûr, les spectateurs qui se rendront chez leur barbier après avoir vu la production ressentiront un petit frisson à la vue du rasoir...
Claudio Poloni
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