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Baguette ardente

Vienna
Musikverein
12/08/2018 -  et 13 décembre 2018
Rudi Stephan: Musik für Orchester [n° 1]
Richard Strauss: Metamorphosen, TrV 290
Johannes Brahms: Symphonie n° 4, opus 98

Wiener Philharmoniker, Kirill Petrenko (direction)


K. Petrenko (© Wilfried Hösl)


Ce troisième concert d’abonnement de la saison appelait un mélange de curiosité et d’excitation: Kirill Petrenko n’est certes pas un inconnu à Vienne, d’une part en tant qu’ancien élève de l’université de musique, d’autre part du fait de son poste de Kapellmeister au Volksoper dans les années 1990; les apparitions du futur chef des Berliner ont cependant été rares dans la capitale autrichienne. Cette dernière décennie on ne compte, semble-t-il, qu’une unique venue au Staatsoper, suivie d’un concert à la tête des Philharmoniker.


Le ton est donné dès les premières mesures de la Musique pour orchestre (1910) de Rudi Stefan: un son dense, étincelant, tirant vers les basses, porté par une homogénéité sans faille des cordes et une grandiose rythmique, s’échappe des pupitres. Les séquences s’enchaînent avec une rigueur imparable, autorisant des changements d’éclairages radicaux sans rupture logique. On reconnaît l’expérience de la fosse lors du développement fugué, lorsque le chef russe parvient à concéder l’espace expressif nécessaire aux solistes sans dénaturer la partition. Une interprétation qui redonne toute sa dimension à l’œuvre relativement inconnue de ce compositeur précocement disparu, âgé d’à peine 28 ans, lors de la Première Guerre mondiale.


La scène se vide temporairement, le temps de reconfigurer les pupitres pour les vingt-trois solistes prenant part à la magistrale étude straussienne Métamorphoses; un tempo plutôt allant irrigue la musique, la rendant soudain respirable, guidant avec cohérence les glissements harmoniques et appuyant sur les dissonances. Le final est en particulier remarquable, donnant l’impression de lâcher prise, raréfiant la musique pour laisser place à un doux désespoir.


La Quatrième Symphonie de Brahms commence de manière plus indécise: tout se passe comme si le chef avait décidé de laisser les musiciens reprendre la main, avec une direction minimaliste se bornant à aux relances. Il en résulte certains (discrets) flottements, ainsi qu’une perte d’homogénéité qui ne disparaît tout à fait que lors de la réexposition. Les mouvements qui suivent montent inexorablement en intensité: un Andante moderato tout en souplesse, qui dessine les contours des phrases de la petite harmonie, en parfait équilibre au-dessus des pizzicati des cordes; un Allegro giocoso qui juxtapose avec nervosité des blocs aux atmosphères radicales; et une conclusion flamboyante qui développe un son plein, moins viennois et aérien qu’à l’ordinaire, incandescent comme des braises.


Le concert tient non seulement toutes ses promesses, délivrant aux auditeurs une expérience fascinante, mais suggère une marge de progression supplémentaire, Kirill Petrenko laissant entrevoir une réserve d’idées sous sa baguette qui nécessiteraient une collaboration de plus long terme pour pleinement s’exprimer.



Dimitri Finker

 

 

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