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Quand la Corée donne une leçon de musique

Paris
Maison de la radio
12/01/2018 -  et 22, 23 (Séoul), 25 (Genève) 27 (Udine), 30 (Grenoble) novembre 2018
Isang Yun : Muak
Ludwig van Beethoven : Concerto pour piano et orchestre n° 5 «L’Empereur», opus 73
Hector Berlioz : Symphonie fantastique, opus 14

Sunwook Kim (piano)
Orchestre philharmonique de Séoul, Thierry Fischer (direction)


T. Fischer (© Marco Borggreve)


L’Orchestre philharmonique de Séoul (fondé en 1945), pour sa première apparition parisienne, est dirigé par le suisse Thierry Fischer, principal chef invité depuis 2017. La formation, précédée d’une discographie flatteuse sous étiquette Deutsche Grammophon (devenant ainsi le premier orchestre asiatique à signer un contrat d’exclusivité avec le label jaune), vécut une véritable renaissance en 2005 sous la férule de Myung-Whun Chung, son précédent directeur musical.


Parlons franc: on espérait une autre symphonie que la Fantastique, cheval de bataille des deux orchestres maison. Mais par-delà l’hommage adressé à la France, le Philharmonique de Séoul a su se montrer particulièrement persuasif sous la direction ferme sans être coercitive de Thierry Fischer: l’étagement des pupitres, le dosage des forces en présence que Berlioz se plaît à bousculer, conservent un équilibre de tous les instants. Particulièrement savoureuses, les cordes se caractérisent par leur cohésion et leur soyeux, quand la petite harmonie (hautbois solo, petite clarinette) entraîne sans fléchir ses respectables collègues dans les tourbillons de la «Nuit de Sabbat». Parmi les cheveux d’un noir de jais, se distingue la crinière argentée du timbalier – une silhouette familière des mélomanes: il s’agit du légendaire Marinus Komst, ex-percussionniste du Concertgebouw d’Amsterdam qui, alternant baguettes de bois et baguettes de feutre, fait assaut de merveilles, notamment dans le tonnerre de la «Scène aux champs».


La première partie affichait la «fantaisie pour grand orchestre» Muak (1978) d’Isang Yun (1917-1995), inspirée par la musique ancienne en vigueur à la cour en Chine et en Corée. «Yun a composé Muak à partir de son impression de cette Danse des rossignols, tout en alternant la musique asiatique et la musique occidentale», précise Dong-Jun Kim dans les notes de programme. L’orchestration privilégie l’individualisation des pupitres (ostinato des percussions, trilles des vents, continuum de cordes) et les doublures qui accrochent l’oreille. Quant aux profils mélodiques, ils évoluent à l’image des lignes souples de la calligraphie orientale.


Textures moelleuses, relais chambristes entre les instruments, dynamiques enrobées, phrasés mozartiens: les amateurs de décibels en seront pour leur frais! Il faut dire que l’art subtil de Sunwook Kim s’accommode particulièrement bien des volumes harmonieux comme de la connivence entre scène et public que favorise l’Auditorium de la Maison de la Radio. Aussi sa lecture de L’Empereur s’adresse-t-elle moins aux foules qu’à chacun en particulier, même si le son conserve sa plénitude et sa projection. Ce piano fluide et lyrique, joué avec des coussins sous les doigts, met en exergue la veine mélodique du génie beethovenien. Certes, il est des finals plus fougueux et des envolées plus sanguines; mais rarement l’Adagio, secondé par un tapis de soie aux cordes, n’aura adopté un tel ton de confidence. En bis, l’Impromptu en sol bémol de Schubert, comme chuchoté, suffirait à prouver que Sunwook Kim est bien plus qu’un pianiste: un authentique musicien. Un bonheur réitérable grâce au disque, puisque Kim a enregistré ce concerto aux côtés de Myung-Whun Chung et de la phalange coréenne.



Jérémie Bigorie

 

 

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