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Evian donne de la voix Evian
Grange au Lac
10/29/2018 -
Pablo Luna, Maurice Ravel, Hector Berlioz, Enrique Granados, Georg Friedrich Haendel, Gioacchino Rossini : airs
Joyce DiDonato (mezzo-soprano), Craig Terry (piano) 
(© Studio J’adore ce que vous faites)
Le lancement d’une nouvelle manifestation musicale est toujours un événement exaltant et riche en promesses. C’est ce qu’ont dû se dire tous les mélomanes qui se sont donné rendez-vous à Evian le week-end dernier pour assister à la naissance de « Voix d’automne », nouveau festival lyrique de la petite cité thermale. Le projet a été conçu en collaboration avec l’Opéra de Paris et son Académie : trois jours durant, de jeunes chanteurs se sont produits sur la scène de la Grange au Lac, la superbe salle construite entièrement en bois et située dans le parc aux arbres centenaires de l’Hôtel Royal, juste au-dessus du Léman. Ils ont pu démontrer – certains avec plus de bonheur que d’autres, il faut bien le reconnaître – toute l’étendue de leur talent dans des airs d’opéra et des lieder. A-t-on assisté à l’envol de belles carrières ? Seul l’avenir le dira, mais on ne serait guère étonné de retrouver à l’avenir quelques noms sur les affiches des grands théâtres lyriques.
Après les promesses, le talent confirmé : le festival « Voix d’automne » s’est terminé en apothéose par un magnifique récital de Joyce DiDonato. Accompagnée au piano par Craig Terry, partenaire attentif et délicat, la célèbre mezzo-soprano a conquis le nombreux public présent par sa voix ductile et opulente, riche en couleurs et en nuances, ses graves sonores et corsés, ainsi que par son timbre puissamment projeté. Deux moments particulièrement forts ont marqué la soirée : en première partie, l’air « Adieu, fière cité » des Troyens de Berlioz. La chanteuse s’est glissée sans peine dans le personnage de la reine Didon (il faut dire qu’elle interprète en ce moment le rôle à l’Opéra de Vienne) pour en dresser un portrait somptueux, alternant autorité et majesté avec passion et désespoir. En seconde partie, le « Lascia ch’io pianga » de Haendel (Rinaldo), chanté tout en retenue et dans un souffle de voix, a donné des frissons aux spectateurs. Le récital n’aurait pas pu se terminer autrement qu’avec Rossini, un des compositeurs fétiches de Joyce DiDonato : le « Tanti affetti » de La donna del lago a été un véritable feu d’artifice vocal. La chanteuse a aussi su tenir la salle en haleine grâce à ses interventions, tantôt en français, tantôt en anglais, entre chaque air, n’oubliant pas d’encourager chaleureusement les jeunes chanteurs de l’Académie présents parmi le public.
Le festival « Voix d’automne » vient judicieusement compléter l’offre musicale d’Evian, en apportant à la programmation la dimension lyrique qui lui manquait jusqu’ici. Après le nouvel élan donné aux « Rencontres musicales » (juin-juillet) depuis quatre ans, le lancement d’un festival de piano (« Printemps de la Grange ») en mai et la naissance d’un orchestre symphonique « maison » (Sinfonia Grange au Lac), sans parler d’un festival de jazz en novembre, la Grange au Lac devient le point névralgique des activités musicales de la région, qui s’étendent désormais sur l’année entière. Evian est en voie de devenir un centre musical de premier plan.
Claudio Poloni
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