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Trop spectaculaire Lyon Opéra 10/11/2018 - et 13*, 15, 17, 19, 21, 23 octobre 2018 Arrigo Boito : Mefistofele John Relyea (Mefistofele), Paul Groves (Faust), Peter Kirk (Wagner, Nereo), Evgenia Muraveva (Margherita, Elena), Agata Schmidt (Marta, Pantalis)
Chœurs de l’Opéra de Lyon, Johannes Knecht (chef des chœurs), Maîtrise de l’Opéra de Lyon, Karine Locatelli (chef de chœur), Orchestre l’Opéra de Lyon, Daniele Rustioni (direction musicale)
Alex Ollé/La Fura dels Baus (mise en scène), Alfons Flores (décors), Lluc Castells (costumes), Urs Schönebaum (lumières)
(© Jean-Louis Fernandez)
Mefistofele serait-il en passe de perdre son statut de rareté du répertoire lyrique? En France, le voici pour une deuxième fois à l’affiche en quelques mois, à l’Opéra de Lyon après les récentes Chorégies d’Orange.
Arrigo Boito (1842-1918) est surtout connu comme une des librettistes majeurs de Giuseppe Verdi pour qui il a rédigé la seconde version de Simon Boccanegra, Othello, et Falstaff ainsi que d’Amilcare Ponchielli pour La Gioconda. Son opéra d’après Goethe a ceci de remarquable et d’unique qu’il s’inspire des deux parties du Faust et qu’il met l’accent sur le personnage de Méphistophélès. Alex Ollé et le collectif catalan La Fura dels Baus complètent, avec ce Mefistofele coproduit avec le Staatstheater de Stuttgart, un parcours dédié au mythe faustien qui passe par les deux grandes œuvres lyriques de Berlioz (La Damnation de Faust à Salzbourg) et de Gounod (Faust à Amsterdam et Madrid), l’adaptation de Stravinski (L’Histoire du soldat à Lyon) ainsi que par le théâtre et le cinéma avec respectivement F@ust3.0 et Faust 5.0.
Le «furet» catalan semble s’être un peu fourvoyé dans cette entreprise. Alors qu’Orange avait joué la clarté du premier degré pour faire découvrir l’œuvre, Alex Ollé perd le public dans une scénographie spectaculaire (Alfons Flores) et une mise en scène qui, mélangeant genres et époques, rend l’action illisible et noie dans des espaces immenses, les banalisant, les quelques moments d’intimité qui sont la force de cette partition touffue et inégale. Quelques scènes, comme le sabbat de Walpurgis, y gagnent en spectaculaire, en grande partie grâce aux éclairages virtuoses d’Urs Schönebaum. D’autres, comme le jardin transformé en cabaret ou la descente aux enfers de Marguerite sur une chaise électrique, sont ridiculisés. La technologie du décor tout à fait extraordinaire avec ses doubles fonds en miroir, ses niveaux multiples escamotables et de grands escaliers façon échafaudages, permet un déploiement spectaculaire des choristes et figurants mais perd le regard du spectateur et le déconcentre du fil de l’action et sur la musique. Alex Ollé, avec une direction d’acteurs rudimentaire, n’a pas retrouvé l’équilibre fragile entre musique et grand spectacle qui avait fait en 1997 le succès de sa Damnation de Faust salzbourgeoise.
Musicalement, c’est une belle réussite avec un Orchestre de l’Opéra de Lyon très inspiré dramatiquement sous la direction de Daniele Rustioni, qui enrichit progressivement le volet italien du répertoire de ce théâtre. Magnifiques, les Chœurs et la Maîtrise maison dans cette œuvre qui leur fait la part si belle. John Relyea est un Mefistofele imposant à la voix pleine et aux graves puissants; si son physique en impose, il perd cependant de sa crédibilité dramatique, dilué qu’il est dans l’imposant dispositif. Paul Groves l’est encore plus, d’autant qu’il n’a pas ou plus les moyens requis pour les deux premiers actes de l’œuvre. Evgenia Muraveva est une touchante Marguerite aux moyens étincelants mais qui prend de curieuses libertés avec la partition notamment dans l’air «L’altra notte in fondo al mar», immortalisé par Maria Callas. Très remarquables aussi les seconds rôles, la Marthe d’Agata Schmidt et surtout le Wagner de Peter Kirk.
Olivier Brunel
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