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Hommage involontaire au «Sommeil» d’Atys

Versailles
Opéra royal
10/02/2018 -  et 27 septembre 2018 (Metz)
«Les compositeurs de Louis XIV»
Marin Marais: Alcyone: Ouverture & Airs des matelots – Ariane et Bacchus: «Croirai-je, juste ciel!», Sommeil & Entrée pour les Démons (rondeau)
Louis de Lully: Orphée: «Ah que j’éprouve bien»
André Campra: Idoménée: Chaconne «Espoir des malheureux» – L’Europe Galante: «Mes yeux...» – Télèphe: Sarabande «Soleil, dans ta vaste carrière...» & Sarabande «Quelle épaisse vapeur»
Jean-Baptiste Lully: Acis et Galatée: «Qu’une injuste fierté» – Atys: Ouverture – Psyché: «Deh piangete» – Le Bourgeois gentilhomme: Marche pour la cérémonie des Turcs
Pascal Colasse: Les Saisons: Plainte de Zéphyr
Henri Desmarets: Circé: «Sombres marais du Styx»
Marc-Antoine Charpentier: Le Malade imaginaire: Ouverture
André Cardinal Destouches: Amadis de Grèce: Ouverture
Michel Pignolet de Montéclair: Les Fêtes de l’été: «Mais, tout parle d’amour»
Jean-Baptiste Stuck: Polydore: «C’en est donc fait»

Katherine Watson (soprano)
Les Ambassadeurs, Alexis Kossenko (direction)


K. Watson


Si l’on explore la vie musicale en France, la seconde partie du XVIIe siècle fut évidemment marquée par l’hégémonie de Jean-Baptiste Lully (1632-1687) et du style français dans toute sa splendeur: mais c’était sans compter la multiplicité des talents qui ne demandaient qu’à s’affirmer davantage et à explorer des voies qui n’avaient encore guère été empruntées. Pour ce concert, Alexis Kossenko, flûtiste émérite au sein de divers ensembles (Le Concert Spirituel, l’Orchestre des Champs-Elysées...) et par ailleurs chef de l’excellent ensemble des Ambassadeurs, a donc choisi de mettre à l’honneur plusieurs compositeurs qui, après la mort de Lully et avant la suprématie de Rameau, ont également fait montre de leurs indéniables talents, des célèbres Campra ou Marais aux figures moins connues comme Destouches ou Stuck.


Si l’idée était bonne et tous les éléments réunis pour l’accomplir (une chanteuse rompue à ce répertoire, passée par l’école William Christie via Le Jardin des voix et Les Arts Florissants, et un orchestre du plus haut niveau), le résultat ne fut guère à la hauteur de nos attentes, le concert se caractérisant par une étonnante monochromie qui suscita en fin de compte un certain ennui, le public n’ayant d’ailleurs pas applaudi avec la ferveur qu’on a pu lui connaître en ce même lieu, en maintes occasions. Si l’Ouverture d’Alcyone laissait augurer un orchestre vif et coloré, la plupart de ses interventions, dictées il est vrai par le choix des pièces chantées, donna une impression assez terne. Même si l’on a apprécié la longueur d’archet et le soin avec lesquelles les basses appuyaient leurs interventions dans Orphée, l’incroyable dextérité des cordes (notamment des basses de violon) dans Circé ou l’interprétation extrêmement riche de ces motifs fugués aux accents haendéliens dans Polydore, l’accompagnement souvent minimaliste ainsi que l’interprétation de passages enlevés parurent presque besogneux. Où était l’élan dans les «Airs des matelots»? Où était la truculence dans la célébrissime «Marche pour la cérémonie des Turcs»? Ne déméritant pas à la direction, Alexis Kossenko (qui, en plusieurs occasions, revient à ses premières amours en jouant de la flûte dans Ariane et Bacchus ou Les Fêtes de l’été, usant même de la flûte à bec basse dans le très beau «Sommeil» de Marin Marais) nous a parfois semblé peiner à relancer la machine mais, comme on l’a déjà signalé, n’était-ce pas la faute au choix des pièces chantées?


Car si elles assurèrent ainsi une certaine homogénéité stylistique, elles se résumèrent bien souvent aux déplorations et soupirs alors que les opéras de cette époque connaissent également les tourments, les colères, les emportements... auxquels nous n’aurons guère eu droit ce soir. Dotée d’une voix assez éthérée mais d’une prononciation de la langue française excellente, Katherine Watson ne bénéficie pas toujours d’une projection adéquate et, surtout, d’une palette d’émotions suffisamment large: là encore, l’ensemble de son interprétation s’avéra quelque peu monochrome. Certains extraits furent néanmoins superbes à commencer par celui qui conclut ce concert, d’un certain Jean-Baptiste Stuck (1680-1755), surtout connu pour avoir été un violoncelliste virtuose et avoir introduit cet instrument dans l’Orchestre de l’Académie royale de musique: l’extrait de Polydore (1720) fut magnifique, la jeune cantatrice s’emportant au fil de l’air, poussée en cela par un orchestre dont le jeu tendait à traduire avec exactitude l’urgence du chant. Sachant tout de même varier son registre (dans Idoménée de Campra ou le superbe «Sombres marais du Styx» tiré de Circé de Desmarets), Katherine Watson fut tout de même étonnamment absente dans des airs qui auraient mérité davantage d’implication. Très bien chanté pourtant, le célèbre air «Deh piangete» issu de Psyché de Lully aurait gagné à être plus poignant, plus théâtral; de même pour l’air d’Acis et Galatée où l’on n’a pas suffisamment senti les tourments que devrait éprouver selon nous l’héroïne. En plus d’une occasion, la finesse et la pudeur auront été confondues avec une certaine neutralité qui aura conféré à ce concert une teinte globalement diaphane là où l’on attendait davantage de couleurs, comme on savait pourtant en donner au cours du Grand Siècle.


Reste enfin à voir ce que donnera ce récital au disque puisque le projet est en cours, permettant ainsi de faire connaître au public ces pages qui, pour la plupart inconnues, ont été exhumées par le Centre de musique baroque de Versailles.

Le site d’Alexis Kossenko
Le site de Katherine Watson
Le site des Ambassadeurs



Sébastien Gauthier

 

 

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