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Incursion en Mayenne

Le Mans
Meslay-du-Maine (Eglise Saint-Pierre et Saint-Paul)
08/23/2018 -  
André Cardinal Destouches et Michel-Richard de Lalande : Les Eléments
Hasnaa Bennani (Doris, Emilie, Junon), Eugénie Lefebvre (Vénus, Leucosie, Une Heure, Une vestale), Etienne Bazola (Le Destin, Neptune, Valère, Un berger)
Les Surprises, Louis-Noël Bestion de Camboulas (clavecin et direction)


E. Lefebvre, H. Bennani, L.-N. Bestion de Camboulas, E. Bazola
(© Sébastien Gauthier)



Bien que située dans le département de la Mayenne et non de la Sarthe, il fallait bien une église suffisamment grande pour accueillir l’ensemble Les Surprises qui, dans la droite ligne de la thématique du Festival de Sablé cette année, donnait Les Eléments, opéra-ballet en un Prologue et quatre Entrées illustrant tour à tour l’Air, l’Eau, le Feu et la Terre. Si Michel-Richard de Lalande (1657-1726) a écrit la musique du Prologue (en vérité, il a vraisemblablement participé à la composition de la partition tout entière), c’est surtout à André Cardinal Destouches (1672-1749) que l’on doit cette œuvre assez célèbre pour avoir notamment vu le jeune Louis XV danser sur ce ballet lors de sa création au Palais des Tuileries, le 31 décembre 1721. Plusieurs fois remanié (notamment à l’occasion de sa représentation à l’Académie royale de musique en 1725 lorsque la partie «La Terre», qui n’existait pas initialement, remplaça l’épilogue), l’ouvrage, inspiré notamment des Métamorphoses d’Ovide, a très tôt été présenté «comme un Sujet capable de varier le Spectacle & la Mufique, & l’on a conçu que des Intrigues féparées devoient moins fatiguer l’attention qu’un [sic] Pièce de plufieurs Actes, & qu’elles amenoient les Divertiffements avec plus de facilité» (Recueil général des opéras, Ballard, 1734).


Au fil d’un Prologue illustrant «Le Chaos», les trois chanteurs et le petit orchestre excellemment dirigé par Louis-Noël Bestion de Camboulas nous emmenèrent successivement dans le Palais de Neptune («L’Eau»), dans celui de Junon («L’Air»), dans le vestibule du temple de Vesta («Le Feu») et dans les jardins fruitiers de Pomone («La Terre»). Etienne Bazola est excellent. Doté d’un timbre chaud et d’une prononciation parfaitement intelligible (ce qui n’est malheureusement pas toujours le cas pour les chanteurs français), il incarne notamment un très touchant Valère, un tempétueux Neptune et surtout un Berger plein de finesse et de poésie avec le très bel air plein de réserve et de retenue «O Nuit, déploie ici tes voiles les plus sombres», air d’ailleurs tiré d’Amadis de Grèce, tragédie lyrique que Destouches avait composée en 1699 sur un livret du célèbre Antoine Houdar de La Motte. Eugénie Lefebvre a l’assurance de ses rôles, y met force et caractère, mais ses aigus lui échappent à plusieurs reprises (elle est bien plus convaincante dans le medium) et la voix s’avère malheureusement souvent trop dure; c’est dommage car son français se comprend parfaitement et elle investit chacun de ses rôles avec une vraie conviction. La relative brutalité de son chant s’estompe néanmoins en plusieurs occasions, notamment dans le cadre de ses duos avec Hasnaa Bennani. Cette dernière, que l’on a pu croiser au fil de plusieurs spectacles (voir ici et ici) et d’un récital prometteur sans être totalement convaincant consacré à Händel, possède une très belle palette en termes d’émotion même si le chant semble parfois un peu lisse, enrichie par un éventail de nuances des plus subtiles – quels pianissimi parfois!; on regrette donc d’autant plus une prononciation trop peu souvent intelligible, l’auditeur devant en plus d’une occasion se référer au programme s’il souhaitait comprendre ce qui était chanté devant lui.


Si donc le plateau vocal (féminin en tout cas) ne tenait pas toujours ses promesses, on ne peut en revanche que tresser des louanges à l’orchestre des Surprises. Handicapé par deux changements de dernière minute ayant notamment conduit à confier le premier violon solo au titulaire initial du second violon (qui fut irréprochable), le petit orchestre brille se pare de mille couleurs grâce notamment à des bois d’une vélocité à toute épreuve. Citons à ce titre Xavier Miquel au hautbois, Lucile Tessier (alternant basson et flûte) et les excellents Sandra Latour et Matthieu Bertaud aux flûtes (la première tenant généralement le traverso tandis que le second jouait plusieurs flûtes à bec), qui instillèrent en particulier un très beau climat au début de «L’Eau» et de «L’Air». L’œuvre faisant appel à tout le panel de danses que pouvaient alors compter les opéras de l’époque (musette, chaconne, marche, sarabande, menuet...), Louis-Noël Bestion de Camboulas dirigea avec beaucoup d’attention l’ensemble, permettant ainsi de passer d’une atmosphère à une autre en les caractérisant chacune et, dans les airs ou passages rapides, d’entraîner l’orchestre avec une belle énergie, relayée par Joël Grare, excellent aux percussions.


Une vraie réussite que les amateurs pourront prolonger en écoutant le disque réalisé par les mêmes, à la notable exception du remplacement de Hasnaa Bennani par Elodie Fonnard (Ambronay, AMY 046).


Le site de l’ensemble Les Surprises
Le site de Louis-Noël Bestion de Camboulas



Sébastien Gauthier

 

 

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