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Silence, on rase ! Orange
Théâtre antique
07/31/2018 - et 4* août 2018
Gioacchino Rossini : Il barbiere di Siviglia
Ioan Hotea (Il Conte Almaviva), Bruno de Simone (Don Bartolo), Olga Peretyatko (Rosina), Florian Sempey (Figaro), Alexey Tikhomirov (Don Basilio), Annunziata Vestri (Berta), Gabriele Ribis (Fiorello), Enzo Iorio (Ambrogio)
Chœur de l’Opéra Grand Avignon, Chœur de l’Opéra de Monte-Carlo, Stefano Visconti (préparation), Orchestre national de Lyon, Giampaolo Bisanti (direction musicale)
Adriano Sinivia (mise en scène), Marjolaine Uscotti, Mirabela Vian (assistantes à la mise en scène), Adriano Sinivia, Enzo Ioro (décors), Enzo Ioro (costumes), Patrick Méeüs (lumières), Gabriel Grinda (vidéos)
(© Philippe Gromelle)
Pour populaire qu’il soit, Le Barbier de Séville n’avait, curieusement, encore jamais été présenté à Orange. Il est vrai que le Théâtre antique, avec sa démesure, n’est peut-être pas l’écrin idéal pour le chef-d’œuvre de Rossini. Quoi qu’il en soit, Jean-Louis Grinda, le nouveau directeur des Chorégies, a parfaitement réussi son pari : le Barbier a toute sa place à Orange. Surtout s’il est proposé dans une mise en scène aussi inventive, astucieuse et enlevée que celle imaginée par Adriano Sinivia. Créé à Lausanne en 2009, où il a été repris en 2014 avant d’être programmé à Monte-Carlo, le spectacle a été idéalement adapté pour l’immense plateau du Théâtre antique. Adriano Sinivia a conçu un bel hommage au cinéma italien des années 1950. L’action est transposée dans un studio de Cinecittà, où l’on tourne un film intitulé Le Barbier de Séville. Avant même que retentissent les premières notes de la partition, de nombreux techniciens et des maquilleuses s’affairent pour mettre la dernière main aux préparatifs du tournage, sur un plateau rempli de projecteurs, de chaises pliables, d’une régie, d’une roulotte servant d’entrepôt pour les costumes et même d’une cantine où viennent s’attabler des figurants engagés sur d’autres productions (notamment des Indiens, des cowboys, des gladiateurs et un curé rappelant Don Camillo). Muni d’un haut-parleur, Adriano Sinivia parcourt le plateau en lançant des « coupez », « action » et autre « moteur ». Une Vespa et une Fiat 500 complètent les accessoires. Le spectacle ne souffre d’aucun temps mort et regorge de trouvailles et de références à l’âge d’or du cinéma italien, le tout brillamment réglé, dans une parfaite fluidité.
La partie musicale est au diapason de la mise en scène. A la tête de l’Orchestre national de Lyon, Giampaolo Bisanti offre une lecture vive et dynamique de la partition de Rossini, une lecture débordant d’énergie mais néanmoins équilibrée, fine et nuancée. On ne manquera pas de relever le continuo de Mathieu Pordoy, qui improvise avec malice des interludes comme au temps du cinéma muet. Mis à part le Basilio engorgé et guttural d’Alexey Tikhomirov, la distribution vocale est sans faille. Elle est emmenée par le Figaro de Florian Sempey, un rôle que le baryton français fait sien désormais après l’avoir rodé sur de nombreuses scènes. La présence scénique et la puissance vocale du chanteur en font un Figaro idéal, jeune et exubérant, espiègle et rusé. Physiquement et vocalement, il ne saurait être plus différent du Comte Almaviva de Ioan Hotea. Remplaçant au pied levé Michael Spyres, le ténor roumain incarne un aristocrate frêle et élégant, avec un joli timbre et une technique éprouvée, mais la voix n’est pas très puissante et les aigus sont un peu étriqués. La Rosine d’Olga Peretyatko séduit autant par ses aigus stratosphériques que ses graves veloutés, sans parler de son abattage scénique indéniable. On mentionnera également le Bartolo distingué de Bruno de Simone, qui n’en fait jamais trop, et la Berta truculente d’Annunziata Vestri. Le Barbier de Séville a réussi haut la main son entrée au Théâtre antique.
Claudio Poloni
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