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Esthétique bonbon anglais Paris Athénée - Théâtre Louis-Jouvet 06/19/2018 - et 15, 17, 23, 24 (Nantes), 31 (Le Perreux-sur-Marne) mai, 10, 12 (Angers), 20, 22, 24, 26*, 27, 29 (Théâtre de l’Athénée à Paris) juin 2018 André Messager : Les P’tites Michu (arrangement Thibault Perrine) Violette Polchi (Marie-Blanche), Anne-Aurore Cochet (Blanche-Marie), Caroline Meng (Mlle Herpin), Philippe Estèphe (Gaston), Boris Grappe (Général des Ifs), Damien Bigourdan (Monsieur Michu), Marie Lenormand (Madame Michu), Artavazd Sargsyan (Aristide), Romain Dayez (Bagnolet)
Pierre Dumoussaud (direction musciale)
Rémy Barché (mise en scène), Alix Fournier-Pittaluga (assistant à la mise en scène), Salma Bordes (décors), Oria Steenkiste (costumes), Florent Jacob (lumières), Marianne Tricot (illustrations), Stéphane Bordonaro (vidéo)
(© Nemo Perier Stefanovitch)
Présentation à l’Athénée - Théâtre Louis-Jouvet d’un spectacle déjà culte de la Compagnie Les Brigands dans le cadre du sixième festival Palazzetto Bru Zane à Paris.
Après Les Chevaliers de la Table ronde d’Hervé, la Compagnie Les Brigands, en coproduction avec Angers Nantes Opéra, s’attaque à une autre rareté du répertoire lyrique léger avec Les P’tites Michu, créé en 1897 aux Bouffes-Parisiens avant que Messager ne compose la triade Véronique, Fortunio et L’Amour masqué, ses plus grands succès. Disons d’emblée, sans vouloir diminuer notre enthousiasme – avouons-le – à découvrir ce petit bijou de l’opérette que la partition, même dans sa version réduite pour dix chanteurs et douze instrumentistes, exige des pointures tout de même supérieures à ce qui est réuni pour ce charmant spectacle. Particulièrement pour les deux rôles féminins, Blanche-Marie et Marie-Blanche, Demoiselles de Rochefort avant la lettre, qui étaient certainement le pont fort de la distribution pour leur jeu mais pas pour le chant. Certains ensembles et surtout les airs exigent beaucoup plus de volume et de sûreté vocale. Pour cela, on était plus près du compte avec les hommes, notamment les interprètes du Général des Ifs et d’Aristide (malgré une pointe d’accent étranger parfois gênante). Autre réserve de taille, de plus en plus souvent exprimée dans ce genre de spectacles donnés par de petits ensembles dans de petits théâtres à l’acoustique très sèche: le public vient entendre des voix et ne s’attend pas à ce que sorte de la fosse un volume sonore prompt à les couvrir. Mais certains chefs, particulièrement ceux qui sont arrivés à ce poste par la voie d’un instrument ou d’anciens chefs de chœur (ce qui n’était pas le cas pour ce spectacle), tiennent absolument à faire savoir que ce sont eux qui ont la vedette...
Ces réserves exprimées, et aussi, on doit le dire, au regret de constater que les producteurs pensent aujourd’hui que pour toucher un large public, on doit se rapprocher au plus près de l’esthétique des séries télévisées ou des émissions de variété grand public, l’actualisation du livret d’André Vanloo et Georges Duval, censé se passer sous la Terreur, est assez réussie. Cela tient, on le répète au grand talent de comédiennes d’Anne-Aurore Cochet et Violette Polchi, les deux fausses sœurs jumelles, qui réussissent à merveille à faire évoluer leur personnage dans le sens d’une intrigue aussi bien ficelée qu’invraisemblable. Aussi au charme tout à fait réel de la scénographie de Salma Bordes, aux costumes aux teintes de bonbons anglais d’Oria Steenkiste et à la mise en scène de Rémy Barché qui, avec des moyens limités, a réussi, principalement grâce à d’ingénieuses animations vidéographiques signées Marianne Tricotet et Stéphane Bordonaro, à faire avancer une action un peu convenue parfois et surtout combler quelques lacunes dans les dialogues de la version qui nous est proposée.
L’ensemble instrumental dirigé par Pierre Dumoussaud anime aussi très bien le propos quand il n’étouffe pas les chanteurs. Et quand il vient sur scène recueillir au rideau sa part d’applaudissements – comme il est de mode actuellement dans les grandes maisons d’opéra internationales – on mesure la savante alchimie du choix des instruments dans cette réduction réalisée par Thibault Perrine grâce à la complicité de la Fondation Palazzetto Bru Zane, que l’on ne remerciera jamais assez de nous permettre de faire ces savoureuses redécouvertes.
Olivier Brunel
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