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La mer en toile de fond

Lausanne
Opéra
06/03/2018 -  et 6*, 8, 10 juin 2018
Giuseppe Verdi : Simon Boccanegra
Roberto Frontali (Simon Boccanegra), Maria Katzarava (Amelia), George Andguladze (Jacopo Fiesco), Andeka Gorrotxategi (Gabriele Adorno), Benoît Capt (Paolo Albiani), Alexandre Diakoff (Pietro), Tristan Blanchet (Capitano), Myriam Bouhzada (Ancella)
Chœur de l’Opéra de Lausanne, Salvo Sgrò (préparation), Orchestre de Chambre de Lausanne, Salvo Sgrò*/Stefano Ranzani (direction musicale)
Arnaud Bernard (mise en scène et décors), Angela Saroglou (assistante à la mise en scène), Virgile Koering (assistant aux décors), Marianna Stránská (costumes), Kamila Sarkova (assistante aux costumes), Patrick Méeüs (lumières)


(© Alan Humerose)


C’est à un exploit qu’ont assisté les spectateurs de l’Opéra de Lausanne, sans le savoir pour la plupart d’entre eux car curieusement aucune annonce n’a été faite : devant être opéré d’urgence quelques heures seulement avant la première de la nouvelle production de Simon Boccanegra, le chef Stefano Ranzani a été contraint de céder sa baguette à Salvo Sgrò, qui avait préparé le chœur. Ce dernier a donc sauvé la mise au pied levé et s’est acquitté de sa tâche avec brio, menant la représentation à son terme comme si de rien n’était. Chapeau !


Comme à l’accoutumée, le plateau vocal réuni par l’Opéra de Lausanne est de grande qualité. Le rôle-titre est interprété par Roberto Frontali, qui donne au doge de Gênes un visage profondément humain, laissant transparaître amertume et tendresse ; et c’est véritablement à contre cœur qu’il accepte la lourde charge qui lui est confiée. Si la voix n’a peut-être pas toute l’envergure souhaitée, le baryton offre néanmoins de beaux moments de chant, avec une technique hors pair et un superbe legato. Maria Katzarava incarne une splendide Amelia : la voix est ample et généreuse, parfaitement homogène sur toute la tessiture, la soprano atteignant des sommets dans les passages élégiaques, avec des pianissimi évanescents. Le ténor espagnol Andeka Gorrotxategi est une révélation avec son timbre vaillant et lumineux, un nom à suivre. Le Fiesco de George Andguladze ne se hisse pas au même niveau : le timbre est sourd et engorgé et le grave manque d’ampleur. Le Paolo de Benoît Capt a fière allure, mais la voix est trop claire pour rendre totalement crédible la noirceur du personnage. Aussi le véritable «méchant» est-il le Pietro d’Alexandre Diakoff, qui réunit tous les atouts, scéniques et vocaux, pour faire de son personnage un parfait intrigant. Longtemps négligé, Simon Boccanegra retrouve, depuis quelque temps, les faveurs des théâtres lyriques, grâce notamment à la célèbre production Abbado/Strehler de la Scala. A juste titre d’ailleurs, car cette partition aux couleurs sombres est l’une des plus belles de Verdi. La distribution lausannoise ne fait que lui rendre justice.


La (relative) faiblesse de l’ouvrage, c’est son intrigue emberlificotée. Le metteur en scène Arnaud Bernard a intelligemment relevé le défi en s’attachant à rendre l’intrigue compréhensible : durant le Prologue, une petite fille accompagnée de sa nourrice accueille les bras ouverts son père, le corsaire Simon Boccanegra. Le destin de Maria apparaît ainsi moins obscur. L’action se déroule dans un cadre sombre avec la mer en toile de fond. Une mer omniprésente, que viennent aussi rappeler les cordages, les rames et les passerelles d'un impressionnant décor. Durant la célèbre scène du conseil, une machine ressemblant à celles dessinées par Léonard de Vinci soulève Boccanegra, qui se retrouve ainsi au-dessus de la foule en train de se déchirer. A la fin de l’ouvrage, le vieux doge meurt seul sur scène, la tête tournée vers la mer qu’il a tant chérie. Une réussite sur tous les plans.



Claudio Poloni

 

 

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