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Envoûtement

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Grand-Théâtre
09/26/2001 -  et 28 et 30 septembre 2001. 2, 5, 8 et 10 octobre 2001
Dimitri Chostakovitch : Lady Macbeth de Mzensk
Günter von Kannen (Boris), Christer Bladin (Zinovi), Nina Stemme (Katerina), Christopher Ventris (Sergueï), Irina Tchistjakova (Aksinia), Alexandre Vassiliev (le Pope), Alexandre Krawetz (Le Balourd et l'Ivrogne), Alexander Anisimov (Un vieux Bagnard), Hanna Schaer (Sonietka), Svetozar Rangelov (Un Sergent de police), Jaël Azzaretti (Une Détenue)
Orchestre de la Suisse Romande (OSR) et Chœur du Grand Théâtre de Genève (préparé par Ching-Lien Wu). Armin Jordan (direction)
Nicolas Brieger (mise en scène), Matthias Fischer-Dieskau (décors), Bettina Walter (costumes), Kranck Evin (lumières)


L'univers de Lady Macbeth de Mzensk, violent, sournois, sordide, a trouvé dans la mise en scène de Nicolas Brieger (remplaçant Adolf Dresen récemment décédé) et les décors de Matthias Fischer-Dieskau un cadre réaliste seyant parfaitement au déroulement de l'intrigue. Dès les premiers instants, l'antre de Lady Macbeth et de son beau-père vicieux et opportuniste apparaît comme un palais où règne en maître l'ennui et la cruauté. En léger surplomb par rapport au monde ouvrier évoqué en arrière-plan, cet espace "vital" nu et terne entoure Katerina qui chante son ennui et ses frustrations, jusqu'à l'apparition de Sergueï, qui lui fera providentiellement connaître le plaisir sexuel auquel elle n'a pas droit avec son mari. Basculant progressivement vers le fond de la scène, c'est-à-dire hors des limites de sa demeure, Katerina se donnera sauvagement au vigoureux ouvrier et quittera ainsi quelques instants le contexte léthargique et tyrannique qui la retient prisonnière. Tel un diaphragme d'appareil photographique, la scène se réduit progressivement pour se focaliser sur la chambre de Katerina ou, au contraire, s'ouvre sur des étendues infinies, disproportionnées. Les subtils éclairages prolongent l'espace scénique par la lumière qu'ils confèrent aux cieux recouvrant les plaines de Sibérie. La profondeur de champs semble sans limite. Une esthétique d'une admirable justesse de ton. Ni pittoresques, ni abstraits, les décors, sobres, permettent au jeu des acteurs de se déployer, de respirer. Les passions, les violences, la démesure sont autant de composantes du livret d'Alexander Preis et Chostakovitch que l'intelligence picturale des divers maîtres d'oeuvre souligne avec probité. Aucune édulcoration de la trame de l'histoire n'a été envisagée. Les scènes de meurtre, de sexualité sont présentées sans éther, tout en évitant l'écueil du voyeurisme ou de la vulgarité. Seule interrogation à ce sujet, la scène qui préfigure l'intervention policière ayant pour but l'interpellation de Sergueï et de sa nouvelle épouse. En rang serré, les sbires de l'ordre public astiquent leur matraque en positionnant celle-ci comme un prolongement endémique d'une libido que l'on devine refoulée. Le livret ne comporte-t-il pas déjà toute une foule d'éléments dont la teneur est sans équivoque - et que rehausse encore une musique elle-même des plus explicites ? A ce titre, l'orchestre a installé les différentes ambiances imaginées par Chostakovitch en les laissant investir progressivement l'univers sonore déployé. Suggestive, la direction d'Armin Jordan a envoûté le public. Très lié, son discours se développe progressivement, s'insinue tout d'abord, occupe ensuite petit à petit la place qui se doit de lui échoir. Sans précipitation, toujours avec un souci narratif mûrement pensé, la phalange romande dépeint le contexte avec un très beau sens des couleurs et parvient même à un humour de bon aloi lors de la fameuse scène "X" du premier acte. Quelques sonorités occasionnellement plus crues, plus martelées n'auraient cependant pas dépareillé. L'orchestre entourait une palette de chanteurs et un choeur - placé pour la première fois sous la houlette de sa nouvelle préparatrice Ching-Lien Wu - de très grande qualité. Puissant et expressif, le chant de Nina Stemme répondait aux assauts de Christopher Ventris, très à son aise. Les rôles secondaires furent également de tout premier plan. Du pope à l'intrigante Sonietka, en passant par les marchands père et fils, la distribution a parfaitement rempli sa mission, autant du point de vue vocal que scénique.




Bernard Halter

 

 

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