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Respiration continue

Strasbourg
Palais de la Musique
04/06/2018 -  
Ludwig van Beethoven : Symphonies n° 1 en ut majeur, opus 21, et n° 4 en si bémol majeur, opus 60
Qigang Chen : Extase
Johann Nepomuk Hummel : Introduction, Thème et Variations pour hautbois et orchestre, opus 102

François Leleux (hautbois)
Orchestre philharmonique de Strasbourg, Marko Letonja


F. Leleux


Après une pause de quelques mois, suite de l’intégrale des Symphonies de Beethoven par Marko Letonja et l’Orchestre philharmonique de Strasbourg. Le principe de ce cycle restant d’y faire voisiner le corpus beethovénien avec de courtes œuvres modernes, choisies nettement hors des sentiers battus de la musique dite « contemporaine ».


Voici donc ce soir Extase pour hautbois et orchestre du compositeur chinois Qigang Chen, connu à Strasbourg pour y avoir été compositeur en résidence il y a treize ans déjà. D’un seul tenant, la partition associe des bariolages orchestraux pas toujours très marquants à une partie de hautbois solo qui paraît d’une virtuosité délirante, n’épargnant au concertiste aucun escarpement ni saut d’intervalle vertigineux et poussant sa respiration jusqu'aux limites du possible. Une pièce qui paraît écrite sur mesure pour les capacités de François Leleux, hautboïste dont la carrure et les réserves de souffle ne déshonoreraient pas un trompettiste. Partition toute en effets et en instants jusqu’au-boutistes, moments, effectivement, d’aspiration au dépassement voire à l’extase. Le soliste reste imperturbable, pratique la respiration continue avec une impavidité réjouissante, comme si ses poumons fabriquaient de l’oxygène en autarcie. En définitive, c’est assez amusant, parfois un peu scriabinien dans l’élan vers une transcendance un rien naïve. Mais c’est aussi une musique qui s’oublie assez facilement ensuite.


Introduction, Thème et Variations de Hummel n’est pas non plus une pièce immortelle, mais c’est un beau morceau de virtuosité pour hautbois et orchestre dont la fabrication ne présente aucun défaut apparent. Tout y est joliment tourné, avec une inspiration mélodique délicieuse, et François Leleux n’a pas son pareil pour y concilier aisance charmeuse et virtuosité d’équilibriste. A noter qu’ici il n’y a pas de hautbois dans l’orchestre (Hummel sait ne pas tomber dans le piège d’un possible pléonasme des timbres) et que tout est fait pour mettre le soliste en valeur, comme s’il s’agissait d’un grand chanteur dans un ouvrage lyrique belcantiste. Rien d’étonnant, dès lors, que Leleux y plastronne un peu. Il est vraiment là pour ça !


Côté Beethoven, le programme associe deux symphonies assez légères de ton, pour lesquelles Marko Letonja a choisi aussi un effectif pas trop fourni. Une recherche de transparence qui peut desservir parfois l’orchestre, surtout quand elle enlève de la substance conjonctive autour de certains pupitres d’une solidité perfectible à Strasbourg en ce moment (trompettes et cors), mais qui ce soir fonctionne sans anicroche. Dans la Première Symphonie, Letonja n’a pas besoin de souligner ostensiblement la filiation haydnienne : tout se met en place naturellement, sur des tempi vifs qui n’empêchent pas cependant de respirer à l’aise. Rien de forcé, pas de valeurs de notes grignotées non plus sous prétexte d’alacrité rythmique, la musique s’écoule bien et surtout l’interprétation ne cherche à singer personne et laisse le fantôme Harnoncourt dormir en paix pour un soir. Une indépendance idéologique dont on ne peut que féliciter Marko Letonja, qui a d’autres atouts à faire valoir, en particulier dans une Quatrième Symphonie dont les gradations dynamiques sont judicieusement construites. Dans cette intégrale Beethoven en cours un volet serein, mais qui n’a rien de mineur.



Laurent Barthel

 

 

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